Exercice intéressant auquel s’est livré l’analyste britannique Wine Intelligence la semaine dernière, dans le cadre d’un webinaire dédié aux évolutions du marché suédois avant et post-Covid 19. S’appuyant sur les résultats de son observatoire suédois, Lulie Halstead, directrice de l’agence, a détaillé les comportements des consommateurs pendant la crise de 2020 et plus globalement. On apprend notamment que les consommateurs réguliers de vin sont plutôt vieillissants – 51 % d’entre eux ont plus de 55 ans – et en diminution, passant de 4,8 à 4,3 millions au cours des cinq dernières années. Sans surprise, et reflétant une tendance assez généralisée, leur moral est plutôt en berne actuellement.
Côté positif : leurs achats de vin ont augmenté sensiblement en 2020 (+9 % selon Systembolaget) et les occasions de consommation se sont élargies, avec une fréquence de consommation en hausse de 14 % (mars 2019-octobre 2020). Enfin, les labels éthiques constituent des critères d’achat plus persuasifs que les médailles, sans doute grâce au message plus centralisé communiqué par le monopole d’achat dans ce domaine. Jusque-là, concordance d’avis entre Wine Intelligence et Systembolaget.
Mais après, les conclusions sont moins unanimes. En effet, si Wine Intelligence pointe une montée en puissance des grandes marques – pour leur côté rassurant en temps de crise – et le développement des petits formats, le responsable produits chez Systembolaget est moins catégorique. S’il reconnaît que les demi-bouteilles de Champagne ont fait un bond en avant de 60 % avant Noël, il n’y voit pas une tendance durable : « le monopole prône une consommation modérée, mais sa structure, caractérisée par un nombre relativement faible de points de vente, ne favorise pas les petits formats. D’ailleurs, c’est cette structure qui explique en partie le succès des bag-in-boxes ».
De même, il souligne une volonté de découverte parmi les consommateurs suédois en 2020 : « les nouveautés se sont plutôt bien vendues alors que les grandes marques n’ont pas montré d’évolution notable. L’absence de soirées a peut-être encouragé les consommateurs à moins se rabattre sur les valeurs sûres ».
Et enfin, si pour Wine Intelligence, les Suédois utilisent leur bon niveau de connaissances œnologiques pour dénicher les bonnes affaires, Ulf Sjödin MW reste persuadé que la premiumisation est bel et bien en marche : « c’est l’une des grandes tendances de 2020. Les vins vendus à plus de 30 euros ont progressé de 27% ». Certes, il a pu se produire un phénomène de report, avec la diminution des sorties au restaurant, mais d’après le responsable de Systembolaget, il s’agit d’une tendance de fond.
Idem pour le développement durable, qui ira crescendo dans les appels d'offre du monopole. « Cela me réjouit de voir que pour les Suédois, le développement durable prime sur les médailles. C’est cohérent avec le message communiqué par Systembolaget ». Et d’annoncer que vers la fin 2021 ou début 2022, le monopole entend promouvoir davantage le développement durable, dans une optique à la fois sociétale et environnementale. « Il s’agit de mettre en exergue des vins qui remplissent toutes les conditions ; être en culture biologique aujourd’hui ne suffit plus » affirme-t-il, citant l’exemple du Chili, qui propose souvent des vins issus du développement durable et du commerce équitable. Les vins bios auront profité de la crise sanitaire, leurs ventes ayant progressé de 17 % en 2020 pour représenter près d’un quart du marché. Cette tendance va se poursuivre, mais Systembolaget dit rechercher désormais « une approche plus globale ».