n mars 2020, lors du premier confinement, Champagne EPC se retrouva empêchée de prospecter, six mois à peine après sa création. Mais la jeune pousse n’allait pas rester les bras croisés. Fondée en septembre 2019 par Jérôme Queige, Camille Jullien et Édouard Roy, elle a d’abord défini sa cible. « Nous nous sommes dit que le CHR mettrait du temps à redémarrer, relate Édouard Roy. Les cavistes, toujours ouverts, étaient très courtisés par les grandes marques. Nous avons donc choisi de nous concentrer sur les entreprises. »
Cette décision prise, EPC a décroché son téléphone. Mauvaise pioche. « Quand on démarchait une entreprise, on se faisait balader de service en service, témoigne le cofondateur. Dans certaines entreprises, c’est le responsable marketing qui achète le champagne, dans d’autres, c’est le service commercial ou encore la direction générale. »
Alors la start-up a changé d’approche. « Nous avons récupéré les noms de responsables d’entreprises et leur adresse e-mail via Dropcontact et nous leur avons envoyé un e-mail personnalisé. Le taux de conversion a été de 1,5 %, ce qui nous a permis de commencer à vendre pendant le Covid. »
Les dirigeants d’EPC ont ensuite misé sur la data (données numériques) en créant leur propre logiciel, baptisé Dave (Digitalisation Avancée de la Vente et de l’Expérience). « Grâce à Dave, nous avons par exemple constaté que les promoteurs immobiliers commandent en moyenne deux à trois fois par an, rapporte Édouard Roy, un mois avant la date de la livraison de leur programme – qui est connue –, qu’ils choisissent des bouteilles en coffret cadeau et qu’ils disposent d’un budget intéressant. Quand on dispose de ces données avant de démarcher un promoteur, on gagne en efficacité. »
L’étude de ces données leur a aussi permis de casser certains préjugés. « On peut penser que les cavistes parisiens sont les meilleurs clients. Or, ce n’est pas le cas : l’analyse des données montre que leur acquisition coûte cher et qu’ils ne sont pas toujours fidèles. »
Selon Édouard Roy, il est essentiel de bien connaître ses clients, « qui sont volatils et très dragués ». Il demande par exemple la date de naissance de ses contacts, afin de leur envoyer un message le jour de leur anniversaire. « Ce sont des petits détails qui entretiennent le lien et font la différence, constate-t-il. Ces messages sont générés automatiquement mais nous les validons avant de les envoyer, au cas, par exemple, où nous serions en froid avec un contact. Il faut garder le contrôle sur les machines. »
Au fur et à mesure, EPC a développé pour Dave de nouveaux modules, destinés à gérer les ventes, la logistique, les règlements, les impayés, les commerciaux, etc. Devenu central pour l’entreprise, l’outil a permis de réduire de 21 à 5 minutes le temps nécessaire à une prise de commande, tout en améliorant l’approche des clients.
La jeune marque s’approvisionne principalement auprès de neuf coopératives champenoises, avec un cahier des charges précis. Elle commercialisait 250 000 bouteilles en 2022, et ne communique plus à propos de ses ventes depuis. Tout en annonçant une croissance à deux chiffres pour 2024. Un résultat auquel l’IA a assurément contribué.
Édouard Roy, cofondateur de Champagne EPC« Je conseille à tous les vignerons de s’intéresser à la data et de choisir un bon logiciel. On peut commencer par un logiciel d’automatisation de la facturation et des relances, comme Sellsy, pour environ 50 €/mois. C’est un investissement. Mais c’est comme pour l’achat d’un enjambeur de haute qualité. Cela fait mal au début, puis on gagne vite du temps. Dans la data, la rentabilité se fait dans les six mois. Et même en trois jours, si on s’y met vraiment ! »