n 2005, Chablis a inventé le Volume Complémentaire Individuel (VCI), ouvrant la voie à d'autres vignobles. Aujourd'hui, l'appellation bourguignonne s'en félicite plus que jamais. Ce système, qui permet de constituer une réserve de vin lors des années excédentaires, va pleinement jouer son rôle après une vendange 2024 sérieusement amputée.
"À ce jour, les producteurs ont en réserve près de 100 000 hectolitres revendicables en VCI. Nous n’en avions jamais eu autant”, dévoile Adrien Michaut, président de Fédération de défense de l'appellation chablis (FDAC). Un record obtenu grâce aux millésimes 2022 et 2023, très généreux l’un comme l’autre.
Commercialisé en 2023 ou assemblé au 2024
Et qui va permettre de largement compenser les volumes de 2024. "Le gel, la grêle et le mildiou ont amputé la récolte”, regrette Paul Espitalié, vice-président du Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne (BIVB) pour le négoce à Chablis. “Il est encore difficile de déterminer les volumes, mais on pourrait rester en deçà des 170 000 hectolitres, soit la moitié du plein potentiel. Dans ces conditions, ces 100 000 hl de VCI changent la donne.”
Les réserves "devraient bien sûr être revendiquées dans leur intégralité cette année". Deux options s’offrent alors aux opérateurs : les commercialiser sous leur millésime d'origine, 2023, ou bien les assembler au millésime 2024, à hauteur des 15 % autorisés par cuvée. "Chacun est libre, et je n'ai aucune idée de ce que feront les producteurs", indique Paul Espitalié. Mais en théorie, "le choix de l'assemblage pourrait trouver des adeptes, car les marchés anglo-saxons apprécient les millésimes récents. Par ailleurs, équilibrer un millésime 2024 plutôt frais avec du 2023, plus rond, peut paraître pertinent".


Quoi qu'il en soit, Chablis compte désormais sur ce mécanisme pour l'avenir, comme le souligne Adrien Michaut : "Face à la variabilité spectaculaire des récoltes, c'est la meilleure assurance qui soit. Elle ne coûte rien ni à l'État, ni aux caisses d'assurance, ni au viticulteur."
De tels niveaux de VCI sont aussi à mettre au crédit de l’Institut National de l'Origine et de la Qualité (INAO) qui, en 2023, accordait à Chablis une extension de son rendement butoir. "Il est passé de 70 à 75 hl/ha, pour un rendement de base à 60 hl/ha. C’est ce qui nous a permis d'atteindre les 20 % de VCI potentiel annuel autorisé par décret, soit 12l/ha nous concernant", détaille Adrien Michaut.
Or 60+12 = 72. Que faire des 3 hl/ha restant? Sur ce point viticulture et négoce ne sont pas encore au diapason. “Les vignerons souhaitent pouvoir ajouter ces 3 hl/ha au VCI potentiel, qui atteindrait ainsi 15hl/ha. Nous en avons fait la demande auprès de l'Inao", indique Adrien Michaut. Mais côté négoce, "nous plaidons plutôt pour une petite réserve interprofessionnelle, qui permettrait un début de pilotage économique de l'appellation".