ue ce vendredi 3 novembre 2023, la décision des troisième et huitième chambre du Conseil d'État donne définitivement tort à l'Établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) pour avoir refusé en février 2019 la demande de subventions déposée en févier 2018 par l'Institut coopératif du vin (ICV, 12 centres œnologiques en Aquitaine, Ardèche, Beaujolais, Languedoc, Provence, Vallée du Rhône et Roussillon) pour construire un laboratoire à Brignoles (Var). Pour déterminer si l’ICV pouvait bénéficier ou non d’aides à l’investissement vitivinicole, tout l’enjeu juridique était de savoir si l’ICV est un opérateur privé prestataire d’analyses œnologiques ou une mutualisation technique externalisée de caves coopératives.
Si le tribunal administratif de Montpellier avait rejeté en octobre 2020 la demande de réexamen par l’ICV en y voyant un acteur privé sans production, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé cet arrêt et le jugement défavorable de FranceAgriMer en décembre 2021 en jugeant que « l'ICV fournit à ses seuls associés coopérateurs des conseils à la vinification, des analyses œnologiques et des services » et que son action va « au-delà de la simple fourniture de conseils généraux ou d'analyses, à exercer en lieu et place de ses adhérents une partie des opérations participant de la production du vin », faisant « que l'ICV devait être regardé comme exerçant, au moins en partie, une activité de production dans le secteur des vins » reprend le Conseil d'État qui valide juridiquement cette lecture. Ce qui rend conforme la candidature de l’ICV à ces aides, répondant à l'article 2.1.2 de la décision de la directrice générale de FranceAgriMer de juillet 2017*.


Jugeant infondée la procédure de FranceAgriMer, le Conseil d'État ajoute à sa décision une amende de 3 000 € que l’établissement devra verser à l’ICV. Pour le groupe coopératif, l’important est désormais de pouvoir demander l’aide à la construction de son laboratoire provençal. Ayant coûté 3 millions d’euros, ce centre présentait 1 million € éligible à 30 %, ce qui porterait la subvention à 300 000 €. Ayant mis cinq ans à aboutir, cette procédure tient désormais de l’histoire ancienne pour l’ICV. « On peut témoigner que FranceAgriMer prend garde à ne pas verser indûment des aides européennes » souligne pince sans rire Olivier Merrien, le directeur général de l’ICV. Pour qui « il y a eu une incompréhension, FranceAgriMer a considéré que l’ICV est une société de prestation de services privée à activité commerciale pure, sans prendre en compte son statut coopératif mutualisant des moyens que les adhérents auraient pu avoir chez eux et partagent. Il y a une forme méconnaissance de ce qu’est l’ICV. Ce qui a amené FranceAgriMer à nous challenger. » Si le nom d’ICV, l’absence de cuves de vin et la facturation d’analyses/produits œnologiques ont pu prêter à confusion, l’important pour Olivier Merrien était de faire reconnaître le statut de l’ICV. Que FranceAgriMer aurait pu avoir en tête, son établissement précurseur, Viniflhor, ayant été présidé par Denis Verdier, le président de l’ICV.
Contacté, FranceAgriMer répond à Vitisphere ne pas avoir pour mission d’apporter des commentaires sur les décisions du Conseil d’État.
* : Cet article 2.1.2 stipule que « les sociétés prestataires de service, exerçant une activité de production, de transformation, de conditionnement ou de stockage dans le secteur des vins peuvent bénéficier de l'aide du FEAGA [Fonds européen agricole de garantie], si elles sont détenues majoritairement par des personnes physiques ou morales exerçant en propre parallèlement aux activités de prestations de service et avant le dépôt de la demande d'aide, des activités de production, de transformation, de conditionnement ou de stockage dans le secteur des vins dont les produits sont énumérés à l'annexe VII, partie 2 du règlement (UE) n°1308/2013 du Conseil ». A noter que l’article 2.1.1 indique également que « les demandeurs éligibles sont (...) les entreprises vitivinicoles quelle que soit leur forme juridique (individuelle ou sociétaire) produisant ou commercialisant les produits [de la vigne,] visés à l'annexe VII, partie 2 du règlement (UE) n° 1308/2013 du Conseil (cf. annexe 8), les organisations de producteurs de vin, les associations de producteurs ou organisations interprofessionnelles réalisant une opération de production, de transformation, de conditionnement ou de commercialisation des produits, dans le secteur des vins (...) ».