Nous avons compté plus de 35 jours de pluie entre avril et septembre, installant des conditions idéales pour l’installation du mildiou dans la quasi-totalité du vignoble gardois, et des pertes de récolte vertigineuses ». Le directeur du centre œnologique ICV de Nîmes Gérard Sanchez synthétise en une phrase le tableau d’un vignoble gardois dont la situation est jugée « catastrophique » par le président des IGP du Gard Denis Verdier. Résultat : la récolte la plus faible de l’histoire du département, « probablement entre 2,3 et 2,5 millions hl », annonce Gérard Sanchez, contre 3,2 millions hl pour une année normale (2,9 millions hl en 2023).
Dans le Languedoc, les départements défilent donc et le constat reste. En cette fin de vendanges, le qualificatif catastrophique semble ainsi devenu la marque de fabrique de ce millésime 2024. « Une récolte attendue sous les 9 millions hl pour le bassin Languedoc, loin des 11 à 12 millions habituels », rappelle Denis Verdier. Si la sécheresse frappe à nouveau de plein fouet les vignobles des Pyrénées-Orientales et du littoral audois, c’est le mildiou qui est en cause dans le Gard. Seule une zone centrale du département atteint un niveau qualifié de correct, quand la partie méridionale et Costières apparaît en baisse, et atteignant des niveaux très faibles dans la partie est du département, zone de production des côtes du Rhône.


« Nous sommes enfermés dans un schéma épouvantable, où les normes ont été pensées en totale déconnexion de la réalité du terrain. Nous sommes les premiers favorables aux démarches environnementales vertueuses, mais il doit pouvoir exister un système dérogatoire face à des années comme celle-là. Nous n’avons pas pu traiter à hauteur de la pression subie », tranche Denis Verdier. « On a pris le mur de face de cette impasse technique face au mildiou, sans trop s’y attendre », renchérit le président de l’IGP Pont du Gard, Christophe Aguilar.
Prônant la possibilité de contourner exceptionnellement la règle et soulignant les nécessaires « réinvention de l’agroécologie et rééquilibrage des marchés » pour contrer les effets de si difficiles millésimes, le président de la fédération des IGP gardoises ne cache pas être « terriblement préoccupé par l’impact de cette très faible récolte ». Dans la zone est, l’équation de cette trop faible récolte arrivant dans la foulée d’une campagne « où le prix du vrac des côtes du Rhône rouge est descendu sous les 100 €/hl, contre au moins 130€/hl pour être tout juste rentable, va rendre l’exercice comptable 2024 cauchemardesque et une crise sociale jamais vue », prévient Denis Verdier.
Comme chez les voisins audois ou catalans, il prédit donc une demande d’arrachage bien supérieure au sondage « peu fiable » du mois de mai dernier, rappelant par ailleurs que « personne ne doit être oublié par cette mesure ». Face à ces difficultés, les IGP gardoises soulignent néanmoins la force du conditionné, qui concerne la totalité ou la majorité des volumes selon les IGP concernées. Cette orientation de valorisation privilégiée est soutenue par l’organisation d’évènements publics dont le succès ne fait qu’augmenter. « Et c’est bien là tout le paradoxe, on nous parle de déconsommation et on n’a jamais vu autant de monde dans nos évènements », explique Christophe Aguilar. De quoi donner aux vignerons des raisons d’y croire, de même que le développement à l’export, mais comme le résume le président de l’IGP Pont du Gard, « si le prix du vin ne suit pas, ce sera difficile. Pourtant, le prix des bouteilles en distribution n'a jamais baissé. La valeur doit être partagée, sinon c'est la fin ».