Nous étions 200 adhérents il y a dix ans, nous sommes maintenant 425, se félicite Alexis Leconte, viticulteur et président de l’association du ratafia champenois, du marc et de la fine champenoise. Cela traduit un vrai engouement pour le ratafia, y compris à l’export. Le ratafia est un vrai produit de gastronomie qui ouvre des voies vers la mixologie. Pour l’instant, nos actions de communication se font en Champagne car nous voulons être prophètes dans notre pays ! ». Environ 1 million de bouteilles sont vendues chaque année, produites par des vignerons passionnés et/ou emblématiques de la Champagne et par l’union de coops Terroirs et Vignerons de Champagne (TEVC). Pour mettre en avant ce produit qui avait autrefois l’image d’un vin bricolé dans un garage, l’association organise chaque année en janvier un événement baptisé Le Chaudron. Les membres de l’association peuvent y inviter leurs agents, des sommeliers, restaurateurs ou journalistes, autour d’un alambic et de bouteilles de ratafia et de champagne. L’ambiance, festive, témoigne du regain d’intérêt pour le ratafia.
« En 2024, nous avons produit 5 000 hl mais la moyenne est plutôt vers 7 000 hl, précise Alexis Leconte. Il y a une grande diversité de profils. Il faut un bon distillat pour mettre en valeur le moût. L’alcool est là pour sublimer et conserver l’état du moût à l’instant T. Personnellement, j’utilise de la fine champenoise ». Alexis Leconte commercialise 1 500 bouteilles de ratafia par an, ainsi que 75 000 bouteilles de champagne. Lorsqu’il participe à un salon destiné aux particuliers, il remarque que le ratafia permet de nouer plus facilement le contact avec les jeunes non-initiés qu’avec le champagne. « Il y a moins de code avec le ratafia, ce qui met les jeunes plus à l’aise, décrit-il. La sucrosité du ratafia leur plaît bien. Je leur fais déguster un ratafia, et ensuite, ils acceptent de goûter un champagne ! ». Sa clientèle consomme principalement le ratafia avec des fromages et des desserts. La fine champenoise a été un atout pour l’export et lui a ouvert les portes de l’Asie. Il a pu ensuite y vendre ses champagnes.


Emmanuel Chopin, le trésorier de l’association, est l’un des pionniers du ratafia champenois. Cet alcool représente 15 % de ses ventes totales (55 000 bouteilles), avec pour cible les restaurateurs et les particuliers. « Nos clients ont parfois des réticences mais dès qu’ils dégustent du ratafia, ils en apprécient le côté fruité et doux, témoigne Emmanuel Chopin. Nous organisons trois soirées cocktail par an, dans lesquelles nous proposons un negroni revisité avec du ratafia, du gin et du campari maison. Il plaît beaucoup aux jeunes. Nous élaborons également un mojito dans lequel le rhum est remplacé par du ratafia, le perrier par du champagne, avec un peu de sucre de canne et de citron. Le cocktail a le vent en poupe, c’est porteur pour le ratafia ».
Cédric Moussé est également adhérent de l’association. Il commercialise 5 000 bouteilles de ratafia de 50 cl par an, et 100 000 bouteilles de champagne. « Je travaille beaucoup avec les bars à cigares, car l’alliance avec le ratafia est vraiment réussie, précise-t-il. Le ratafia peut aussi être dégusté avec un plateau de fromages, et bien-sûr en apéritif ou en digestif ».
Loïc Barras, sommelier au Château de Sacy dans la Marne, offre du ratafia en digestif pour le faire connaitre : « les clients apprécient, il y a eu un gros travail de réalisé depuis dix ans sur ce produit ». De fait, la publication d’un cahier des charges pour le ratafia, la fine et le marc champenois, en 2015, a permis de poser les bases du renouveau pour ce spiritueux.
L’association est parrainée par Arnaud Lallement, chef triplement étoilé de l’Assiette Champenoise à Tinqueux près de Reims. Sa carte comprend une vingtaine de ratafia. Un ambassadeur de prestige pour cet alcool dont l’image est passée en deux décennies d’une liqueur « de garage » à un alcool branché !