Sortez de votre tête que vous vendez du vin ! Le produit ne représente qu’un tiers de votre prix de vente, l’emballage et les frais de commercialisation comptant pour le reste » attaque Benjamin Devaux, animateur du marché vin pour Cerfrance Midi Méditerranée, lors d’une conférence Sitevi ce 29 novembre. Ne faisant pas dans la poésie, l’expert-comptable appelle les vignerons à analyser sans états d’âme leurs performances commerciales pour les optimiser. Pour l’expert, le marketing est une approche du client, et non plus du produit, qui demande une approche spécifique. Avec cette optique de gammes adaptées aux clients, la confrontation entre prix plancher (approche comptable par les prix de revient et marges) et prix stratégique (positionnement de la concurrence et tendances du marché) doit conduire à une rationalisation.
Mais d’abord, il faut savoir si l’on gagne ou perd de l’argent sur une cuvée. Ce qui nécessite connaissance fine de ses coûts de revient, ventilés entre frais de production viticole, de vinification, de conditionnement, de commercialisation et de structure. « Perdre de l’argent n’est pas un problème en soi. Par exemple s’il s’agit de fluidifier de la trésorerie ou de gagner des clients par l’entrée de gamme pour valoriser les autres cuvées. Mais il ne faut pas faire dans la surqualité » prévient Benjamin Devaux, conseillant souvent d’augmenter les rendements ou remplacer un élevage en barrique par des copeaux pour préserver la qualité tout en gagnant plus.
Face à un marché aussi mondialisé que pluriel, l’enjeu pour les domaines est de mener une analyse stratégique claire pour faire la synthèse entre les opportunités extérieures de marché et les forces internes de l’entreprise, qui font son identité. « Si vous ne parlez pas anglais mais que votre femme est polonaise, n’allez pas sur le marché américain parce que tout le monde y va et que vous avez une ouverture en Pologne » illustre Benjamin Devaux.
Pour l’expert, les vignerons doivent rester ouverts aux opportunités tout en privilégiant leurs axes de développement stratégiques. Il s’agit par exemple pour un petit domaine ciblant des cavistes de se rendre disponible pour animer les lieux de vente, ou pour une structure coopérative qui vise les Cafés Hôtels Restaurants de promouvoir leurs vins au verre en proposant des kits de dégustation et des verres sérigraphiés à ses grands comptes. Et pour développer l’accueil de groupes, « il faut d’abord savoir les accueillir. Des consommateurs qui ont fait 200 kilomètres de bus vont d’abord demander des toilettes avant des salles de dégustation » conclut tout en pragmatisme Benjamin Devaux.