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Le bal des faux-culs secs

Par Alexandre Abellan Le 23 juin 2023
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Le bal des faux-culs secs
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aut-il que notre époque soit à ce point portée sur la polémique et l’hygiénisme pour gloser pendant des jours sur la descente d’un trait d’une bouteille de bière par le président de la République ? Dans les vestiaires de l’équipe victorieuse de Toulouse en finale du top XIV ce samedi 17 juin, le cul-sec d’une Corona par Emmanuel Macron devant les caméras a d’abord suscité les commentaires mi-blagueurs mi-décontenancés : ce verre de l’amitié tenant plus des excès d'un étudiant survolté en première année d'école de commerce que de la mesure qui sied au premier représentant de la Nation. Puis sont venues des critiques sur un exemple néfaste donné à la jeunesse, avec une accusation récurrente de promotion du binge drinking (ou alcoolisation ponctuelle importante). Quelle tartufferie !

Si le président avait vidé une canette de Coca, l’aurait-on accusé d’inciter à l’obésité infantile ? Si cela avait été une bouteille d’eau, aurait-il fait l’apologie du plastique à usage unique ? Mais c’est d’alcool qu’était rempli la bouteille, permettant de stigmatiser coûte que coûte toutes les boissons en contenant (qu’est-ce que cela aurait été avec un verre de vin…). Les tenants d’une pensée infantilisante ne sont visiblement pas à chercher parmi les plus jeunes. Tout est résumé dans ces dénégations : « on ne va pas jouer les ligues de vertu » indique Libération, qui « ne prétendra d’ailleurs pas qu’à Libération, il n’y ait jamais eu de jeux alcoolisés débiles » (sa rédaction produisant une rubrique de bons vivants dont les sélections sont on ne peut plus recommandable : Tu Mitonnes), « mais voilà, à Libé, on est pas présidents et les images d’Emmanuel Macron ne sont pas privées » ajoute le quotidien, assénant que « le binge-drinking est une menace pour la santé ».

Du binge-drinking en vidant une bouteille de bière ? La Haute Autorité de Santé définit l'alcoolisation ponctuelle excessive comme la consommation de 60 grammes d’alcool pur en une seule occasion : soit 10 demis de bière (25 cl à 10°.alc), 10 coupes de champagne ou vin tranquille (10 cl à 12°.alc), 10 verres de whisky (3 cl à 40°.alc)… Avec une bouteille de bière Corona à 35,5 cl à 4,5°.alc, il semble qu’il y ait de la marge avant de pouvoir parler d’incitation à la biture expresse. On se trouve d'ailleurs dans la limite de consommation quotidienne préconisée par Santé Publique France (« maximum 2 verres par jour et pas tous les jours »). Certes, le geste du cul-sec n’est pas celui le plus finaud en société, mais que celui qui ne s’est pas laissé emporté par l’allégresse d’un moment convivial jette la première bière. De cette polémique teintée d'hygiénisme, on retiendra qu'il devient tabou de parler d’allégresse de l’ivresse, le puritanisme l’ayant emporté. De quoi faire rire les philosophes antiques, dont le banquet de Platon passerait aujourd’hui pour une buverie innommable*…

Ayant marqué les esprits vignerons en début d’année, la campagne sur "la bonne santé sans trinquer" témoigne d’une volonté de dénormalisation des boissons alcoolisées en général et du vin en particulier. Quelles seront les prochaines étapes : l’adoption d’étiquettes affirmant un risque sanitaire comme en Irlande ? Un prix minimum comme en Écosse ? Si l’addiction à l’alcool est un fléau, les plus puritains en la matière sont clairement anglo-saxons : mais les créateurs du binge-drinking sauront-ils ainsi le résoudre ? On aurait plutôt envie de parier sur les civilisations méditerranéennes, celles qui prônent le temps du bon vin avec la bonne chère. Ne manque plus qu’une épiphanie aux pères la morale qui prospèrent actuellement, pour se rappeler que vivre sans plaisir est un choix qui ne regarde qu’eux. On peut leur souhaiter une révélation pareille à celle filmée dans le Tatoué (de Denys de La Patellière, sorti en 1968), quand Louis de Funès s’exclame entre un calvados et un Beaujolais : « c'est vrai, mais vous avez raison, je ne savais pas vivre ! Mais c'est bon ! C'est dangereux, mais c'est bon ! Regardez-moi ça ! »

 

* : On n'ose évoquer le président Pompidou avec ses apéros du lundi soir au whisky (le cabinet d’Emmanuel Macron prendrait un verre tous les jeudis soirs rapporte Politico, dans une mouvance plus team building, start-up nation oblige).

 

 

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Tous les commentaires (1)
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pradelle Le 23 juin 2023 à 16:42:39
Bel article! Nous sommes maintenant habitués à ce que tout fasse polémique... Merci pour votre travail @Vitisphere
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