e 11 février, « le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a rendu son ordonnance et suspendu la décision de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) de retirer l'autorisation de mise sur le marché de Pledge/Rami » à annonce le fournisseur Philagro France (propriété de Sumitomo Chemical Company), précisant que « cette suspension permet de maintenir le produit sur le marché jusqu’au jugement sur le fond » par le tribunal administratif. Ce qui devrait prendre plus d’un an prévient la firme phyto, obtenant un sursis pour son herbicide de prélevée très utilisé en viticulture (130 000 ha d’après les estimations de Philagro) et arboriculture (pommiers et poiriers).
Actée ce 6 décembre 2024, la décision de l’ANSES de ne pas renouveler l’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) de Pledge/Rami est assortie d’un délai d’écoulement des stocks : jusqu’au 6 juin 2025 pour la vente et la distribution et jusqu’au 6 juin 2026 pour l’application sur les parcelles. Encore récemment sollicités par leurs fournisseurs pour stocker cet herbicide tant qu’il était commercialisable, des vignerons et pépiniéristes viticoles n’ont eu de cesse d’alerter sur les conséquences du retrait de Pledge/Rami. Une impasse qui est remontée jusqu’aux questions parlementaires au gouvernement.
Pas d’interdiction sans explication, à défaut de solution ?
Ce même 11 février au Sénat, la ministre de l'Agriculture, Annie Genevard, était interpelée sur le retrait d’AMM de l’herbicide de prélevée. Rappelant que son « approbation, assortie d'un certain nombre de réserves, a été renouvelée par la Commission européenne en 2022 pour quinze ans », la ministre note que « l'Anses, dans ses conclusions, a souligné l'impossibilité d'exclure un risque inacceptable pour les eaux souterraines, les mammifères, les organismes aquatiques et les plantes non-cibles* ».
Mais « une telle interdiction est contraire à l'engagement du Gouvernement : pas d'interdiction sans solution » pose la question orale du sénateur Christian Klinger (Haut-Rhin, les Républicains). Le viticulteur alsacien pointant que « cette interdiction créerait une distorsion de concurrence avec nos voisins européens, comme l'Espagne, la Grèce, l'Italie et le Portugal, qui continuent d'autoriser l'utilisation du Pledge. Même l'Allemagne, réticente à l'origine, a finalement décidé d'autoriser le produit. »


Précisant être « régulièrement sollicitée lorsque de telles impasses techniques surviennent », Annie Genevard reconnaît que « la Grèce, en tant qu'État membre rapporteur, a délivré l'autorisation pour les autres pays de l'Union européenne. La Commission européenne, qui a été alertée sur ce sujet, n'a pas pris position. Ce n'est pas une issue satisfaisante. » La ministre annonce en réaction qu’« une note des autorités françaises est sur le point d'être envoyée à Bruxelles sur ce sujet. C'est, à mon avis, la meilleure façon de répondre aux écarts existants entre les États membres » pour harmoniser les pratiques. Sachant que « plusieurs substances actives peuvent être utilisées pour désherber les couverts végétaux, bien qu'elles soient également menacées à terme » reconnait la ministre.
« Le monde viticole et arboricole compte sur vous pour prolonger l'autorisation du Pledge dans les mêmes délais que chez nos voisins européens » maintient le sénateur Christian Klinger, estimant qu’avec « une agence européenne qui a rendu un avis positif sur la toxicologie de la molécule, [….] normalement, il ne devrait plus y avoir d'obstacle à la commercialisation et à la production de cette substance. » C’est l’issue que compte obtenir Philagro par ses propres moyens, la firme précisant être « engagée et déterminée à travailler avec l'ANSES à la réussite du renouvellement de l’AMM du produit ».
* : Dans un communiqué, Shinsuke Shojima, le président de Philagro France, déclare que « chaque produit que nous développons doit répondre aux normes les plus élevées en matière de sécurité et de performance. En tant qu'entreprise de Recherche et Développement, nous concevons nos produits avec des exigences rigoureuses et scientifiques et un profond respect de l'utilisateur, du consommateur final et de l'environnement. »