Cambriolages

Les vols de bouteilles de vin se multiplient dans les chais

ne première qu’Antoine Olivier, à la tête du domaine éponyme de 16 ha à Santenay, en Côte-d’Or, aurait préféré ne jamais connaître. Dans la nuit du 22 au 23 août, il est la cible d’un cambriolage : des voleurs lui dérobent 1 500 bouteilles étiquetées et prêtes à être expédiées. Montant du préjudice : 50 000 €.

C’est en arrivant sur l’exploitation vers 7 h 30 le 23 août que Jade Antonin, la fille d’Antoine, découvre que quelque chose cloche : un chariot élévateur et un transpalette sont à l’extérieur du bâtiment alors qu’ils devraient être à l’intérieur. Elle constate alors que la porte de l’entrepôt de 600 m2 est ouverte. La serrure est à terre. À l’intérieur, parmi le stock de 5 000 cols, il manque une palette de 1 500 bouteilles. Une odeur de javel règne : les cambrioleurs ont pris la précaution d’effacer leurs empreintes sur les diables et gerbeurs électriques.

Aussitôt prévenu, Antoine Olivier qui habite à 20 km de là se rend sur les lieux. « J’étais désemparé, déclare-t-il. Après une année difficile sur le plan phyto, c’était la cerise sur le gâteau. » Confronté à des décès dans sa famille, le viticulteur relativise. Son assurance va rembourser le préjudice causé. Il en sera de sa poche pour 6 000 €.

Par malchance, le système central d’alarme a brûlé au printemps dernier à la suite d’un incendie qui a endommagé une partie du bâtiment dans lequel était stockée la palette volée. Les travaux ayant pris du retard, la nouvelle alarme n’était pas encore installée.

Pour l’heure, l’enquête confiée à la gendarmerie n’a rien donné. Mais Antoine Olivier a déjà pris des mesures en installant des caméras provisoires. La gendarmerie de Beaune lui a proposé la visite d’un expert pour qu’il analyse la sécurité de son bâtiment. Autant dire qu’il a accepté. L’étude sera engagée après les vendanges.

Au Château Le Gay, 12 ha à Pomerol en Gironde, la tentative de vol du 29 août dernier n’est pas la première. Tant s’en faut. « C’est la troisième en cinq ans », indique le dirigeant de cette propriété, qui reste discret sur les faits. Le 29 août, alerté par les sécurités qu’il a mises en place, il appelle la gendarmerie de Libourne. Celle-ci se rend immédiatement sur les lieux et interpelle trois trentenaires qui étaient entrés par effraction chez lui pour saisir une caisse de six bouteilles de Château Petrus de sa collection personnelle d’une valeur estimée à 24 000 €.

« Depuis cinq ans, nous avons investi 25 000 € dans des systèmes de sécurité très efficients dotés de déclencheurs de fumée et de lumières aveuglantes », indique-t-il. Ce n’est pas tout. Depuis trois ans, certaines bouteilles bénéficient d’un numéro inscrit sur leur capsule qui est reporté sur les factures afin qu’en cas de revente, l’acheteur des bouteilles puisse vérifier qu’elles portent bien les numéros inscrits sur la facture, preuve qu’elles n’ont pas été volées. Ce système devrait être étendu aux 150 000 cols que produit le château.

Aujourd’hui, le dirigeant se sent moins démuni face à ces méfaits : « Les vols sont toujours possibles, mais nous sommes mieux protégés grâce au Plan 20 de prévention de la malveillance mis en place en 2023 par la gendarmerie de Nouvelle-Aquitaine et aux échanges que nous avons régulièrement avec elle. »

Le 2 septembre, les trois hommes comparaissaient devant le tribunal correctionnel de Libourne dans le cadre d’une procédure immédiate. L’affaire a été reportée au 4 novembre prochain.

À Chavanay, dans la Loire, c’est dans la nuit du samedi 7 septembre que le domaine Les Vins de Vienne est victime d’un vol de 2 300 bouteilles de Côtes du Rhône Les Cranilles. Un préjudice de 20 000 €. Cette nuit-là, seuls les saisonniers logent sur le domaine. Ils ont bien entendu un bruit mais l’ont imputé à la tempête qui sévissait. Le lendemain matin, ils découvrent que les piles de palettes de 2 m de haut positionnées devant la porte de l’entrepôt, pour tenter d’empêcher les effractions, sont à terre. Mais ils imaginent que c’est la tempête qui les a fait tomber.

Le lundi matin, Agathe Sorlin, responsable commerciale et administrative de ce domaine de 30 ha qui produit 500 000 cols, constate que la porte du bâtiment a été fracturée. Sur les 75 000 cols stockés, 2 300 bouteilles destinées au marché canadien manquent. Sur Facebook, elle n’hésite pas à relater les faits, la date du vol, le nombre de bouteilles et, surtout, souligne que ces bouteilles sont reconnaissables grâce au macaron orange collé en haut de l’étiquette et l’inscription du site de l’importateur sur la contre-étiquette. « Si vous croisez ces bouteilles ou si vous avez la moindre information, n’hésitez pas à nous contacter », indique-t-elle à ses followers. En attendant, elle a pris rendez-vous avec une société de sécurité pour remplacer les caméras installées il y a quinze ans par de nouvelles, plus efficaces.

Claude Parisot, à Saulcy dans l’Aube, lui aussi a été victime de plusieurs vols : trois durant les treize derniers mois qui ont été commis au sous-sol de son habitation qui abrite son stock de bouteilles de champagne. Au total, 4 000 bouteilles ont été dérobées. La dernière intrusion s’est déroulée dans la nuit du 13 au 14 août. Claude Parisot venait de faire remplacer son ancien système de sécurité doté de trois caméras, deux au sous-sol et une sur la terrasse, par un nouveau système avec sirènes et déclencheurs. Un budget de 3 500 €.

« Je ne savais pas trop comment le faire marcher. J’ai décidé d’attendre le lendemain, le 14 août, pour le mettre en marche. » Au final, les malfrats ont emporté 300 demi-bouteilles, trois quarts d’une palette de grande réserve, une demi-palette de rosé et six cartons de demi-secs. 600 cols en tout d’une valeur de 12 000 €. Une palette de 496 bouteilles qui n’étaient pas habillées n’a pas intéressé les cambrioleurs.

« J’en suis malade », confie ce viticulteur de 79 ans qui a arrêté sa production de champagne fin 2022 et qui voudrait écouler son stock restant de 15 000 cols. Seule certitude : il est décidé à faire un stage pour obtenir un port d’arme.