Revue de presse : Ratafia, cartagène et autres esprits du vin

’enseigne Lidl use du vin pour ancrer sa nouvelle stratégie commerciale. Alain Juppé s’avère le meilleur ambassadeur de Bordeaux. L’Inao reconnaît le ratafia de Champagne.  

Mariage de la carpe et du lapin

Il se passe enfin quelque chose dans les Foires aux vins, rite sacrificiel franco-français de la rentrée. Lild, l’enseigne allemande du discount, « s’essaie à la vente de grands crus classés », annonce Vitisphere. Lidl ménage ses effets. Les huits grands crus classés « ne seront pas directement disponibles en magasin, les bouteilles devront d'abord être réservées sur un site dédié (opérationnel ce 2 septembre, avec l'ouverture de la foire aux vins Lidl), avant d'être retirés dans une enseigne physique ». On comprend assez bien qu’il s’agit pour Lidl d’un repositionnement stratégique : « Passer du statut de hardiscounter à celui de smartdiscounter » en « attirant, via des produits d’exception, des consommateurs avertis pour leur faire découvrir notre offre de coeur de foire aux vins, qui reste sur le rapport qualité prix » . La pirouette n’échappe pas à Capital. Le magazine économique souligne : « Le distributeur mise sur le vin pour faire comprendre aux consommateurs qu’il n’est pas, ou plus, un hard discounter ». Le repositionnement stratégique serait à l’œuvre depuis 2012. Il n’est pas anodin que le vin en soit le vecteur. Mais, quel bénéfice peuvent en tirer les GCC ? France Bleu relève que « du côté des professionnels du secteur, on regarde cette nouveauté avec méfiance ». Christophe Château, directeur de la communication du comité interprofessionnel du vin de Bordeaux, y assure qu’il « sera vigilant concernant les prix ». Rayon Boisson en tire une leçon prosaïque : « Une foire d’empoigne ! Ce mardi 2 septembre, à l’ouverture des magasins Lidl, les clients étaient nombreux, tract de foires aux vins à la main, à venir faire leurs emplettes. Il faut dire qu’il valait mieux arriver tôt. Cette affluence a occasionné d’importantes ruptures ». Le vin est aussi un produit comme un autre, aspiré par la fièvre consumériste. 

Bordeaux, Juppé, et la Cité du vin

Les GCC et avec eux les vignerons de Bordeaux devront probablement davantage à l’édile de la capitale de l’Aquitaine qu’à Lidl. On apprend cette semaine dans Vitisphere qu’Alain Juppé prend au Québec « l’écharpe d’ambassadeur Educ Alcool ». « Militant pour une consommation responsable des boissons alcoolisées, l'organisme québécois », a « officiellement remis ce titre à l'occasion de la troisième fête des vins de Bordeaux à Québec, un événement à déguster et non à boire comme l'a toujours défini Alain Juppé ». Vitisphere conclut : « Pour la filière viticole française, la distinction prend inévitablement une épaisseur symbolique ». Nos cousins de la belle province nous montrent en effet le chemin de «  l'éducation, le fondement de tout ». Dans Le Point, Jacques Dupont souligne : « Hubert Sacy passe au Québec pour celui, avec son association, qui a réduit fortement la consommation excessive d'alcool par l'éducation. Le Québec est devenu en effet "la province où l'on compte le plus haut pourcentage de consommateurs d'alcool chez les 15 ans et plus, elle est celle où on constate le moins de comportements excessifs ».  On ne s’étonnera plus de rien. C’est à Bordeaux fête le vin à Québec, à peine ceint de son écharpe d’ambassadeur, que le maire de Bordeaux a annoncé un intéressant glissement sémantique de la Cité des civilisations du vin. Celle-ci, toujours selon Vitisphere s’appellera finalement tout simplement la Cité du vin. On ne peut pas faire plus simple, ni plus impérial d’ailleurs non plus : « Même rebaptisé, son objectif reste la promotion du patrimoine universel de la culture de la vigne ». Decanter cite Olivier Kollec, soon directeur marketing  : « Les enquêtes menée auprès des consomateurs montrent que l’ancien nom était trop long et trop difficile à prononcer. Nous travaillons maintenant à une nouvelle identité visuelle, avec un nouveau logo ». Moyennant une rallonge budgétaire de 14 millions d’euros, l’ouvrage devrait ouvrir ses portes au printemps prochain pour accueillir 350 000 à 500 000 visiteurs.

La renaissance du Ratafia

On remerciera la revue Decanter de saluer la reconnaissance du ratafia de Champagne par l’Inao comme Indication géographique protégée (IGP) . «  Une première », relève le magazine britannique. « La demande a été déposée par une association de distilleurs, de vignerons et des maisons de Champagne en juin 2014. Mais le ratafia existe depuis 800 ans, et quelque 120 vignerons en produisent», précise Decanter. Le ratafia de Champagne « provient du chardonnay, du pinot noir et du pinot meunier ». La Bourgogne et le Jura ont aussi leur ratafia, le Languedoc sa cartagène, produits d’une tradition familiale autant que paysanne, conservée sous le manteau comme circulaient les manuscrits des dissidents au temps du bloc soviétique. Peut-on espérer la renaissance des bouilleurs de cru ?