ù en sont les principaux indicateurs de votre programme Natura Nostra ?
Felix Bocquet et Julien Brilli : Natura Nostra repose sur un axe biodiversité et sur un axe de développement de l’agriculture régénératrice. Sur notre domaine de 1 300 hectares, qui regroupe les vignes des marques Moët & Chandon, Ruinart, Dom Pérignon et Mercier, nous avons créé, depuis 2021, 35 kms de corridors écologiques. Nous avons également 100 ha en éco-pâturage. Enfin, nous avons 100 ha de surface viticole ayant des couverts végétaux. Après la vendange 2024, nous en aurons sur 200 ha.
Les couverts végétaux sont un axe de développement important ?
Oui, nous avons une dynamique importante sur ce sujet. Notre objectif est de doubler nos surfaces chaque année. Nous aurons donc 400 ha en 2025 et 800 ha en 2026. Les couverts végétaux sont implantés un rang sur deux. Et pendant la période végétative, nous travaillons les sols.
Comment impliquez-vous les vignerons qui vous livrent des raisins ?
Nous leur avons présenté Natura Nostra fin 2023 et l’accueil a été favorable. Il y a une quarantaine de vignerons qui sont venus nous voir pour mettre en place des actions sur leur exploitation. En quelques mois nous avons implanté 10 kms de corridor écologique chez nos partenaires. On en prévoit 100 kms d’ici 2027. Nous leur proposons des essences locales qui proviennent de la pépinière les Quatre Champs dans les Ardennes. Ils produisent leurs plants et ont des équipes pour les plantations.
Comment gérez-vous, en interne, le surcroit de pénibilité du travail dans les vignes avec les couverts végétaux et l’enherbement ?
Le programme Natura Nostra est bien perçu par nos équipes. On expérimente pour que le travail dans les vignes reste confortable. On fait des semis de couverts végétaux précoces et tardifs pour faciliter la taille. On débute la taille dans les couverts tardifs puis on intervient dans les parcelles à semis précoces après avoir roulé les couverts. Nos partenaires sociaux sont consultés. Notre stratégie environnementale ne doit pas se faire au détriment des conditions de travail.
Votre conservatoire des cépages Essentia, basé à Puisieulx dans la Marne, a-t-il pour but de s’adapter au changement climatique ?
C’est en effet l’un de ses principaux objectifs. Le matériel végétal est l’un des leviers majeurs pour répondre à cet enjeu. Ce conservatoire a pour but de préserver le patrimoine génétique des cépages champenois. Nous allons chercher des plants des années 1970, avant la mise en place des sélections clonales. Parmi ces plants, certains pourraient présenter des aptitudes intéressantes, comme celle de résister au stress hydrique.
Avez-vous d’autres projets au sein de Natura Nostra ?
Nous avons le projet de semer des haies, en complément de celles que l’on plante. Ce programme de deux ans, lancé en mars 2024, s’élabore avec la SCIC Végétal Nord Est basée à Colmar en Alsace. Nous avons semé 500 m de haies à Chézy sur Marne. Plusieurs objectifs sont visés : déployer la haie à plus grande échelle par une baisse des coûts d’investissement ; identifier, selon les différents contextes pédoclimatiques et de pression du milieu, les critères clés qui permettent de choisir entre un semis d’une haie et une plantation ; permettre l’implantation d’une haie plus résiliente ; se prémunir d’une éventuelle pénurie de plants pour mettre en œuvre les programmes d’implantation de haies.
Nous expérimentons par ailleurs un paillage à base de laine de mouton et de cheveux, élaboré par le domaine des Massifs en Auvergne. Nous avons testé deux paillages, l’un de 500 g et l’autre de 1 000 g.
Enfin, nous prévoyons de construire une serre de multiplication de plants pour valoriser le travail réalisé avec le conservatoire des cépages Essentia. Cette serre devrait voir le jour d’ici deux à trois ans sur le domaine de Romont à Mailly Champagne dans la Marne.