Épandage des pesticides : les préfets doivent protéger les riverains, pas aggraver la situation ! » interpellent ce 16 avril les dix Organisations Non Gouvernementales ayant obtenu la mise en place de Zone de Non Traitement (ZNT) suite à leur interpellation du Conseil d’Etat (annulant en juin 2019 l’arrêté de mai 2017 sur l’utilisation de produits phytosanitaires pour l’absence de dispositions destinées à protéger les riverains des zones traitées). Alors que les diminutions de 10 à 5 ou 3 mètres des ZNT sont applicables, malgré la non-ratification par les préfets des chartes riverains les autorisant, les ONG s’indignent « des réductions supplémentaires inadmissibles en cette période de confinement ».
Proposant aux citoyens un outil d’interpellation massif des préfectures, basé sur la plateforme Shake Ton Politique de Générations Futures, les ONG souhaitent peser sur la campagne de traitements. Ainsi, l’UFC que Choisir indique que « nos ONG appellent à la mobilisation générale pour que les préfets interdisent les pulvérisations de pesticides près des habitations et que soient reportées sine die les consultations publiques autour des chartes "pesticides". Nombre d’organisations et de riverains ont souhaité attirer l’attention des autorités sur la situation particulièrement pénible actuellement vécue par de nombreuses personnes confinées à leur domicile - comme l’ensemble de la population française - et qui doivent subir les dérives de pesticides pulvérisés à très faible distance de leurs domiciles. »
Ces demandes n’étonneront pas les vignerons bordelais, qui les entendent depuis deux semaines. Depuis ce 3 avril, les associations Collectif Info Médoc Pesticides et Alerte Aux Toxiques demandent à la préfecture de Gironde « que les pulvérisations de pesticides de synthèse soient suspendues car considérées comme non essentielles et aggravant la détresse respiratoire des personnes malades du Covid-19 » (suite à des pics de pollution qui « amplifient la détresse respiratoire des malades atteints du Covid-19 et compliquent les soins qui leur sont apportés »). Ce 15 avril, Alerte Pesticides Haute Gironde et Générations Futures Bordeaux proposent une contre-consultation en ligne à la charte riverain rédigée par la Chambre d’Agriculture de la Gironde.
Source de bien des tensions, cette charte est en consultation publique depuis le 30 mars et jusqu’au 30 avril. « Elle est le seul moyen de réduire les distances de protection vis-à-vis des riverains en utilisant des produits conventionnels de 10 m à 5 m, voire 3 m en fonction du type de matériel utilisé » rappelle le syndicat de l’AOC Bordeaux, qui soutient l’initiative et appelle ses ressortissants à participer à cette consultation. Affichant leur désaccord avec le fond et la forme de la consultation, les deux ONG girondines estiment que « seuls sont mis en avant les quelques points positifs comme l'avertissement préalable par SMS, ou l'utilisation de pulvérisateurs limitant les dérives. Mais nulle part le citoyen ne peut donner son avis sur le fait, qu'une fois la charte validée par la préfecture, les viticulteurs qui l'auront signée, chacun dans leur coin, pourront déroger aux distances déjà ridicules de l'arrêté national du 27 décembre 2019 ».


Alors que les premiers traitements commencent dans le vignoble bordelais, cette escalade des tensions est prise en exemple par les dix ONG nationales interpellant les préfets : « certaines consultations sont tellement orientées que les réponses apportées vont inévitablement biaiser le débat comme c’est le cas aujourd’hui en Gironde où des structures locales ont préféré lancer une contre-consultation tant celle proposée par la chambre d’agriculture fausse le débat ». « Au vu du contexte actuel, la période n’est pas propice à une consultation sereine et réellement démocratique des diverses parties prenantes. » souligne l’UFC Que Choisir, qui « demande d’interdire les épandages de pesticides à proximité des habitations (et en tout état de cause de ne pas promulguer d’arrêtés préfectoraux permettant de déroger à ces zones de non traitement) ».
* : Ces dix ONG sont Alerte Médecins Pesticides, Eau & Rivières de Bretagne, Générations Futures, Greenpeace France, Justice Pesticides, Mouvement de l'Agriculture Bio-Dynamique, MIRAMAP, Terre & Humanisme, UFC-Que Choisir, Union syndicale Solidaires.