C'est votre frère qui vinifie ? Non, c’est moi » : ainsi doit s’affirmer régulièrement Marine Charavin, au domaine des Coteaux de Travers (Rasteau, Vaucluse). Et pourtant cette docteure en chimie organique de 27 ans a aussi été formée par sa famille. Elle est même née à Rasteau, le village où sa tante Corinne Couturier s’est distinguée comme une des premières "stars" du vignoble dans les années 1080. « Je n’aurais pas aimé être à l’époque de Corinne » conclut-elle, consciente de l’amélioration, due en partie au nombre de femmes actives et aux associations.
Créée en 2009, l’association Femmes de vin https://femmes-de-vin.com regroupe aujourd’hui dix associations régionales, qui ont chacune leur spécificité et leurs statuts. Le 3 mars, c’était la première fois qu’elles organisaient une dégustation professionnelle à si grande échelle : 71 femmes représentant 71 domaines ont fait déguster leurs cuvées à 300 sommeliers, restaurateurs, cavistes , agents et journalistes à l’Espace Commines (Paris 11è). : Les Dames de Cœur de Loire, Les diVINes d’Alsace, Elles & Beaujolais, Les Aliénor du vin de Bordeaux, Femmes et Vins de Bourgogne, Les Fa’bulleuses de Champagne, Eléonores de Provence, Femmes Vignes Rhône, SO Femme & Vin, Les Vinifilles. Une réussite pour les organisatrices, une grande satisfaction pour les dernières recrues qui ont été ainsi mises « dans le bain » en toute confiance. Connues ou pas, toutes ont été occupées au long de la journée. Plusieurs avaient déjà des retours spontanés de clients potentiels deux jours après le salon.
On trouve des profils très variés parmi les membres des associations, mais on constate que la plupart de ces femmes ont de solides formations et beaucoup ont eu des expériences en dehors du vin. Maroussia Tatin à Quincy (Cher) est ingénieure agronome, Mélanie Pfister à Dahlenheim (Bas-Rhin) aussi, mais également œnologue. Céline Stentz (Wettolsheim, Haut-Rhin) a fait une école de commerce. Françoise Antech (Limoux, Aude) aussi mais surtout elle a travaillé chez L'Oréal. Pour Nathalie Bour (Domaine de Grangeneuve, Drôme) le passage par de grandes entreprises en marketing a aussi contribué à son assurance et sa compétence comme chef d’entreprise. Dans le luxe et la beauté, les femmes ne sont pas minoritaires. Pour Gisèle Bordenave (Monein, Pyrénées atlantiques), le diplôme d’œnologue a aidé, mais aussi le système associatif, à commencer par la Route des vins de Jurançon, avec Bénédict Le Bec, une femme œnologue-conseil et des personnalités locales comme Anne-Marie Barrère et Yvonne Hegoburu qui ont ouvert la voie.


Aurélie Bertin, du château Ste Roseline, présidente des Femmes de vin rappelle que l’association représente 238 domaines et 1 300 salariés, 5700 hectares et 37 millions de bouteilles. Sa préoccupation principale est la transmission et l’éducation des futures générations : « Notre réseau d’entraide est fort, nous faisons la promotion de nos métiers pour susciter des vocations. Les 20-40 ans boivent moins de vin, nous faisons passer la culture et la convivialité, l’ADN de la France ».