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Prix discount pour les vins de Bordeaux, du vrac aux grands crus, "c’est l’hécatombe"
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Ça ne passe pas, mais ça casse
Prix discount pour les vins de Bordeaux, du vrac aux grands crus, "c’est l’hécatombe"

Violente, la correction de prix par le marché des vins bordelais se poursuit, allant toujours plus bas sur les petites appellations comme les grandes propriétés classées, où l’on voit une "multiplication d’offres à prix discounts". Toute la filière girondine est soumise à rude épreuve, sans exception.
Par Alexandre Abellan Le 24 octobre 2025
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Prix discount pour les vins de Bordeaux, du vrac aux grands crus,
« La bonne nouvelle, c’est que le vin continue de se vendre. Les clients finaux réalisent des bonnes affaires, et les surstocks finiront par se résorber » espère un négociant spécialisé dans les grands crus. - crédit photo : Adobe Stock (Freeprod)
C

oup de froid sur la place de Bordeaux. Alors que le vignoble girondin rentre un millésime qui s’annonce d’anthologie (grande qualité, petite quantité), les négociants peinent à écouler les précédentes récoltes (dont les stocks gelés continuent de peser). En l’état, les statistiques du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB) consultées par Vitisphere témoignent d’une faible activité (une quarantaine de contrats pour l’AOC Bordeaux rouge du 29 septembre au 12 octobre) et d’un faible prix moyen (875 euros le tonneau). « Notre courtier m'a expliqué que les vins rouges d’appellation devaient être excellents, voire médaillés pour espérer avoir un marché entre 600 et 800 € le tonneau. Les blancs ne trouveraient preneur qu’à 600 €/tonneau, hormis du 100 % sauvignon blanc à 900 € le tonneau max » rapporte un vigneron des Côtes, glissant que « l'explication viendrait du marché par les liquidations judiciaires ». Des ventes à très bas prix défrayant la chronique, mobilisant les Jeunes Agriculteurs de Gironde pour demander à l’État d’intervenir sur les ventes à prix cassés (207 € le tonneau lors d’une récente vente, soit 23 €/hl).

« Dans nos propriétés, on ne voit passer personne du courtage » témoigne un vigneron bio de l’Entre-deux-Mers, qui a cédé des vins bio médaillés d’or à 900 € le tonneau cet été : « le vin n’a même pas été retiré. Et tout le reste est à l’arrêt » soupire-t-il, s’attendant à des chiffres affolants pour l’enquête FranceAgriMer sur les demandes d’arrachages : « beaucoup veulent arrêter et jeter l’éponge. Les enfants n’ont pas envie de venir dans cette galère. Tout est en vente et il n’y a pas d’acheteurs. Les gens sont au bout. Aujourd’hui, Bordeaux n’a plus de valeur, les vins AOC sont vendus au prix d’un vin sans indication géographique. On ne peut pas vivre avec un cours à 600-700 € le tonneau alors que nos coûts sont à 1 500 €. Pour moi c’est la fin. Ça va éliminer dur en 2026. »

Prendre sa perte

Frappant depuis des années la base du vignoble girondin, la crise touche désormais tous les pans de la filière. Même les plus grands crus classés. En témoigne l’évènement qui fait jaser la filière cet automne : la communication à ses clients par un négociant bordelais d’offres à -50 % de grands vins. De quoi susciter l’omerta sur la place de Bordeaux. « Ce n’est absolument pas le cas et nous récusons ces informations. Merci de ne plus m’importuner avec ces sujets » ferme le négociant contacté. « Je n’ai pas d’avis : chacun libre de ses politiques commerciales » tranche un autre négociant visiblement gêné par un sujet inhabituel. « C’est une hécatombe » grince un connaisseur de la place. Dans les propriétés, ça jase plus facilement : « le propriétaire de ce négoce est tout à fait capable de vouloir prendre dès à présent sa perte et passer à la prochaine étape. C’est l’apanage d’un tel outsider de prendre une mesure courageuse comme celle-là, il en a les moyens, puisque très diversifiés. Ce n est pas, hélas, le cas des autres négociants, désormais pris dans la nasse des achats en primeur » analyse un propriétaire médocain.

Multiplication d’offres à prix discounts 

« Les grands crus classés et assimilés doivent comprendre que le négoce est son bras armé, tout en restant des entités indépendantes » explique un metteur en marché, pointant que « nous sommes en contact direct avec les marchés du monde entier, et ce que nous observons aujourd’hui est une phase de correction structurelle massive et violente, non pas liée aux primeurs, mais amorcée dès août 2022, après la folie post-Covid » qui a également touché les biens du luxe. Depuis lors, les vents contraires s’accumulent (tensions géopolitiques, réduction du pouvoir d’achat, taux de change défavorables…), avec pour résultat qu’« une partie des négociants, déjà fragilisés financièrement, se retrouve surstockés, car ils avaient acheté trop de vins pour ne pas déplaire aux propriétés. Ils sont donc contraints aujourd’hui de déstocker à prix réduits. C’est un fait de marché, que l’on constate quotidiennement avec une multiplication d’offres à prix discounts » reconnait l’expert, qui veut voir le verre à moitié plein : « la bonne nouvelle, c’est que le vin continue de se vendre. Les clients finaux réalisent des bonnes affaires, et les surstocks finiront par se résorber. » Mais au prix de correction des prix qui vont peser sur toute la filière bordelaise, y compris la production. « Les châteaux devront se concentrer sur l’essentiel » annonce ce négociant, ce qui passe par « produire aussi bon, avec moins de dépenses, dans un esprit de frugalité et d’efficacité… Ce qui n’est pas gagné. C’est à ce prix que la confiance et l’intérêt des clients reviendront durablement. »

Ça continue à déstocker

« C’est un marché de confiance qui était habitué au surstock » pointe un connaisseur de la place de Bordeaux », pour qui « tout s’enraie dans les achats à partir du moment où les prix des primeurs ne tiennent pas et que l’on peut craindre qu’un négoce fasse faillite avant livraison. La perte de confiance nourrit la frilosité à tous les niveaux. » Alors que la dernière campagne des primeurs a marqué l’échec d’une réduction des prix pour inciter aux achats, les grands crus continuent de perdre de la valeur sur les millésimes récents confirme Romain Grudzinski, responsable des marchés européens pour la plateforme Liv-Ex, soulignant que « ça continue à déstocker sur les millésimes récents (le marché commence à se stabiliser à partir de 2018). Il y a tellement de quantité invendue en primeur que les montants pèsent trop lourd sur le bilan comptable, cela devient un problème. Du coup les marchands vendent en-dessous de leurs prix d'achat. Généralement, les 2021 se vendent à -40% de leurs prix de sortie internationaux et nous voyons clairement que les 2022 prennent la même direction. » Une correction des prix qui peut relancer la demande d’après les statistiques de Liv-Ex, qui note sur ses indices bordelais une stabilisation de la valeur, par exemple l'indice des 5 premiers crus classés de la rive gauche sur 10 millésimes physiques (le Liv-Ex 50) est positif après trois années consécutives de déclin. Ainsi qu'une amélioration du ratio ordre d'achat/ordre de vente ferme : « en juillet, nous étions à 0,32 (pour 1€ d'offre il y avait 0,32 cts d'ordres d'achats) et en octobre nous sommes a 0,6. Il y a une grosse progression dans le bon sens. »

« On espère être arrivé au niveau bas… Ce sera difficile d’aller plus bas, surtout pour les propriétés » pointe un courtier, qui espère que les négociants ne vont pas se lancer dans une course à la braderie, alors qu’il y a déjà de « fortes baisses, anormales » pour les grands crus selon lui. Les propriétés plus modestes ont moins de latitude, et de réserves : « ce qui est certain c'est que nous ne pouvons pas garder éternellement les vins dans nos chais, car ils finissent par se dégrader et sont susceptibles de devenir non marchands et il est nécessaire de trouver des ressources pour faire de la trésorerie » pointe le vigneron des Côtes précité, soulignant que « la bienveillance de la MSA semble terminée concernant les retards de cotisations ».

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Tous les commentaires (3)
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fred Le 24 octobre 2025 à 15:40:40
boucherie en vue.. et on peut dire que seulement la moitié de la purge à été faite..
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Raffard jean Philippe Le 24 octobre 2025 à 15:21:13
Tout cela est bien désolant. Qu'on me permette de citer un canal de distribution rarement évoqué: les destockeurs
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augustin Le 24 octobre 2025 à 13:19:28
encore faut il faire la distinction entre la dépréciation des cours du vin stocké en propriété pour l entrée et le milieu de gamme et par le négoce pour le haut de gamme .En clair et pour le moment les grands crus classes sortent leur epingle du jeu mais si cela continue ils seront les prochains concernés,
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