Étudié ce 15 juin au Sénat, le projet de loi de lutte contre le dérèglement climatique est amendé pour répondre aux craintes de la filière vin, suite à la mobilisation de l’Association nationale des élus de la vigne et du vin (Anev). Là où l’article 11 imposait à partir du premier janvier 2030, une obligation de vente sans emballage de 20 % des produits (pour les surfaces supérieures à 400 mètres carrés), l’amendement 671 porté par le sénateur charentais Daniel Laurent est adopté pour exemptés toutes les boissons alcoolisées, dont les vins (« les produits passibles des droits mentionnés aux articles 402 bis, 403, 438 et 520 A du code général des impôts sont exclus du calcul de la proportion de vente en vrac »).
Modifié en commission au Sénat, l’article 12 du projet de loi voulait imposer une trajectoire chiffrée pour le réemploi des bouteilles en verre, une obligation de consigne qu’abroge l’amendement 224 porté par la sénatrice bordelaise Nathalie Delattre et adopté « alors que 90% des bouteilles en verre sont destinées à contenir des boissons alcoolisées pour lesquelles la vente en vrac n'est pas pertinente ». En l'état, cet article ne serait plus contraignant.


Lors de la séance publique, le gouvernement et la rapporteure se sont opposés à ses amendements. « Je partage le diagnostic des auteurs des amendements, mais exclure a priori certains produits n'est pas souhaitable. Gardons un objectif ambitieux. Tout le monde connait le faible potentiel des boissons alcoolisées en matière de vrac ; l'objectif de 20% le prend en compte » déclare Barbara Pompili, la ministre de la Transition écologique. « J'entends les inquiétudes. Le texte de commission n'impose aucune obligation, pour aucune filière. Il prévoit une évaluation de la mise en place d'une consigne pour réemploi, avant toute décision. Les garanties sont là, nous pouvons avancer raisonnablement » précise la sénatrice francilienne Marta de Cidrac, rapporteure du projet de loi.
Ces arguments n’ont pas suffi à tranquilliser les sénateurs s’opposant à ces dispositions. « On ne peut réutiliser les bouteilles pour conserver le vin effervescent - sinon, il y a des risques d'explosion. La filière champagne, c'est 300 millions de bouteilles, dont 50 % sont exportées. Comment lui imposer un taux de réemploi ? » pose le sénateur champenois René-Paul Savary. « Si l'on ne stabilise pas le climat, c'est toute la filière viticole qui disparaîtra. Je m'étonne que le monde viticole, qui a suscité ces amendements identiques, ne se mobilise pas davantage pour une loi Climat crédible, susceptible de créer une dynamique mondiale » critique le sénateur nantais Ronan Dantec, pour qui « le secteur viticole pourrait être la vitrine de la lutte contre le changement climatique avec des bouteilles un peu plus normées - quitte à faire une exception pour le champagne ».


« Les conséquences du réchauffement climatique, les viticulteurs sont les premiers à les subir. Même le bio est en bouteille de verre ! Évitons les clichés. Votons cet amendement, pour rassurer les viticulteurs et accompagner la filière dans son combat. Dans la lutte contre le réchauffement climatique, il y a plus urgent que le verre » réplique la sénatrice Nathalie Delattre, coprésidente de l’ANEV.
La deuxième lecture du projet est attendue courant juillet devant l’Assemblée Nationale, le Sénat devant valider le projet de loi ce 29 juin. René-Paul Savary voit dans ces amendements des bases de négociation avec les députés pour trouver un accord adapté aux spécificités de la filière vin.