lles ont eu du fil à retordre ! Ce 28 juin, dans les vignes de Mathieu Amblevert, les palisseuses-releveuses Clemens et Provitis ont eu affaire à un cabernet sauvignon très ébouriffé et à ses branches récalcitrantes à entrer dans le rang. Des conditions difficiles qui ont mis ces deux machines et leur chauffeur à l’épreuve.
Sur le trajet qui nous mène à la démonstration, à Civrac-sur-Dordogne, on croise un festival de pulvérisateurs, gyrobroyeurs et rogneuses. Malgré cette période très chargée en travaux viticoles dans ce secteur du sud-est libournais, une trentaine de viticulteurs ont fait le déplacement jusque chez Mathieu Amblevert. « Le recrutement de main-d’œuvre et la réduction des coûts de production sont des problématiques importantes en Gironde », décrypte Pierre Dufaure, conseiller agroéquipements à la chambre de Gironde.
Devant un public attentif, les constructeurs présentent leur machine. Les deux releveuses fonctionnent selon le même principe. Chacune possède une tête de relevage à bandes et déroule deux ficelles, que des agrafes posées à l’aide de vérins hydrauliques maintiennent ensemble.
Après cette introduction, la démonstration débute dans ce vignoble planté à 2,5 m entre les rangs. D’abord dans du merlot, puis dans le cabernet sauvignon. Le premier de ces cépages est encore peu développé. Les deux machines n’en font qu’une bouchée. L’affaire se corse dans le second.
Dans le cadre de la démonstration, les deux chauffeurs avancent lentement, environ 2,5 à 3 km/h, et ratent des agrafages. Avec chacune des deux machines, c’est le chauffeur, en cabine, qui décide du moment où poser une agrafe, en appuyant sur un bouton de son joystick. Dès lors, le percuteur entre en mouvement et les agrafes sont libérées du barillet. Mais les chauffeurs ne posent ici que deux agrafes entre les piquets, contre trois sur le merlot. Insuffisant pour bien maintenir la végétation.
Expérimenté, le chauffeur de la Provitis, salarié de Mathieu Amblevert et qui palisse 90 ha avec cet outil, change rapidement son mode de pilotage. Il se concentre plus, cherche les endroits clairs, et double voire triple les impulsions sur la commande pour s’assurer de poser au moins une agrafe. Sur un rang de 50 mètres, il s’arrête même à deux reprises pour agrafer ses ficelles. « Il aurait fallu relever ce cabernet sauvignon il y a une semaine et rogner juste derrière, admet Mathieu Amblevert. La vigne pousse très vite en ce moment, il y a beaucoup de végétation. »
Le chauffeur de la Clemens a cette fois plus de mal, alors qu’il était très régulier dans le merlot. Dans le cabernet sauvignon, certaines de ses impulsions n’aboutissent à aucun agrafage. Le plus souvent parce que la végétation est trop importante, ou parce que les fils ne sont pas assez resserrés. À une ou deux reprises, toutefois, alors que les fils étaient proches l’un de l’autre et la végétation pas trop abondante, le chauffeur a eu beau appuyer sur son bouton, l’agrafe ne s’est pas posée.
« La machine, de conception DMP, est pourtant éprouvée, indique Rémi Faure, responsable des ventes sud-ouest. Mais la végétation est très dense. » L’opération nécessite au final beaucoup de concentration, à la fois sur la conduite et sur l’agrafage. Surtout, il aurait fallu passer plus tôt afin d’éviter de se faire dépasser. Pour le coup, l’écimeuse de Clemens, en partie haute, avait de quoi faire ! Quant aux couteaux Provitis, installés pour l’occasion mais sans fourniture hydraulique suffisante, ils ne tournaient pas.
Sur le plan du relevage à proprement parler, les deux machines ont aussi fort à faire car des branches traînent au sol ou partent dans tous les sens. « Il y a eu beaucoup de vent, précise le viticulteur. C’est pour cela qu’il y a beaucoup de branches basses. D’habitude, on n’en a pas au niveau du sol. »
Provitis n’a aucun mal à relever ce défi supplémentaire. Ses bandes rugueuses sont bien réglées. Non seulement leur angle d’attaque est accentué, mais elles plongent bien en direction du sol, démarrent assez bas et présentent une torsion. Résultat : la machine n’épargne que quelques rameaux. Elle relève l’essentiel de la végétation et la dirige vers le tunnel, où les ficelles l’emprisonnent. « On aurait pu baisser encore un peu plus les bandes pour ne rien oublier », concède Florent Renaud, inspecteur commercial de la marque.
Du côté de Clemens, la machine est moins bien réglée. Elle démarre à 80-90 cm du sol, ce qui est trop haut. L’angle d’attaque des bandes est assez faible, et aucune torsion ne leur a été donnée alors que ce paramètre est réglable. « Nous avons réglé la machine pour le merlot, se défend la marque, nous n’avions pas prévu de la faire passer dans le cabernet sauvignon. » Résultat : il reste des branches non remontées après son passage.
En termes de rendement et d’autonomie, les machines se distinguent un peu. Chez Clemens, on relèvera environ 1,5 ha de vigne plantée en 2,5 m avec les quatre bobines de fil prêtes à être déroulées. Mais la réserve de 300 agrafes paraît faible. Côté Provitis, on aura de quoi relever 1,2 à 1,4 ha avec le plein de ficelle et d’agrafes, en fonction de la vitesse d’avancement. Côté prix, il faut compter 19 700 € pour la Provitis seule, et environ 29 500 € l’ensemble complet, avec mât, pompe et distribution hydraulique, adaptation et montage. Pour la machine DMP-Clemens, le constructeur n'a pas communiqué de prix.
Enfin, attention aux bandes : ce sont des pièces d’usure. « C’est notre troisième jeu en huit ans, à raison de 90 ha relevés deux fois par an », précise Mathieu Amblevert. Finalement, avec de bons réglages et des interventions bien calées, les deux machines peuvent donner entière satisfaction. Et relever le défi du relevage.
Pas de fil, pas de relevage. Pour Pellenc, présent ce 28 juin à Civrac-sur-Dordogne, impossible de relever quoi que ce soit. Car sa machine ne pose pas de ficelle mais relève les fils en place. Or le premier relevage avait déjà été effectué chez Mathieu Amblevert. Cette machine attrape les releveurs à l’aide de disques avant. Des « diabolos » les dirigent vers l’arrière, où des vis sans fin les montent à hauteur voulue. L’agrafeuse à vérin à gaz assemble les fils. Avec un rouleau de 1 500 agrafes, l’autonomie est de 1 à 1,5 ha. Le débit de chantier atteint 5 à 7 ha par jour. Le prix de la tête seule est de 23 000 €. Quant à Ero, prévu et attendu pour la démonstration, il a fait faux bond la veille. « Le coup de la panne, au dernier moment », commente la chambre d’Agriculture. Un déplacement mal ficelé pour cette machine à vis sans fin.