Vinification selon la tradition
Le rosé de saignée sauvé pour les Bordeaux 2020

Alors qu’un groupe de travail national est créé sur le sujet, l’administration calme le jeu pour ce millésime en suspendant tout contrôle ayant trait à la production de vins rosés par saignée.
« La réalisation de rosés issus de saignée pour la récolte 2020 ne sera pas intégrée aux axes de contrôles des administrations » annonce la lettre aux opérateurs des vins de Bordeaux et de Bergerac envoyée le 11 septembre dernier par la Direction Régionale des Entreprises et de la Concurrence (Direccte) et l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (Inao). Alors qu’un récent jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux met en danger la pratique traditionnelle du rosé de saignée, faute de cadre réglementaire et de précisions dans les cahiers des charges AOC, l’administration de Nouvelle-Aquitaine hisse le drapeau blanc, pour le millésime 2020 du moins.
Si la Direccte et l’Inao reconnaissent la valeur traditionnelle de la production de vins rosés par saignée, l’administration souligne que « cette pratique menée sur des cuves de vin rouge se trouve aujourd’hui dépourvue d’un régime juridique stable. En ne prévoyant pas d’exception dédiée aux rosés de saignée dans le point II de son article D.645-12, le Code Rural peut représenter un vecteur d’insécurité juridique ». Exemptant notamment les vins de Champagne, les vins liquoreux et les Vins Doux Naturels (VDN), la loi en question indique qu’« il ne peut être déclaré dans la déclaration de récolte, pour les vins produits sur une superficie déclarée de vignes en production, qu'une seule appellation d'origine contrôlée ou qu'un seul type de produit bénéficiant de la même appellation d'origine contrôlée ».
Alors que l’aberration d’une pratique traditionnelle devenue illicite faute de cadre juridique fait grincer de nombreuses dents dans le vignoble bordelais (même si la pratique semble être de moins en moins courante), l’INAO vient d’ouvrir un groupe de travail pour résoudre ce blocage paradoxal avec l’appui des administrations et des représentants de la filière. « Nous sommes pour le respect du droit, s’il faut rendre plus clair un texte et être plus traçable à la parcelle, nous le ferons en défendant la bonne compréhension des textes » explique un membre de la Confédération Nationale des Vins AOC (CNAOC), qui note qu’un autre dossier épineux, la question du repli des AOC, est bien plus complexe, demandant d’articuler des textes européens et français.