éroraison du plus fort ? Car à entendre le discounteur, c’est lui le gros, soutien des filières en volume, mais ce n’est pas lui le petit : du moins le plus petit prix, affirmant ne pas descendre en dessous de 1,99 € la bouteille en promo. Se voyant bon élève en la matière, l’acheteur vin de l’enseigne illustrait sa volonté en déclarant à Vitisphere qu’« un produit à 1,99 €, un bordeaux ou un côtes-du-rhône, pour moi c’est encore rémunérateur, on respecte le viticulteur ». Un vrai carton (de vin) rouge. Face aux gueulantes du Rhône et aux soufflantes de Bordeaux, où des actions syndicales ont ciblé des magasins ce 18 juin, Aldi remet les choses dans une perspective aussi concurrentielle que fataliste. Aux demandes de modeste réévaluation, la direction des achats du hard-discount répond que « passer à 2,5 € c’est être plus cher que tous les concurrents. Les clients se détourneront de nous », alors que « malheureusement, il y a plein de caves et de négociants qui ont leurs caves pleines et s’ils n’arrivent pas à vendre d’ici les prochaines vendanges, ils auront des difficultés majeures (ils en ont déjà). »
Mais alors ces petits prix du vin qui n’en finissent pas de se banaliser et de fausser la valeur du travail de la filière, la faute à qui ? La question reste posée… Certains jugent que la notion de coût de production du vin n’est tout simplement pas perçue par les clients, qu’il s’agisse des acheteurs de la GD ou des consommateurs finaux qui ne veulent pas voir ce que signifient de tels prix pour les producteurs et intermédiaires. D’autres s’agacent des promesses gouvernementales non-tenues sur la révision rapide de la réglementation permettant de créer un tunnel de prix entre l’amont et l’aval (via Egalim). D’aucuns critiquent la filière vin pour ne pas avoir anticipé la chute de la consommation, ne pas avoir réussi dans la conquête de nouveaux marchés et ne pas avoir su contrôler son potentiel de production.
Dans tous les cas, chacun à une bonne raison/excuse pour vendre/acheter à bas prix. Il n’en reste qu’un constat communément partagé : ça ne peut plus durer et le coût se révèle fatal pour la chaîne de valeur des vins de France entraînée dans cette spirale de petits prix. De quoi créer un sursaut coupant dans la parlotte et poussant vers l’effort ? « La justice sans la force est impuissante : la force sans la justice est tyrannique. La justice sans force est contredite, parce qu’il y a toujours des méchants » écrivait Blaise Pascal, pour qui « il faut donc mettre ensemble la justice et la force ; et pour cela faire que ce qui est juste soit fort, et que ce qui est fort soit juste. » Ce serait alors un autre duo à sketch... Bouteille et hardi ?