lors que les vendanges se terminent à peine, dans le plus grand bassin de production des vins IGP, le Languedoc-Roussillon (qui devrait produire 12.3 à 12.4 millions d’hl), les transactions sont toujours en sommeil. Si quelques achats de rosé sont rapportés, pour l’instant, personne n’est passé massivement aux achats, i.e. Castel et Grands chais n’ont pas encore passé commande. Par ailleurs, les vinifications battent leur plein et les caves doivent encore déterminer leurs assemblages pour donner un panorama de l’offre qui sera la leur pour ce millésime 2018.
Durant ce calme, les premières réunions sur l’orientation des cours pour cette nouvelle campagne ont eu lieu. Et c’est la Confédération des vins IGP de France qui a donné le coup d’envoi des premières préconisations en prenant une position officielle par voie de communiqué de presse le 10 octobre dernier. Leur président, Gérard Bancillon, y indique : « le niveau qualitatif de ce millésime 2018 et l’absence de stocks pour la campagne à venir plaident pour une stabilité des cours au niveau de ceux de la campagne précédente ». Une position nationale partagée par le président des Vignerons coopérateurs, Boris Calmette, pour les IGP du Languedoc-Roussillon. « Avec des disponibilités à 18 millions d’hl en Languedoc-Roussillon, la plus faible de ces dernières années, la stabilité des cours paraît censée ». Ce dernier rappelle que les prix 17/18 n’ont pas freiné la commercialisation des Pays d’Oc (80 % des volumes IGP de France) l’an dernier. Bien au contraire. « Nous avons gagné 17 000 hl de sortie » précise-t-il.
Tenir compte des coûts de production
Denis Verdier, président des IGP du Gard, est pour sa part plus ambitieux. Il demande une hausse des prix. « Cette année, les coûts de production au vignoble sont plus élevés du fait de la pression du mildiou. Ils ont augmenté de l’ordre de 20 à 30%. Par ailleurs, le respect de l'environnement a un coût, ce qui doit se traduire en matière de prix aux producteurs, sans que pour autant il y ait une répercussion sur les prix au consommateur » estime-t-il, lors d’une conférence de presse qui s’est tenue le 15 octobre à Nîmes.
Ce discours des représentants de la viticulture tient-il compte suffisamment de l’offre mondiale qui dicte l’orientation du marché ? Le panorama de l’offre mondiale est radicalement différent de celui de l’an dernier marqué par le repli de la production. Notamment, l’Italie et l’Espagne ont des récoltes en hausse. Et les premiers prix de vente de vin en vrac affichent clairement un retour des prix semblables à ceux de la campagne 16/17, et en baisse de 20 euros/hl par rapport à la campagne 17/18. « Les blancs génériques du Nord de l’Italie s’étalonnent à 30 euros/hl. Pour ceux d’Espagne, c’est le même prix voire moins » alerte un courtier. Ainsi, les deux pays se positionnent déjà pour prendre les marchés des génériques et pourront entrer dans l’assemblage de la catégorie « Vin issu de la communauté européenne », profilée pour les entrées de gamme. De quoi, par ailleurs, mettre hors-jeu l’offre française sur ce segment de prix.
« Nous souhaitons défendre la stabilité des prix » affiche Gilles Gally, président de l’UEMV (Union des Entreprises Viticoles Méditerranéennes). Selon lui, en Languedoc Roussillon, cet objectif de stabilité peut être tenu pour un volume équivalent à celui produit l’an passé, soit 10.5 millions d’hl. Mais à une condition. « Il faut une répartition adéquate de l’offre des vins en fonction des qualités. C’est le seul moyen d’y parvenir ! » martèle-t-il. Reste les 2 millions d’hl produits cette année pour lesquels, il faut trouver une destination. Là encore, leur commercialisation dépendra « de la bonne hiérarchisation » explique Gilles Gally. A quel prix ? « Ce sera soit dans la moyenne des prix 17/18, soit à nouveaux tarifs à la baisse. Mais je suis bien incapable de prédire quel sera le scénario. Tout dépendra de la négociation commerciale avec les clients ».
Et parmi ces clients, il y a la grande distribution. « Si les prix à la production venaient à baisser, on serait bien surpris de voir les prix aux consommateurs diminuer aussi » s'exclame Boris Calmette qui remarque que les prix des bouteilles n’ont pas franchement évolué entre 16/17 et 18/19 [NDLR : alors que les prix du vrac sont nettement remontés durant la période]. Se poserait alors la question de la juste répartition du revenu, traitée par la loi Egalim. Et des accords interprofessionnels, en préparation, qui doivent fixer des indicateurs de prix toujours suspendus au risque d’être considérés comme anti-concurrentiels.