La quatrième édition de ce classement des marques les plus puissantes du monde* fait, inévitablement, la part belle aux pays producteurs du Nouveau Monde. Peu de place est accordée aux marques européennes globalement et parmi les marques françaises, seuls J.P. Chenet et Mouton Cadet y figurent. Mais ce n’est pas tant « l’impuissance » des marques européennes qui est à souligner cette année, que le déficit de capital-marque qui a émergé pendant la crise sanitaire.
« L'indice 2021 montre une chute libre et généralisée au niveau des critères clés de la santé d’une marque, telles que la capacité de rappel de l’achat, l'affinité, la recommandation et l’intention d'achat futur, autrement dit, les moteurs de la réussite et de la valeur de la marque à long terme », alerte Wine Intelligence. Ainsi, pour l’analyste britannique, la grande question que doivent se poser les propriétaires de marques à l’issue de la crise, c’est comment regagner le terrain perdu en termes de rappel d’achat et de liens avec les consommateurs. Une évolution qui coïncide avec le bouleversement de nos habitudes de consommation : l’absence de sorties, la modification des modes d’achat et du rapport avec la catégorie vin.
Au sein de cette mutation, Wine Intelligence pointe la fermeture du circuit CHR et le manque de temps, de disponibilité d’esprit et de motivation chez les consommateurs comme étant à l’origine de ce changement de valeurs. On peut même s’interroger sur la corrélation entre le CHR et la pérennité de la notoriété/capital-sympathie des marques. Les consommateurs ont pris moins de temps pour évaluer leurs achats, éventuellement en compagnie d’un responsable de rayon ou d’un caviste, créant ainsi une rupture dans le lien affectif avec les marques. Une cassure qui touche notamment la grande tranche de consommateurs qui occupe l’espace entre les amateurs avertis et les buveurs peu assidus. « Ils reviennent par défaut à une relation moins forte avec la catégorie en général, et semblent avoir réduit le portefeuille de grandes marques qu’ils consomment, apprécient et recommandent aux autres, même si les chiffres de vente laissent à penser que cette évolution n’a pas entraîné de baisse du volume de vin acheté globalement sur la plupart des marchés », observe l’analyste.
Ce paradoxe atteint son comble lorsqu’on sait que bon nombre d’observateurs affirment que les consommateurs se sont rués vers les grandes marques en quête de valeurs rassurantes, réconfortantes, reconnaissables, par temps de crise. Quoi qu’il en soit sur le long terme, Wine Intelligence prédit que dans l’immédiat, les opérateurs devront reconstruire leurs relations avec leur clientèle au niveau international, « au moment où d’autres catégories de boissons, comme les prêts-à-boire et les spiritueux se livrent à une vive concurrence pour s’approprier les occasions de consommation dédiés aux vins ».
*L’indice 2021 a été réalisé à partir des retours de plus de 25 000 consommateurs sur 25 marchés clés dans le monde :
Yellow Tail ; Casillero del Diablo ; Jacob’s Creek ; Gallo Family ; Barefoot ; Gato Negro ; J.P. Chenet ; Mouton Cadet ; Santa Carolina ; Torres ; Lindemans ; Frontera ; Beringer ; Robert Mondavi ; Campo Viejo