nnoncée, la dévindustrialisation de la France est en cours. Alors que les arrachages, aidés ou non, et que les cycles de procédures collectives, mises en sauvegarde ou redressements, continuent de marquer la vie des entreprise de la filière vin, ce sont désormais les plans sociaux qui viennent défrayer la chronique viticole. Passant jusqu’à présent à l’arrière-plan social, les licenciements économiques étaient pourtant perceptibles à bas bruit dans les petites entreprises où un salarié était remercié plus ou moins correctement, où un départ à la retraite n’était pas remplacé, où des intérimaires n’étaient plus appelés… Une forme de mise en friche de l'emploi viticole par effet domino. Ce qui ne s’entend pas, mais se voit sur des territoires ruraux où arrachage rime avec chômage.
Brutaux pour tous les salariés concernés, les licenciements économiques sont désormais parfaitement visibles sur les radars de la filière vin, alors que les réductions de la commercialisation et du potentiel de production se font directement sentir sur l’outil industriel de conditionnement et de logistique. Négoces comme caves coopératives, des opérateurs de poids lancent des Plans de Sauvegarde de l’Emploi (PSE) pour leurs outils industriels devenus surdimensionnés : combien de chaînes habituées aux deux-huit et au travail le week-end tournent à une seule équipe réduite en semaine ? Recherchant de nouvelles rentabilités, les sites de mise en bouteille veulent faire correspondre leur coût de revient à leur outil de production.
Cette quête du point zéro conduit actuellement à des licenciements, mais finira par se heurter à la réalité d'arriver à faire tourner ses machines sans perdre d’argent : mais si ces dernières restent surdimensionnées, elles continueront de coûter plus que de rapporter… Le dilemme est similaire à celui de l’arrachage pour un domaine ne voulant plus vendre à perte. Entre concentration des outils industriels et augmentation de la prestation de mise en bouteille, les stratégies industrielles de la filière vin auront toujours le même effet sur le tissu local : laisser de plus en plus de salariés sur le carreau. Les fournisseurs de matériel et les consultants de la filière voient également leurs modèles économiques se fragiliser. L'activité du vin animant des territoires, sa décroissance va également toucher le boulanger et la supérette du coin. Si les difficultés viticoles s’éternisent, elles causent désormais un licenciement à prise rapide. L'ouverture du salon de l'Agriculture ce samedi 22 février permettra-t-il aux politiques de dépasser les constats partagés pour se projeter sur une sortie de crise ?
"Je sais ce que la terre engloutit d'espérances,
Et, pour y recueillir, ce qu'il y faut semer" écrivait Alfred de Musset dans son poème Lettre à M. de Lamartine (1836).