ortement attendu par les représentants de la filière vin ce mercredi 29 novembre à la préfecture de Montpellier (Hérault), le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau aura répondu favorablement aux deux demandes urgentes portées par les manifestants du samedi 25 novembre dernier à Narbonne (Aude) : la mise en œuvre rapide d’un arrachage temporaire et un soutien aux trésoreries par une année blanche fiscale. Ayant avancé sa venue à Montpellier pour échanger avec la filière (la visite du salon Sitevi aura lieu ce jeudi 30 novembre), le ministre « voit bien la détresse et était là pour répondre aux questions et attentes » indique le cabinet de Marc Fesneau à Vitisphere.
Premier message ministériel : « pouvoir mettre en place [l’arrachage temporaire] en 2024 » annonce la rue de Varenne. « La France porte officiellement l’arrachage temporaire et la restructuration différée pour 2024 » témoigne Jérôme Despey, le président du conseil spécialisé vin de FranceAgriMer, qui ajoute que « le ministre annonce mettre tout son poids dans l’arrachage temporaire en 2024. C’est indispensable sur le plan structurant pour permettre de rééquilibrer l’offre et la demande. » Devant envoyer une lettre ouvrant officiellement les échanges avec la Commission Européenne cette semaine, Marc Fesneau a également répondu favorablement à la demande du vignoble d’organiser une réunion tripartite entre ministère de l’Agriculture, filière vin et Commission Européenne. « Le ministre a été très clair dans sa volonté de travailler sur la mesure d’arrachage différée que la profession intègre dans sa réflexion stratégique de plan filière » indique le cabinet de Marc Fesneau, pointant que l’outil permet d’« avoir un peu de temps entre la disposition d’arrachage pour les viticulteurs qui s’en vont et les jeunes qui s’installeraient dans des conditions répondant aux orientations stratégiques identifiées par la filière. »


« Il faut aller vite » résume Jérôme Despey, qui précise que les services de FranceAgriMer se penchent sur les modalités d’un tel dispositif, imaginé pour les campagnes 2024-2025 et 2025-2026 à un arrachage temporaire (qui pourrait être aidé jusqu’à 2 400 €/ha) et ensuite, à la troisième année, une bascule possible sur une restructuration différée (6 à 8 ans) pour ceux le souhaitant (sans être obligatoire pour ceux souhaitant quitter le vignoble). Si des enjeux d’Indemnité de Pertes de Récolte restent à éclaircir, « il faut d’abord obtenir de la Commission l’arrachage temporaire et la restructuration différée. Le ministre y travaille et nous aussi » indique Jérôme Despey, qui était dernièrement à Bruxelles pour porter le sujet.
Concernant les mesures de soutiens aux trésoreries exsangues, deux outils seront mis sur la table*. D’abord un redimensionnement du fonds d’urgence de 20 millions d’euros créé par l’amendement surprise du député Jean-René Cazeneuve (Gers, Renaissance). « Le ministre a dit que les 20 millions d’euros du fonds d’urgence ne seront pas suffisants » rapporte Jérôme Despey, alors que la filière proposait une enveloppe de 60 millions € pour couvrir les difficultés économiques et climatiques (mildiou, sécheresse, grêle…). « Le ministre a indiqué son accord pour travailler à l’extension et à l’élargissement pour les exploitations en difficulté. Reste à calibrer le montant nécessaire » précise le cabinet. L’autre outil de consolidation des trésoreries transformerait les annuités d’emprunts bancaires de l’année 2024 en des prêts bonifiés avec un élargissement du modèle adopté pour les Prêts Garantis par l’État (PGE). Une bonification des taux d’intérêt qui pourrait donc partiellement être prise en charge par l’État (et pourrait être complété par des collectivités territoriales).
Se montrant déjà attentive à la concrétisation de ces annonces, la filière vin prend acte d’un nouveau rendez-vous pour le début 2024. Il s’agira d’une clause de revoyure pour la filière nationale, cette réunion s’étant tenue à Montpellier en marge de la visite ministérielle sur le salon Sitevi. Un plan global est également attendu pour le début 2024, d’autres demandes ayant été exprimées ce 29 novembre : une aide au stockage privé, un soutien pour l’aval ayant perdu du potentiel de production lié aux aléas climatiques, des outils de conquête à l’export, des moyens pour la transition environnementale et l’adaptation au changement climatique… Des points enregistrés par le ministre et ses services, qui reviendra vers les professionnels pour aider à passer ce cap et se projeter sur l'avenir.
« Le ministre indique que les aides conjoncturelles permettent de gérer la crise » commente le cabinet ministériel, pointant que « l’État a déjà été au rendez-vous, le ministre a tenu les engagements pris. Il y a des demandes complémentaires sur des aides conjoncturelles et le ministre a indiqué de façon claire son accord pour accompagner de nouveau [la filière] sur les quelques mois à venir qui seront très difficiles pour les viticulteurs. Ce qui laissera une petite respiration pour que le plan structurel puisse prendre le relai. Si à un moment donné il n’y a pas de réflexion structurelle, on continuerait à faire des aides conjoncturelles à répétition. Ce qui n’est dans l’intérêt de personne. C’est évidemment anxiogène et difficile à vivre pour les viticulteurs. Pour l’État et la profession, il faut pouvoir embrayer sur une réflexion stratégique pour que la viticulture ne puisse plus connaître ce type de crise et s’adapter aux enjeux qui sont les siens : le changement climatique, l’évolution des marchés, intérieurs sur les couleurs et les types de vin, et export, on a des marchés existants. » De nombreuses autres réunions de travail s'annoncent, avec une attente qui ne va pas se dégonfler.