on sang n’a fait qu’un tour en entendant la présidente de la Commission Européenne, Ursula von der Leyen, indiquer que « l’Europe est prête à négocier avec les États-Unis [face aux taxes Trump de 20 % en place dès ce 9 avril]. Nous avons proposé des droits de douane nuls pour les produits industriels. Parce que nous sommes toujours prêts à faire une bonne affaire. » Pour Jean-Marie Fabre, le président des Vignerons Indépendants, c’est un nouveau signe de la vision de Bruxelles de ses secteurs stratégiques : l’industrie toute seule devant, les autres derrière. Ce qui expose aux revirements américains toute une filière moins défendue, alors la Maison-Blanche montre sa capacité à de forts et brutaux revirements (en annonçant ce 9 avril la réduction de 10 % pour 90 jours des taxes tout juste instaurées).
Si Bruxelles a retiré les whiskies, bourbons et vins de la liste des produits américains ciblés en rétorsion par des droits de douane sur l'acier et l'aluminium* (ce qui avait causé la menace des 200 % de droits punitifs sur les vins et spiritueux français), Jean-Marie Fabre regrette que le logiciel européen n’ait pas été suffisamment actualisé : « c’est la même posture qu’en 2019-2020 quand nous avions été victimes de taxes Trump et que la Commission ne s’en était pas émue et n’était pas intervenue. Dans un moment de bras de fer compliqué, la Commission réagit en proposant une amélioration pour un secteur et en laissant les autres de côté. Il faut embarquer tous les secteurs clés. Les vins et spiritueux en font partie et demandent zéro pour zéro » dans les droits de douane.
Chat échaudé
Se sentant une nouvelle fois considérée comme quantité négligeable par Bruxelles, la filière vin demande à avoir la même attention que les autres activités économiques européennes. « Aujourd’hui, on ne peut pas avoir secteur sacrifié ou considéré différemment des autres » plaide Jean-Marie Fabre, pour qui « minimiser la filière vin en priorisant les actions politiques sur d’autres secteurs dits industriels est une provocation ». En somme, « face aux taxes Trump, l’Europe ne doit pas minimiser l’importance du vin en priorisant les secteurs industriels ». Concrètement, le vigneron de Fitou (Aude) demande à la Commission d’avancer enfin sur la demande de création d’un guichet unique pour la déclaration des droits d’accises pour la vente de vin aux particuliers sur le marché communautaire. Et « s’il y a des répercussions économiques sur le secteur, il faudra gérer la crise avec des outils et des financements. Il faudra débloquer la réserve de crise, ce qui nous avait été refusé pendant la crise covid » rappelle Jean-Marie Fabre.
* : Interrogée ce mardi 8 avril à l'Assemblée nationale, la ministre de l'Agriculture, Annie Genevard, indique qu'« il faut veiller, au moment de choisir les produits américains qui seront taxés, de ne pas entrer dans une forme d’escalade. Le bourbon est un bon exemple et je me réjouis, de ce point de vue, de son exclusion du premier train de contre-mesures ». Ajoutant que
« l’agriculture ne doit pas être la variable d’ajustement de la riposte douanière ».