ans un communiqué diffusé ce 23 janvier, le comité territorial gardois des Vignerons Coopérateurs d’Occitanie (fédération des caves coopératives) appelle à un arrachage définitif d’une partie du vignoble. Appuyée par les présidents départementaux de la Fédération Départementale des Syndicats d'Exploitants Agricoles (Fdsea 30), des Jeunes Agriculteurs (JA), de la fédération des vins à Indication Géographique Protégée (IGP) et du syndicat général des vignerons des côtes du Rhône, la décision a été prise le 10 janvier dernier par les coopératives gardois. Après la réunion de plus de 70 dirigeants de 42 caves du département, qui se sont exprimés tour à tour pour montrer « l’attachement des vignerons coopérateurs à leur métier, à leur territoire, à leur filière et à leur culture », situe un communiqué.
Autour de la table, c’est l’équivalent de plus d’un million et demi d’hectolitres de vin produits annuellement qui s’est retrouvé sur un constat sans appel. « Plus de la moitié de la production volumique du département appelle à un arrachage définitif social », pose Anthony Bafoil, le président du comité territorial gardois des Vignerons Coopérateurs d’Occitanie (VCO), « car malgré les efforts demandés aux vignerons (et réalisés), pour répondre aux défis de qualité, de sécurité alimentaire, d’environnement, pour répondre aux injonctions d’une politique bien-pensante conduisant à une agriculture bien plus vertueuse que nos concurrents, les effets sont catastrophiques ».


Anthony Bafoil ne place pas cette demande en opposition à la mesure d’arrachage temporaire, porté par la fédération régionale des VCO, mais en complément social indispensable pour tous ceux qui veulent ou sont contraints d’arrêter leur activité. « Nous portons l’arrachage différé depuis trois ans. Si la mesure avait été mise en place avant, nous n’en serions pas dans cette situation où des collègues sont à bout, au pied du mur avec des dettes qui s’accumulent. Nos dirigeants sont-ils conscients de ça ? », plaide-t-il. Le message adressé au ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, qui doit se rendre en Languedoc ce vendredi 2 février, est clair : « la viticulture gardoise a besoin de votre attention, elle a besoin de mesures simples, rapides et adaptées ! ».
Ne pouvant être financé sur les fonds europénes de l'Organisation Commune du Marché vitivnicole (OCM vin), c’est l’aspect social et urgent qui est souligné pour trouver de l’argent pour une telle mesure. « Nous attendons un fonds social de l’Etat, car les conséquences économiques et sociales d’un non-financement d’un tel arrachage seraient désastreuses et autrement plus chères pour les finances de l’Etat », enchaîne Anthony Bafoil, qui insiste sur une mesure très ciblée et à différencier des arrachages massifs du passé. Dans les caves, c’est la première fois que les contractualisations sont si peu avancées en fin de mois de janvier. Moins de la moitié de la récolte 2023 étant vendue ou contractualisée. « Les niveaux de stocks sont au plus haut, surtout en vin rouge, malgré de faibles récoltes régulières, sans avoir épuré les stocks de 2022, alors que nous sortons d’une distillation de crise », poursuit le président du comité territorial gardois des VCO.
« Nous sommes en pleine distillation et nous constatons déjà un excédent de 5 à 6 millions hl à l’échelle nationale, qui vont peser rapidement sur le marché. L’arrachage social est incontournable pour évacuer ce surplus structurel vis-à-vis du marché », appuie de son côté Gérard Bancillon, président de la confédération des vins IGP de France et de la cave gardoise des Collines du Bourdic.
En complément du temporaire
Pour permettre une sortie digne aux plus âgés ou ceux qui sont à bout, « cet arrachage définitif ne saurait être inférieur à 6 500 €/ha sans reproduire les erreurs du passé dans ses conditions d’accès », souligne le communiqué, tout en reprenant les mesures conjoncturelles immédiates attendues sur les aides à la trésorerie. La moitié des caves coopératives gardoises juge en effet être en grande difficulté sous 2 à 3 mois pour financer la récolte à leurs adhérents.
Porteuse de la mesure d’arrachage temporaire, la fédération régionale des VCO ne se détourne pas pour autant de cette demande d’arrachage social. « Cela fait partie des sujets que nous avons déjà cités pour compléter les mesures et répondre aux situations d’exploitants à bout ou au bord de la faillite. Nous ne sommes pas en désaccord », tranche Ludovic Roux, le président des VCO. Ne voulant pas vendre du rêve, Ludovic Roux rappelle néanmoins les limites structurelles, notamment les plafonds des minimis et la nécessaire notification européenne, pour faire aboutir une telle mesure. « Mais il y a une responsabilité sociale de l’Etat dans le maintien ou l’abandon de la vigne dans certaines zones, le terme social est donc primordial pour apporter des solutions à ceux qui ne s’en sortent plus », défend-il.