n serait tenté d’y voir le résultat d’intense lobbying ces derniers temps de la part des militants anti-alcool, voire même de la récente prise de position du médecin en chef américain. En réalité, l’annonce par l’Alcohol and Tobacco Tax and Trade Bureau (TTB) de l’ouverture d’une procédure de consultation en vue de rendre obligatoire l’affichage d’informations nutritionnelles, y compris les allergènes, sur les bouteilles de boissons alcoolisées correspond à un processus s’étalant sur près de vingt ans.
Une action en justiceC’est en 2007 que le TTB a publié sa première proposition de règlement sur l’étiquetage des boissons alcoolisées, qui prévoyait l’apposition d’un tableau de valeurs nutritionnelles. Ce règlement n’a jamais abouti. En 2013, le TTB a repris ses propositions sous la forme de mentions nutritionnelles volontaires, autorisant les opérateurs qui le souhaitaient à indiquer un certain nombre d’informations sur l’étiquetage. En 2021, le TTB a reçu une missive d’organismes de santé publique et d’associations de consommateurs, le sommant de finaliser le règlement sur l’affichage des valeurs nutritionnelles sur les boissons alcoolisées. Et enfin, l’administration Biden a publié en 2022 un rapport sur la concurrence, dont les conclusions rappelaient que « des propositions de règlementation qui pourraient servir les intérêts de la santé public et favoriser la concurrence en apportant des informations aux consommateurs, telles que les propositions sur l’étiquetage obligatoire des allergènes, indications nutritionnelles et ingrédients, n’ont pas été suivies d’effet ». Le TTB a donc relancé le processus, d’autant plus que l’un des organismes de santé publique les plus véhéments – le Center for Science in the Public Interest (CSPI) – a porté plainte contre le Département du Trésor américain en 2022 pour « 19 années d’inaction » sur la transparence de l’étiquetage des boissons alcoolisées.
Les allergènes également en ligne de mire
Ce 17 janvier, le TTB a donc publié deux propositions de règlement, lançant une période de consultation qui prendra fin le 17 avril 2025, sur l’affichage des informations nutritionnelles et des allergènes sur les bouteilles d’alcool. Selon le CSPI, une troisième proposition est actuellement en cours d’analyse par le Bureau de la Gestion et du Budget de la Maison Blanche. Elle prévoit la mention des ingrédients. L’ensemble de ces propositions s’inscrit, par ailleurs, dans le cadre de la révision des recommandations alimentaires aux Américains, actuellement en cours et dont la nouvelle mouture s’appliquera à la période 2025-2030.
Autant dire que les implications sont d’une grande portée. De son côté, le Wine Institute en Californie a exhorté les autorités à prendre en considération les spécificités du vin : « Pour le dire simplement, le vin n’est pas le produit d’une recette », a rappelé Robert P. Koch, PDG de l’Institut. « Contrairement à d’autres boissons, chaque millésime est différent et chaque vin évolue en fonction de l’année, du cépage, du vignoble, du climat et des conditions de culture ». Ainsi, le WI insiste sur le fait que « toute réglementation sur l’étiquetage qui n’intègre pas la souplesse requise pourrait fortement perturber les opérations des caves ». Pour faciliter la mise en conformité, l’institut demande au TTB « d’envisager des alternatives comme l’étiquetage électronique qui peut augmenter sensiblement la précision et la quantité d’informations partagées avec les consommateurs. L’Europe a adopté cette approche et nous avons vu qu’elle fonctionne ». L’organisme professionnel Wine America prône également des moyens techniques dématérialisés et insiste sur le fait que le processus sera long. En effet, si ces mentions obligatoires sont actées, le TTB prévoit une période de 5 ans à partir de la publication du règlement dans le Registre Fédéral pour que les entreprises puissent se mettre en conformité.