l aurait sans doute fallu tourner sept fois la langue d’oc dans la bouche… Diffusée jeudi 14 novembre sur France 2, une séquence de Complément d’enquête fait polémique dans le Midi pour l’usage par la voix off du terme infamant de « piquettes » afin de décrire deux vins languedociens envoyés à concourir comme vins de Bordeaux par un vigneron facétieux, Jean-Baptiste Duquesne, à la tête du château Cazebonne dans les Graves et fondateur du mouvement Bordeaux Pirate. Pour piéger un concours, un vin rouge d’appellation Corbières a été présenté comme un merlot 2022 et un vin blanc Pays d’Oc IGP de cépage chardonnay a été envoyé comme un sémillon 2022 annonce le reportage. « Deux piquettes maquillées en bordeaux » indique Complément d’enquête, qui répète ce terme sans qu'il ait été utilisé par le vigneron bordelais.
« Je n’approuve pas ce terme de piquette, que je n’ai jamais employé, et je n’ai en aucun cas voulu dénigrer une quelconque région » indique à Vitisphere Jean-Baptiste Duquesne, rappelant qu’« un vin de piquette est un vin de repasse de faible degré, qui se faisait autrefois. Je n'aurais jamais employé ce terme impropre et condescendant. » Péjoratif, le terme de piquette a blessé dans le vignoble languedocien. « Je ne veux pas polémiquer. Je vais questionner mon conseil d’administration pour voir ce qu’il y a lieu de faire » réagit Olivier Verdale, le président du syndicat AOC Corbières, qui relève des « propos malvenus. On sait où en sont tous les vignobles de France aujourd’hui. » Contactée, la production de Complément d'enquête veut faire descendre la pression en rappelant la définition du Larousse : vin médiocre. Mais le terme médiocre étant lui-même défini comme étant en dessous de la moyenne ou sans éclat par le Larousse, par sûr que ce retour au dictionnaire apaise finalement...


Ayant reçu « deux-trois messages d’insultes de vignerons du Languedoc disant que je suis un collabo, un nazi, qu’il faut me pendre… Ce n’est pas allé plus loin* », Jean-Baptiste Duquesne calme aussi le jeu : « je comprends l’énervement, ça m’a dépassé » rapporte-t-il franchement. « Je voulais faire une blague, je suis un trublion. Je ne suis pas contre la profession, c’est assez dur pour tout le monde : chacun fait ce qu’il peut et a les traites qui tombent » pointe le vigneron bordelais, qui explique son choix de vins languedociens : « je n’ai pas pris des vins de Bordeaux pour que la démonstration du manque de sérieux de ce concours soit meilleure avec des vins d’ailleurs. J’ai pris le moins cher trouvé en linéaire. Un chardonnay technique, boisé au copeau, facile à boire : irréprochable à 3,5 €. Un Corbières marchand, nickel pour son prix de 1,99 €. »
A noter que dans un reportage similaire en mai, la RTBF avait évoqué une piquette remportant une médaille d'or, mais comme il s'agissait d'un vin de la Communauté Européenne, personne n'avait réagi à l'époque...
* : « J’ai aussi reçu des centaines de messages me félicitant d’informer sur les médailles » précise Jean-Baptiste Duquesne.