ébats animés ce lundi 4 novembre à l’Assemblée Nationale pour les votes rejetant les amendements souhaitant augmenter la fiscalité sur les boissons alcoolisées en général et le vin en particulier à l’occasion du projet de loi sur la sécurité sociale pour 2025 (PLFSS). Un sujet qui mobilise, comme le fait remarquer la présidente de séance, la députée Clémence Guetté (Val-de-Marne, La France Insoumise), pointant le « nombre de demandes de prises de parole et l’importance du débat ». Défendant un amendement « assez disruptif, pour ne pas dire provocateur » avec l’extension de la cotisation sécurité sociale à tous les alcools (et plus seulement à ceux titrant plus de 18°.alc), le député Jérôme Guedj (Essonne, Parti Socialiste) « ne peut que constater de fortes disparités dans la taxation des boissons alcooliques » en illustrant que « la taxation globale – droits d’accises plus contribution de sécurité sociale – représente environ 4 centimes pour un litre de vin rouge mais s’élève à 37 centimes pour un litre de bière, soit une taxation dix fois supérieure alors que le titrage en alcool est plus faible ».


Proposant le même dispositif (inspiré par Addictions France), le député Hendrik Davi (Bouches-du-Rhône, les Écologistes) défend la même approche : « de fait, aucune raison ne motive une telle différence de traitement : un gramme d’alcool de whisky a exactement le même effet qu’un gramme d’alcool de vin rouge. » Défavorable à ces propositions, la ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq, retoque ces idées de taxes comportementales : « vous souhaitez transposer la fiscalité construite pour les boissons à haut degré à tous les autres produits. Or cela ferait baisser le prix relatif des alcools les plus forts, ce qui ne serait pas cohérent. Une taxation sur les vins et sur tous les autres types d’alcool est déjà en vigueur. Un travail de prévention, d’incitation – à boire de l’eau, bien sûr, et non par exemple des sodas – et d’éducation constitue un levier majeur pour lutter contre les problèmes liés à l’alcool. »
« Voter ces amendements serait tout à fait contreproductif » abonde le député Charles de Courson (Marne, Les Centristes), prenant à parti les députés : « pensez-vous que leur adoption modifierait le comportement des jeunes et de ceux qui souffrent d’addiction, comme le suggère l’exposé des motifs ? Nullement. En outre, la viticulture française traverse une crise. Il est donc certain que ces amendements, dont vous n’en obtiendriez pas le résultat escompté, sont inopportun dans le moment que nous traversons. »


Même opposition pour le député Aurélien Lopez-Liguori (Hérault, Rassemblement National), interpellant les porteurs de ces amendements : « votre sadisme fiscal va détruire nos terroirs et un savoir-faire transmis de génération en génération. C’est insoutenable pour nos vignerons comme pour le pouvoir d’achat des Français qui, dans leur immense majorité, ont une consommation d’alcool raisonnable et responsable. Surtout, alors que la révolte gronde dans nos campagnes, vous allez allumer la mèche ! »
« Ce débat mérite un peu plus de sérieux » réplique le député Yannick Monnet (Allier, Parti Communiste Français), qui se positionne contre ces amendements : « je peux partager l’intention de leurs auteurs, mais […] je ne pense pas qu’on réglera le problème de l’addiction en laissant nos vignerons disparaître ». Un scepticisme partagé par le député Thibault Bazin (Meurthe-et-Moselle, Droite Républicaine), pour qui « l’effet de ces amendements sur les addictions me paraît douteux ; en revanche, il est certain sur les producteurs locaux et artisanaux, qui sont déjà confrontés à des difficultés et qu’il nous faut préserver ». D’autant plus que « cela fait déjà plusieurs années que la consommation de vin de table diminue fortement » pointe le député Nicolas Turquois (Vienne, Mouvement Démocrate).


Ouvrant un débat dans le débat en défendant un hausse de 7 centimes sur une bouteille de vin, le député Hendrik Davi lance que l’« on peut parfaitement participer à une soirée bourgeoise, boire un châteauneuf-du-pape et tuer une famille sur la route en rentrant chez soi. Cela arrive, hélas ! » Suscitant la réaction du tac-au-tac du député Philippe Gosselin (Manche, Droite Républicaine) : « les taxes empêcheront-elles cela ? C’est d’un simplisme ! » Rapporteur général, le député Yannick Neuder (Isère, Droite Républicaine), réplique que « ce n’est parce qu’on augmente de 7 centimes le prix d’un verre de Châteauneuf-du-Pape, évitant ainsi qu’il soit consommé lors de votre dîner bourgeois, que l’on diminuera la mortalité des jeunes, dont 41 000 décèdent chaque année du fait de l’alcoolisation. Bien davantage qu’à la consommation de châteauneuf-du-pape, leur alcoolisation est due [au whisky ou à la vodka] souvent associés à des stupéfiants dont vous-même souhaitez que la vente soit libre et cesse d’être contrôlée ! Avant de s’attaquer au Châteauneuf-du-Pape, commençons par contrôler la vente d’alcools forts et violents aux plus jeunes et arrêtons de taper sur nos viticulteurs. »
Dénonçant en creux un lobbying des alcools, la députée Ségolène Amiot (Loire-Atlantique, La France Insoumise) estime qu’« il y a dans ce pays une hypocrisie. S’il faut accompagner et protéger nos producteurs notamment face aux impératifs de la transition écologique, on ne doit pas nier la réalité d’un problème de santé publique. J’invite le gouvernement à cesser de se cacher derrière son petit doigt ou derrière les petits producteurs. Il doit se saisir de ce problème. C’est particulièrement vrai s’agissant de l’addiction, d’une importance primordiale en France. » Un argument qui n’empêche pas un vote massif contre ces amendements : 119 voix s’y opposant, pour 18 les validant.


D’autres amendements proposaient le déplafonnement des taxes liées aux boissons alcooliques (dont l’augmentation est bloquée à un relèvement annuel de 1,75 %, qu’importe l’inflation). Soutenant un tel dispositif, le député Hadrien Clouet (Haute-Garonne, La France Insoumise) défend « ces amendements de bon sens [qui] visent seulement à rétablir un couplage étroit entre inflation et taxation de l’alcool ». Pour l’ancienne président de groupe d’études vigne et vin de l’Assemblée Nationale, la députée Stéphanie Galzy (Hérault, Rassemblement National), rétorque que « plafonner le relèvement annuel des taxes sur les boissons alcoolisées à 1,75 %, c’est permettre à 500 000 salariés directs ou indirects de continuer à travailler, et à la France de continuer à rayonner dans le monde. La fièvre fiscale qui vous anime aura pour seuls résultats la disparition d’emplois et le chômage de masse. »