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Premiers crus et mécènes de la ville de Pauillac en 1855 et à 250 000 €/an
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Ruissellement
Premiers crus et mécènes de la ville de Pauillac en 1855 et à 250 000 €/an

Connue mondialement pour ces 18 grands crus, la commune de Pauillac met à profit leur générosité pour mener grand train de vie en plus de vigne.
Par Alexandre Abellan Le 07 août 2023
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Premiers crus et mécènes de la ville de Pauillac en 1855 et à 250 000 €/an
En 2014, « la situation financière était compliquée pour la commune qui avait besoin de projets. Les grands crus ont fourni 1 million € permettant de gros projet » explique Florent Fatin. - crédit photo : Adobe Stock (Daan)
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ui a dit que les grands crus classés en 1855 vivaient dans leur bulle spéculative et ne s’impliquaient pas sur leurs territoires ? Peut-être ceux qui notent que la plupart des propriétaires et cadres des propriétés n’habitent pas dans le Médoc (mais à Bordeaux, Paris…), mais pas ceux qui pointent les retombées économiques pour la vie locale du fonds de dotation Pauillac Médoc alimenté par les 18 grands crus classés en 1855 de Pauillac au profit de la commune éponyme (5 000 habitants). Projet de campagne du maire Florent Fatin (Les Républicains) dès sa première élection en 2014, ce fonds dotation permet de « donner un impact économique à la présence de ces entreprises prestigieuses sur le territoire. Qui avaient peu de retombées en dehors de la fiscalité et de l’emploi » explique l’édile. Qui est un fin connaisseur des levées de fonds dans la filière vin, ayant été responsable de la communication de la future Cité du Vin de Bordeaux de 2009 à 2013, pour ne pas dire le lobbyiste de son financement par le vignoble. Avec 20 millions d’euros levés auprès des châteaux*.

Pour le fonds Pauillac Médoc, Florent Fatin avait proposé un ticket à 10 000 €/an sur 10 ans à chaque cru classé. Le maire rapporte que les trois premiers vont plus loin, avec 30 000 € par an pour les châteaux Mouton-Rothschild (Baron Philippe de Rothschild, BPhR), Lafite-Rotshchild (Domaines Baron Rotschild, DBR) et Latour (holding Artémis de François Pinault). Sachant que BPhR possède aussi à Pauillac les châteaux Clerc-Milon et d’Armailhac, BPHR monte même à 50 000 €, somme que DBR aligne également (allant plus loin que le complément de son autre cru classé de Pauillac, le château Dubart-Milon). Au final, le fonds Pauillac Médoc bénéficie de 250 000 €/an.

950 000 € pour BPHR seul

De quoi alimenter les projets ambitieux de la ville, complétés par d’autres dons des châteaux, notamment BPhR, « première mécène de la ville » résume Florent Fatin. Entre 2016 et 2021, « les dons sont à la hauteur de la politique d’investissement de la ville : 950 000 € donnés directement par BPHR et via le fonds de dotation sur les 13 millions € investissement de la commune » note Paul Serre, le président de la Cour Régionale de Comptes Nouvelle-Aquitaine, qui vient de rendre un rapport sur Pauillac. « Ce sont des fonds importants, mais pas gigantesques par rapport au train de vie de la ville » ajoute le magistrat, qui distingue deux sujets à améliorer : le fléchage des fonds de dotation Pauillac Médoc et les interventions de la mairie comme intermédiaire pour BPhR.

Emploi des ressources reçues

D’une part, il y a les dons du fonds de dotation pour financer certaines actions (« favoriser l’harmonie sociale du territoire médocain, en assurant au plus large public un accompagnement à la scolarité, la promotion de l’égalité des chances et une amélioration du cadre de vie des habitants » indiquent les statuts du fonds Pauillac Médoc signés le 13 février 2017), mais le « fléchage des fonds est très parcellaire. Sans que cela soit au détriment de la commune, mais c’est aux donateurs de savoir s’il y a assez de traçabilité » indique Paul Serre (le rapport indique que « la commune n’a pas été en mesure de fournir un récapitulatif de l’emploi des ressources reçues de ce fonds de dotation à savoir 320 000  € en 2018, 270 000  € en 2019 et 332 000  € en 2021 »). Pour Florent Fatin, il n’y a pas de sujet, « le fléchage des fonds est présenté pour la validation de chaque projet aux châteaux. Si la cour des comptes veut le détail, elle peut regarder notre comptabilité. » Et de citer des investissements conséquents dans la rénovation des cours d’école, dans le chauffage et la climatisation des classes, dans le festival de cinéma des Vendanges du septième art… Mais aussi deux motocross pour que la police municipale puisse suivre les auteurs de rodéos urbains s’enfuyant dans les vignes.

D’autre part, il y a les offres de concours de BPhR*, avec le financement de projets intéressant le groupe sur la commune. Comme la réfection sans observation de la passe de la Pigotte, donnant accès à BPHR (504 000 €), mais aussi la réfection des trottoirs du Pouyalet (189 000 €) qui est épinglée par la cour des comptes pour être du ressort du département et non de la commune (comme il s’agissait de la route départemental n°2). « Nous avons une convention avec le département qui a permis la réfection. Nous l’avons transmise à la cour des comptes qui n’en a pas tenu compte dans son rapport » réplique le maire Florent Fatin. « C’est un sujet formel, sans impact pour la commune comme il y a eu un remboursement par BPhR » évacue le magistrat Paul Serre.

Maison de retraite

La cour des comptes est plus circonspecte sur « une opération risquée de relocalisation d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) » réalisée de 2018 à 2020. La maison de retraite des Acacias, gérée par l’association Logéa, cherchant à s’agrandir, la commune de Pauillac lui a servi d’intermédiaire dans un montage complexe de conditions suspensives et d’échanges de parcelles : avec le rachat d’une parcelle de 4 569 m² appartenant à BPhR pour implanter une maison de retraite plus grande (38 lits), en échange d’une obligation de construire un EHPAD sur ce terrain (faisant face aux locaux de BPhR) et d’une cession par la mairie d’une route séparant le château Mouton Rothschild de son accueil des visites (le club Mouton). Une autre partie est intervenue, avec la cession de l’ancien terrain de l’EHPAD pour agrandir le lycée AGIR en 2022 (avec la constitution d’un internat).

« Le montage de l’opération a eu pour effet d’en transférer le risque à la commune, laquelle s’est constituée en intermédiaire dans une opération entre personnes privées  qui aurait pu se dérouler sans elle » épingle la cour des comptes, ajoutant qu’« elle a accru ce risque en garantissant l’emprunt  de l’association Logéa à hauteur de 1 699 750  €, soit 25 % de l’emprunt total de 6 799 000  €  souscrit par celle- ci ». Autre point d’attention, l’achat-revente à des prix défavorables pour la mairie par rapport aux évaluations des Domaines relève le magistrat Paul Serre : « il n’y a pas eu de déficit, mais cela est moins rentable pour la commune » en termes de solde. « Gagner plus est théorique, l’évaluation des prix par le Domaine étant un objectif. La commune est gagnante, la cession de la route par le département étant de 1 € » indique Florent Fatin, ajoutant que BPhR a financé le dédoublement de la route et refait les trottoirs du Pouyalet à cette occasion.

Un fonds à Margaux

Développée à Pauillac, la formule du fonds de dotation peut se faire partout pointe Paul Serre, citant l’exemple de la commune de Margaux qui s’est doté d’un véhicule similaire pour bénéficier de la générosité de ses grands crus classés. Formule permet d’héberger libéralités, soutien, pour aider intérêt général.

Contacté, le groupe BPhR ne souhaite pas commenter. Président du fonds Pauillac Médoc, Jean-Charles Cazes (château Lynch Bages) n’a pas donné suite aux sollicitations de Vitisphere à date de publication.

 

* : En 2013, lors de la pose de la première pierre de la Cité du Vin, Alain Juppé, alors maire de Bordeaux, aurait donné à Florent Fatin le challenge de gagner la mairie de Pauillac, permettant d’avoir un siège supplémentaire pour les Républicains au Sénat raconte Florent Fatin.

 

** : « Deux salariés du groupe siègent au conseil municipal, même s’ils se déportent systématiquement du vote dès lors que cela est nécessaire » indique la cour des comptes.

 

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