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Quelles grandes orientations pour le vin sur les marchés scandinaves ?
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En 2019
Quelles grandes orientations pour le vin sur les marchés scandinaves ?

Dans le dernier baromètre Prowein des marchés mondiaux du vin, la Scandinavie était classée quatrième marché le plus attractif au monde. Souvent considérée comme complexe du fait de son système de monopole, cette région offre pourtant des opportunités à saisir. Cruz Liljegren, ancien sommelier devenu courtier, fait un tour d’horizon des dernières tendances.
Par Sharon Nagel Le 01 février 2019
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Quelles grandes orientations pour le vin sur les marchés scandinaves ?
D’origine suédoise, le courtier Cruz Liljegren a détaillé les tendances du marché scandinave du vin lors d’une conférence à la World Bulk Wine Exhibition à Amsterdam fin 2018 - crédit photo : Cruz Liljegren
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out d’abord il faut s’entendre sur le terme marché scandinave. « Le Danemark ne peut se comparer aux trois autres pays. Il s’apparente davantage au Royaume-Uni », explique le fondateur suédois de la société Premium Wine Broker, basée en Espagne. « En revanche, on peut tout à fait comparer les marchés suédois, finlandais et norvégien, avec quelques nuances. La Suède et la Finlande sont un petit peu plus progressistes que la Norvège, plus traditionnelle. Il faut savoir que bon nombre d’importateurs de la région sont originaires de la Suède et expatrient leur activité en Finlande et en Norvège parce que ce sont aussi des pays à monopole. D’ailleurs dans ces deux cas, les monopoles s’inspirent de Systembolaget ». Même si les marchés sont structurés de longue date de cette façon, les pratiques évoluent. « Depuis longtemps, la Scandinavie crée des marques pour son marché local. Mais là où par le passé, les monopoles eux-mêmes s’en chargeaient, aujourd’hui ce sont plutôt les importateurs ». Dans un cas comme dans l’autre, la valeur ajoutée est transférée depuis l’amont vers l’aval et les producteurs doivent faire preuve d’ingénuité pour séduire les importateurs. « La qualité globale des vins maintenant est élevée. L’argument qualité ne suffit donc pas pour se faire reconnaître par les importateurs ».

Stagnation des ventes de BIB

Ces dernières années, le format bag-in-box a pu permettre de répondre à cet impératif. Mais avec des parts de marché qui ont déjà atteint 40 à 55% selon les pays, ce segment offre-t-il encore des perspectives de croissance ? « Il semblerait qu’on ait atteint un pic », reconnaît Cruz Liljegren. « Le marché progresse depuis de nombreuses années, avec la Suède en tête. Il n’y aucune raison de croire que ce segment va progresser, ni régresser. Il paraît plutôt stable ». Là aussi, ce sont les importateurs qui mènent le bal. « Sur ces marchés à monopole, les possibilités offertes aux producteurs pour s’imposer en faisant preuve de créativité restent limitées. Les bag-in-boxes les plus vendus en Suède, par exemple, sont tous créés par des importateurs qui s’appuient sur des agences de création locales, dont certaines sont spécialisées uniquement dans les bag-in-boxes. La meilleure solution pour y commercialiser des BIB reste donc de cultiver de bonnes relations avec un importateur, car un producteur aura peu de chances de créer un bag-in-box performant sur le marché ». Quant à d’autres formats qui pourraient prendre le relais, l’ancien sommelier reste sceptique. Pour prendre l’exemple des portions individuelles, en cannettes, qui commencent à prendre d’assaut d’autres marchés comme les Etats-Unis ou le Royaume-Uni, il estime qu’ils ne correspondent ni à la mentalité des Scandinaves, ni aux pratiques de vente employées par les monopoles. « Les Scandinaves ne sont pas des gens très spontanés et les portions individuelles, du moins pour les blancs, fonctionnent sans doute mieux en achat impulsif dans des magasins où il y a un réfrigérateur. Or, dans les monopoles il n’y en a pas. Tous les vins sont vendus à température ambiante ». Sans parler du prix, qui pourrait vite devenir prohibitif. C’est bien ce qui explique en partie le succès des BIB.

 

Déjà particulièrement bien achalandé, le rayon BIB dans les magasins de Systembolaget en Suède

 

Les Italiens raflent la mise

Autre succès à souligner, celui des vins italiens, qui ont fait une percée phénoménale sur le marché suédois. Désormais une bouteille de vin rouge sur quatre vendue en Suède provient d’Italie. « La part de marché des vins italiens a fait un bond d’environ 100% en dix ans, c’est colossal », constate le courtier suédois. « Les exportateurs italiens ont réussi à prendre des parts de marché aux Sud-Africains et plus globalement au Nouveau Monde ». A cela, plusieurs raisons estime-t-il : « Le succès des vins italiens résulte de la conjugaison de plusieurs tendances concomitantes. On assiste à un retour en grâce des vins authentiques en provenance de régions productrices traditionnelles, et le Nouveau Monde en a payé les frais. Pourquoi l’Italie en particulier aurait-elle profité de cette tendance ? Parce que les Scandinaves connaissent bien la gastronomie italienne et ils choisiront plus volontiers l’Italie pour passer leurs vacances que l’Espagne par exemple ». Cruz Liljegren cite aussi une autre explication, cette fois plus mécanique : « On peut l’attribuer au fonctionnement des monopoles. Une fois qu’une tendance commence à se dessiner, aussi petite soit-elle, les monopoles référencent tout de suite d’autres produits dans la même catégorie. Qui dit sélection étoffée, dit aussi attractivité renforcée pour le consommateur qui, de ce fait, en achète davantage et il se crée ainsi un effet boule de neige. C’est ce qui s’est passé avec l’Amarone. Petite tendance au départ, l’attirance pour ce vin rouge italien s’est fortement développée et aujourd’hui il représente le vin rouge le plus courant dans la tranche de prix supérieure à 10 euros, du moins en Suède ».

Les bulles font fureur

Toujours parmi les rouges, le courtier suédois note aussi l’engouement en faveur des vins légèrement sucrés. « Si vous regardez les bag-in-boxes les plus vendus, par exemple dans les magasins de Vinmonopolet en Norvège, huit vins rouges sur dix l’année dernière contenaient plus de 10g de sucre résiduel. Idem en Suède. Les vins rouges les plus prisés contiennent souvent du sucre résiduel. C’est une grande tendance à l’heure actuelle ». Autre mode, cette fois pointée par l’agence britannique Wine Intelligence : celle des vins effervescents en Suède. Si la tendance bien-être mine la consommation de vins tranquilles et de spiritueux sur le plan des volumes, les effervescents s’inscrivent actuellement à contre-courant. « Les effervescents affichent une croissance remarquable et ont suscité un intérêt accru parmi les consommateurs, les incitant par ailleurs à dépenser globalement plus », note Emily Carroll de Wine Intelligence. Les ventes de bulles progressent chaque année depuis 2012 pour un public de plus en plus large, et des occasions de consommation qui commencent à dépasser les seules fêtes. Le Champagne en tire amplement parti, mais le prosecco et le cava ne sont pas en reste. « A présent, la consommation de vin effervescent est considéré comme un plaisir, et moins comme une boisson qui nécessite un effort intellectuel. Petit à petit, il s’impose comme un vin de tous les jours ».

Les ventes en ligne : un créneau porteur

Pour arriver à se frayer un chemin sur ces trois marchés, Cruz Liljegren estime que les ventes en ligne offrent une belle opportunité de générer de la croissance. « En 2016, les ventes de vins en ligne ne représentaient que 1,3% des achats de boissons alcoolisées par les particuliers en Suède », explique-t-il. « Le chiffre est très bas parce qu’on dirait que personne ne veut investir dans ce circuit. Il faut reconnaître que c’est une zone grise, et qu’on a peur que cela puisse devenir illégal à l’avenir. Néanmoins, certaines entreprises se sont immatriculées en Allemagne et au Danemark et ont le droit de cibler les consommateurs suédois. Si les gens étaient disposés à investir dans ce canal, je pense que les ventes de vins en ligne pourraient se développer fortement, et s’aligner davantage sur l’alimentaire en général ».  

 

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