Qu’attendiez-vous donc, que l’INAO traite les vins nature ? » plaisante avec esprit un représentant du vignoble, ayant participé au comité national des AOC vins du 15 février. Emmanuel Cazes est pour sa part d’humeur moins badine, le vigneron du Roussillon ayant été le rapporteur pendant deux ans de la réflexion sur une définition du vin nature. « C’est un enterrement de grande classe, le dossier est rangé dans les cartons de l’INAO… Le monde des vins, surtout AOC pour ne pas dire la CNAOC*, ne veut pas entendre parler d’une mention transversale, qui pourrait avoir un statut plus élevé. Ils ne peuvent déjà pas supporter la mention agriculture biologique » regrette-t-il.
Demandée par la Commission National de l’Agriculture Biologique, la réflexion sur la définition des vins natures a donné lieu à une commission intégrant des membres des comités AOP et IGP. Son objectif étant de donner un cadre à une mention toujours plus à la mode, afin d’en garantir les pratiques pour les consommateurs. Alors que les adeptes du vin nature souhaitent justement sortir des sentiers battus, Emmanuel Cazes souligne leur besoin de réglementation et de structuration.


« Réglementairement, le mot nature ne peut pas être utilisé pour le vin. Selon le codex agroalimentaire, ne peuvent prétendre à ce terme que les aliments bruts, qui ont été à la limite tranchés ou râpés. Mais pas fermentés ou conditionnés… » souligne le rapporteur. Son rapport ne propose pas de réglementer un « vin nature », mais de définir une « vinification sans intrants ». Soit des pratiques œnologiques minimalistes, réalisées sur un moût issu de raisins certifiés bio.
« Malheureusement, la vieille garde manque de clairvoyance en voulant garder son pré carré. Je compte maintenant sur la filière nature pour se mobiliser et réagir face à cette ineptie. On ne peut plus contenir l’engouement pour ces vins, l’INAO sera obligé d’y revenir et constater les usages. C’est son rôle » annonce Emmanuel Cazes, soulignant que le même débat a lieu en Italie. « Si elle ne vient pas de France, la solution pourrait arriver d’ailleurs… » esquisse-t-il.
* : Soit la Confédération Nationale des Producteurs de Vins et Eaux-de-vie de Vin à AOC.