ui, les ateliers vigne et oliviers sont indéniablement complémentaires. Ils constituent même, aux dires d’Olivier Nasles, viticulteur-oléiculteur et ancien président de France Olive intervenant lors d’une conférence au Sitevi de France Olive, « les deux jambes de l’agriculture méditerranéenne ». Attention cependant, avertit-il, à ne pas céder « au rêve d’idéalisation de la culture de l’olivier, car la réalité économique est bien différente, et la complémentarité des deux cultures est loin du monde idéal de Oui-Oui », poursuit le vigneron d’Aix-en-Provence.
Après plantation, au moins 5 à 8 ans sont nécessaires avant mise en production d'une oliveraie, et la réalité du marché de l’huile d’olive est implacable, « car à 10-15€ HT le litre d’huile d’olive bio acheté en gros, il n’existe pas de marché vrac rentable de l’huile d’olive en France ! ». Alors que, « les bonnes années, donc pour 400 à 500 litres d’huile à l’hectare », les coûts de production tournent autour de 15 €HT/ha, ceux-ci atteignent 30 €HT/ha « les mauvaises années, pour 200 à 250 litres d’huile à l’hectare », situe Olivier Nasles. Celui qui est également président du syndicat AOC des coteaux d’Aix avertit donc que seul un circuit de mise en marché directe pour un prix avoisinant les 25 €HT/litre peut s’avérer rentable. De même, l’oléiculture se caractérise par la grande variabilité des volumes produits d’une année sur l’autre, la fameuse alternance, alors que les coûts de production restent ne s’alignent pas sur ces variations. « Ne faire que de l’olivier en France est suicidaire ! Cela doit rester un complément de revenus », tranche Olivier Nasles, « car l’olivier a besoin de la vigne et sa régularité pour survivre économiquement, pas l’inverse ».


O. Nasles aux côtés d'Hélène Lasserre - DR
Axée sur une culture de complément de revenus pour le viticulteur, la directrice du pôle conservation & recherche chez France Olive Hélène Lasserre souligne que l’oléiculture présente une complémentarité de conduite culturale, autant qu’une cohérence de synergie commerciale avec la production de vin. Olivier Nasles tempère néanmoins : « le matériel commun présente vite des contraintes et un professionnel finit toujours par dupliquer son matériel pour avoir des machines et outils dédiés à chaque culture ». La taille, les interventions phytosanitaires puis la récolte finissent également par provoquer des chevauchements d’intervention, ou des enchainements « qui peuvent mettre le personnel à rude épreuve… Et bien souvent, quand il s’agit de traiter, on va prioriser la vigne plutôt que l’olivier lorsque la pression s’accentue », déroule Olivier Nasles grâce à son retour d'expérience.
Pour une exploitation, ce duo cultural vigne-olivier peut être profitable et constituer un argument commercial intéressant. Olivier Nasles réitère néanmoins aux intéressés que « l’olivier ne supporte pas l’amateurisme ! ». Contrairement à la vigne, la culture de l’olivier permet des impasses sans mettre en péril la plante, mais pour mettre en cohérence une production avec des coûts acceptables, « il est fondamental d’être professionnel dans la mécanisation, l’organisation des travaux, la gestion de la main d’œuvre, et être compétent dans les domaines de la fertilisation, irrigation et maîtrise des risques sanitaires », termine le vigneron aixois. Encore plus chère dans ses coûts d’exploitation, la production d’olives de table est aujourd’hui limitée aux deux coopératives françaises implantées sur ce créneau, Nyons et Bize-minervois.
Alors que la question du remplacement des surfaces de vignes arrachées dans le bordelais par la culture de l’olivier surgit lors de la conférence, Olivier Nasles tranche sans trop d’ambiguïté, après avoir échangé sur le sujet avec un élu girondin à l’ouverture du salon. « Oui, le réchauffement climatique septentrionalise la culture de l’olivier et ouvre de nouveaux territoires. Néanmoins, on ne va pas remplacer 15 ou 30 000 ha de vignes par de l’olivier en Gironde », appuie-t-il. La création d’une oliveraie n'excédant pas les 1 500 ha pourrait trouver une cohérence de rentabilité, mais l'ex-président de France Olive n'envisage pas une proportion plus marquée.