'interprofession a sollicité les conseils de Jérémy Arnaud, de la société Terroir Manager, pour l'aider à avancer dans sa réflexion sur la stratégie marketing à adopter pour le vignoble. Un audit a été conduit, dont les résultats ont été présentés lors de l'AG du 15 février 2017.
Trois positionnements pour les vins du Beaujolais sont préconisés, en fonction des vins, des moments, et des lieux de consommation. Le premier « univers » correspond à une consommation de type « hédoniste ». Dans celui-ci, le vin est perçu comme « boisson » et « le consommateur décide lui-même, a une grande liberté ». Le plus souvent elle a lieu à domicile et correspond à un moment festif, de « pur plaisir ». C'est dans cet univers que se trouve le marché « de masse », auquel répond un marketing de la demande, pour « coller aux desirata des consommateurs ». Dans cet univers, les codes sont simples : l'alcool, le cépage, la couleur du vin, etc.


A l'opposé se trouve l'univers du « romantisme », qui s'oriente vers le vin perçu comme produit culturel. « Le consommateur va vouloir savoir, connaître le produit, par son imaginaire, ce qu'il révèle de plus profond ». La façon de consommer est plus « sophistiquée ». Cet univers équivaut à un marché de niche où les codes « traditionnels », tels que la durée d'élevage ou l'âge des vignes, sont présents.
Le troisième univers, appelé « mixte », est l'intermédiaire entre les deux premiers. « C'est un mélange d'hédonisme, mais avec des codes terroirs. On peut parler de vins de soif de terroir », explique Jérémy Arnaud. Les lieux de consommation de ces vins peuvent être les caves à manger, les bars à vins, les brasseries relookées, ou encore la bistronomie...En résumé, ce qu'on appelle la restauration « tendance », des lieux où l'on pourra trouver « des produits de qualité à prix accessibles », où l'on retrouve « ce qui se fait à la maison, dans une ambiance conviviale» . Dans cet univers, le vin est perçu comme authentique. Par comparaison à l'hédoniste, il nécessite une prescription plus importante, où le récit de vigneron, son savoir-faire, sa passion, doivent être valorisés.
Le consultant préconise un changement de positionnement pour le « socle Beaujolais », contenant les vins non primeurs, avec les crus comme « locomotive ». Actuellement positionnés dans l'univers hédoniste, ils doivent investir cet univers «mixte», qu'il considère comme « stratégique ». D'abord parce que le profil des vins corrrespond, s'accordant avec toutes les cuisines. Ensuite parce qu'ils représentent l'offre majoritaire dans le vignoble, avec un volume d'environ 390000 hl. Et enfin parce que ce circuit de la restauration tendance représente un fort potentiel de développement et qu'aucun vignoble ne s'est encore véritablement positionné dessus. « Il représente un enjeu extraordinaire et vous avez toute la légitimité pour prendre le leadership sur ce circuit. Mais il faut faire vite et le développer de façon proactive » a t'il expliqué. Un développement qui passerait également par une diversification de l'offre avec des rosés, des bulles et des blancs.
Quant aux Beaujolais nouveaux, qui représentent 200000 hl environ, actuellement positionnés dans l'univers hédoniste, Jérémy Arnaud conseille une simple «consolidation» en le « réactivant ». L'idée a été émise de repositionner l'événement festif des Beaujolais nouveaux du mois de novembre en l'élargissant le temps d'une journée aux autres Beaujolais, donc dans un « contexte complet ». « La mode est passée mais l'événement reste. Il faut capitaliser dessus, une fois dans l'année, mettre un coup de phare sur le territoire du Beaujolais, et pas que sur le nouveau », a confirmé Dominique Piron, président de l'interprofession.
L'univers romantisme reste quant à lui à « construire », avec, à plus long terme, une offre « haut-de-gamme » composée des Beaujolais « d'exception », mais qui reste actuellement insuffisamment alimentée. « Ce circuit nécessitera des coûts de « mise en scène » du vin, et prendra du temps à investir ».