n ange est passé… Alors que la salle était remplie d’acteurs de la filière en phase avec les demandes d’arrachage différé, et même définitive du côté du Gard, une phrase, et son idée sous-jacente, ont suspendu le temps au cours de l’assemblée générale du syndicat des vins IGP Pays d’Oc le 19 janvier. « L’arrachage n’a jamais marché car réduire l’offre, c’est accepter de perdre des parts de marché », a lancé le consultant en commerce et marketing des marchés viticoles Fabrice Chaudier. Aux côtés du professeur d’économie à l’université de Bordeaux Jean-Marie Cardebat, les deux intervenants animaient la table ronde de cette AG. Au préalable, ils avaient même affirmé que « c’est le manque de vin », à cause d’une sous-production structurelle mondiale, « qui freine la reprise de la consommation mondiale ».
Jean-Marie Cardebat soutient en effet qu’à l’échelle macro-économique, « la causalité statistique est directe entre production et consommation de vin, c’est une loi économique économique classique à laquelle le marché du vin obéit ». Soulignant le décalage temporel entre cause et conséquence, l’économiste bordelais explique que c’est la production de vin d’il y a deux à trois ans qui est actuellement consommée sur le marché. « Or cette production suit une baisse tendancielle depuis 2017, entraînant en conséquence la baisse de consommation que nous connaissons », appuie Jean-Marie Cardebat. Dans la logique qu’il développe, il explique que « les éléments conjoncturels peuvent s’améliorer si l’offre est maintenue en face ».


Arracher ne serait donc pas la solution, car « ça ne marche pas, ni à court ni à moyen terme », appuie encore Fabrice Chaudier, qui rappelle que cela entrainera mécaniquement « moins de ventes pour des frais de production et des frais commerciaux qui vont s’accroître ». L’arrachage ne serait donc qu’un « traitement social d’une crise de l’amont », selon Jean-Marie Cardebat, une façon passéiste d’apporter des réponses « alors que la solution est à trouver au niveau du marketing, pas de l’amont ». Et donc plutôt orienter la manne financière dévouée à de l’arrachage vers « la préservation de la capacité d’adaptation de la production au climat, aux marchés et la création de valeur » à travers l’idée de marque d’origine des vins de Pays d’Oc.
Après la présentation, une partie de l’auditorat a pu se montrer stupéfaite, parfois même abasourdie par le postulat proposé, même si les solutions de segmentation ont pu séduire. Si beaucoup estiment les idées de création de valeur autour de la marque d’origine et la segmentation intéressantes pour l’avenir, la résolution du problème urgent apparaît bien loin de ces considérations macro-économiques. « On se demande s’ils ont déjà eu à vendre une bouteille de vin dans leur vie », glissait un président de cave, quand un autre estimait l’intervention totalement hors-sol. « S’il faut 4 ans pour mettre en route une telle stratégie, la moitié de nos adhérents n’aura pas survécu à la crise d’ici-là. Allez expliquer de tels raisonnements à des gens qui galèrent avec 800€/mois, alors qu’ils attendent des solutions rapides et des perspectives de sortie dignes pour les plus anciens », rappelle-t-il. Ce que confirment les appels de viticulteurs à rejoindre les cortèges d’agriculteurs en colère en Occitanie et Nouvelle-Aquitaine.