e temps de justice n’étant pas celui des polémiques, le délibéré du mercredi 18 septembre de la septième chambre de la cour d’appel de Paris fait revivre les vifs échanges et brutales invectives du mondo vino d’il y a quatre ans sur la caricature du numéro 21 du magazine En Magnum (groupe Bettane & Desseauve). Les multiples altercations de la fin novembre 2020 sur les réseaux sociaux après la diffusion du dessin de Régis Franc (qui a eu sa propre affaire judiciaire, débouchant sur un non-lieu), ont conduit la sommelière et journaliste Sandrine Goeyvaerts (ayant critiqué la caricature en ligne) à citer dans un article du 15 décembre 2020 sur la RTBF que « certains hommes se permettent encore d’écrire de tels articles, reflétant leur vision de la femme : il ne peut exister que deux types de femmes, vendeuse d’amours tarifées ou canons décérébrées. "Des putes blondes, il y en a des centaines dans le Mondovino", écrit en toute décontraction ce même blogueur », Vincent Pousson (ayant défendu la caricature dans d’autres publications). Ce dernier réagit le 19 décembre 2020 sur son compte Facebook en estimant qu’« une mégère belge me donne publiquement des leçons d'élégance, d'amour des femmes, de jeunisme, éventuellement de vin » ou « la poissarde n'a rien [trouvé] de mieux que d'instruire un graisseux procès stalino-mélenchoniste pour sexisme » avec pour illustration une photo de Sandrine Goeyvaerts en maillot de bain au bord d’une piscine.
Confirmant le jugement de la dix-septième chambre du tribunal judiciaire de Paris du 25 janvier 2023, la cour d’appel de Paris condamne pour « injure publique envers une personne à raison de son sexe » Vincent Pousson à 8 000 € (1 000 € d’amende assortie du sursis, 4 000 € au titre de dommages et intérêts, 3 000 euros de frais de justice). « Ces propos revêtent un caractère méprisant caractérisant l'injure définie et réprimée à raison de son caractère aggravé » indique la juridiction dans son délibéré, pointant que « le prononcé d'une condamnation n'étant pas de nature à porter une atteinte disproportionnée à la liberté d'expression » car ils « sont constitutifs d'injure à caractère sexiste » et « par ses propos*, Vincent Pousson va bien au-delà d'une vive critique de l'opinion de Sandrine Goeyvaerts et de la dénonciation qu'a faite celle-ci du sexisme dans le domaine du vin ».


N’alimentant plus son site Idées Liquides et Solides depuis 2021, Vincent Pousson est toujours actif sur Facebook et participant à la revue Tanin, de Reworld Media Magazines, Vincent Pousson n’était ni présent ni représenté par un avocat lors de l’audience d’appel. Contacté, il n’a pas donné suite aux sollicitations de Vitisphere. Ayant également tenu un blog (La Pinardothèque), Sandrine Goeyvaerts est caviste en Belgique et écrit des articles (revues Elle, Elle à table, Le Monde, l'Express et Le Soir) ainsi que des livres (des Perles d’une caviste en 2017 au Manifeste pour un vin inclusif en 2021). Sur les réseaux sociaux, Sandrine Goeyvaerts indiquait à l’annonce du jugement d’appel être « terriblement soulagée : il aura fallu près de quatre ans pour enfin mettre un point final à cette affaire ».
Ayant fondé en 2017, l'association féministe "Women do wine", la sommelière belge pointe dans un communiqué que « la condamnation pour injures sexistes est rare, en particulier pour des injures proférées en ligne et sur les réseaux sociaux. Cette décision de justice est importante et aidera à faire jurisprudence pour les victimes de cyberviolences » alors que « les injures sexistes sont souvent banalisées, particulièrement en ligne, comme si elles étaient inévitables et de simples mots. Pourtant, elles ont des conséquences réelles sur la vie personnelle et professionnelle des personnes visées. » Pour Sandrine Goeyvaerts, « cette affaire prend racine dans le monde du vin, mais elle le dépasse largement ».