deux semaines de la fin de son mandat, nouvelle présidence américaine oblige, le docteur Vivek Murthy, le médecin en chef américain, a jeté un pavé dans la mare en publiant un avertissement mettant en garde le public américain contre le lien entre la consommation d’alcool – « quel qu’il soit » - et le risque de développer un cancer. Difficile de ne pas y voir un lien, aussi, avec la publication en décembre du rapport NASEM dont les conclusions sur l’impact de l’alcool sur différents cancers sont bien plus nuancées. Pour sa part, le médecin en chef américain affirme que « depuis quatre décennies, les preuves scientifiques de ce lien s’accumulent alors que moins de la moitié des Américains le reconnaissent comme un facteur de risque pour le cancer ». Ayant passé en revue de nombreuses études publiées entre 2010 et 2024, les auteurs du rapport des Académies nationales des sciences, d'ingénierie et de médecine (NASEM) ont considéré de leur côté que s’il existe un lien entre l’alcool et le cancer du sein et le cancer colorectal, les effets sont bien plus difficiles à établir pour d’autres types de cancer.
A l’image du tabac
N’en déplaise à la douzaine de chercheurs impliqués dans le rapport du NASEM, et à la dizaine de chercheurs supplémentaires ayant participé à sa relecture – dont certains connus pour leur position anti-alcool – le Dr Vivek Murthy estime que l’avertissement du « Surgeon General » sur les bouteilles de boissons alcoolisées commercialisées aux Etats-Unis doit être réactualisé pour tenir compte des risques de cancer. Comme pour les cigarettes. L’avertissement obligatoire actuel évoque le risque de malformation de l’enfant à naître pour les femmes enceintes, ainsi que l’impact de la consommation d’alcool sur sa capacité à conduire une voiture ou à opérer une machine, de même que d’éventuels problèmes de santé. Il est resté inchangé depuis 1988. Le Dr Murthy justifie cette nouvelle recommandation en affirmant que « le lien direct entre la consommation d’alcool et le risque de développer un cancer est bien établi dans le cas d’au moins sept types de cancer, dont ceux du sein, du colon-rectum, de l’œsophage, du foie, de la bouche (cavité buccale), de la gorge (pharynx) et du larynx… ».
Le bouquet final ?
Nommé par le Président américain, le Dr Vivek Murthy a exercé en tant qu’administrateur de la Santé Publique sous les présidents Barack Obama puis Joe Biden, d’où son prochain départ. De plus, seul le Congrès américain peut voter une modification des mises en garde sur les bouteilles d’alcool et il est difficile de prédire si l’administration Donald Trump y serait favorable ou pas. Plus globalement, les annonces faites par le Dr Murthy s’inscrivent dans le cadre de la révision des recommandations alimentaires des Américains, prévue pour cette année, et répondent aussi à la demande formulée par l’Organisation mondiale de la Santé pour instaurer, entre autres, des messages de mise en garde plus explicites sur les boissons alcoolisées à l’instar des dispositions applicables en Irlande dès 2026. Notons que sur les 53 Etats membres de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) au niveau européen, 13 d’entre eux ont déjà mis en place des avertissements sanitaires sur les boissons alcoolisées, dont 3 pays membres de l’Union européenne.