Cette crise viticole est terrible […] je sais les drames et questionnements qu’elle suscite » pose Arnaud Rousseau, président de la Fédération Nationale des Syndicats d'Exploitants Agricoles (FNSEA) lors d’un meeting ce vendredi 10 janvier au château Goudichaud (à Saint-Germain-du-Puch, Gironde). En campagne électorale devant une cinquantaine d’agriculteurs bordelais, le céréalier* de Seine-et-Marne note que « quand il y a un plan social chez Michelin, tout le monde hurle, chez nous ça ne fait pas de bruit » individuellement, mais cela pèse collectivement.
« À Bordeaux, quand vous êtes obligé d'arracher près de 20 000 hectares de vignes sur les quelques derniers mois et que ce sont près de 14 000 emplois qui disparaissent, c'est un plan social qui ne dit pas son nom » précise Arnaud Rousseau à la presse à l’issue de son meeting, pointant qu’« il y a déjà un plan social qui ne dit pas son nom, qui est extrêmement violent. Et le sujet, ce n'est pas simplement de constater ou de hurler. Le sujet, c'est d'essayer de trouver avec les pouvoirs publics comment on peut faire. » Revendiquant pour la FNSEA « la responsabilité sur le plan syndical de conduire la vision agricole de la France depuis des années », son président estime qu’en premier lieu « on a besoin de revenus pour les producteurs. Parce qu'on raconte ce que l'on veut, mais nos entreprises ont besoin que les producteurs gagnent leur vie à la fin de l'année. Et si ce n'est pas le cas, ça disparaît. »


Reconnaissant que le prix du vin ne se décrète pas mais se construit, le céréalier francilien se positionne en accompagnement des choix stratégiques de la filière vin. Interrogé par un viticulteur de l’Entre-deux-Mers sur les positions de la FNSEA sur la révision d’Egalim pour y inclure le vin ou la création d’Organisations de Producteur pouvant parler de prix de revient, Arnaud Rousseau se met en soutien de ce que demandera la filière. « On peut porter Egalim et l’Organisation de Producteurs auprès des pouvoirs publics s’il y a l’accord des personnes concernées pour le marché français » résume-t-il, appelant en creux la filière à se saisir des outils disponibles : « il ne faut pas compter sur une nouvelle campagne de distillation dans les prochains mois. Il faut se structurer [selon] l’intérêt général [et] il n’y a pas 50 alternatives. »


Si la rémunération de la viticulture est un point central du message syndical porté par Arnaud Rousseau (avec les mesures d’urgence pour le soutien à la trésorerie, la loi d’orientation agricole…), le président de la FNSEA appelle également au maintien des moyens de production : notamment phytos. « La FNSEA, le syndicat des pollueurs je l’entends toute la journée. Ce n’est pas un problème, parce qu’on assume de dire qu’au même motif que les Français qui sont malades se soignent, les productions qui vont affronter des insectes, des herbes… ont besoin de solutions » déploie Arnaud Rousseau, pointant que « les Français sont les premiers consommateurs d’anxiolytiques et d’antidépresseurs en Europe. Que chacun balaie devant sa porte. » Et le président de la FNSEA de conseiller à son auditoire de répondre à « quelqu’un qui vient vous chercher sur ce point » de lui demander de regarder combien de boîtes périmées il y a dans sa pharmacie, alors que « nos locaux phyto sont bien tenus, tracés et c’est une charge pour nos entreprises : ce n'est pas un plaisir d’acheter » des pesticides et « on n’est pas mariés avec les firmes. On a besoin de solutions. »
Tacles à la concurrence
S’agaçant des impasses techniques croissantes sur les matières actives (de la lutte contre le mildiou en général à l’usage du cuivre en particulier), Arnaud Rousseau évoque aussi le besoin pour le monde agricole d’accéder à la ressource en eau et en profite pour tacler le syndicat de la Confédération Paysanne : « on ne fera pas d’agriculture demain sans eau. Dans son programme, la Confédération Paysanne dit qu’il ne faut pas stocker d’eau et utiliser la ressource naturellement disponible. » Autres taquets pour la Coordination Rurale ramenée à un « happening » syndical permanent : « la colère ça ne peut pas être un projet d'avenir. Même si la colère est légitime et même si le moment est difficile. Exprimer une colère, on peut le comprendre, mais ça ne construit pas un avenir » pour Arnaud Rousseau, qui estime que « dans ces moments de grande incertitude, c'est important d'avoir des points d'appui stables, solides, de gens qui travaillent, qui essaient de construire un avenir ».
« Quand ça tremble, il faut soutenir les listes FNSEA et JA. J’ai une certitude : ici aussi nous allons l’emporter » conclut-il.
* : Au détour d’un aparté lors du meeting, Arnaud Rousseau a fustigé le « délire » médiatique sur sa présidence du conseil d’administration du groupe agroindustriel Avril en défendant une entreprise créée par et pour les agriculteurs à l’initiative de la FNSEA. « Ceux qui ont un problème entre Avril et la FNSEA doivent se soigner, c’est lié » évacue-t-il, indiquant ne pas avoir de rôle opérationnel et posséder 10 € d’actions.