h 55. Un calme absolu règne sur les coteaux de Saint-Émilion. Le soleil se lève à peine lorsque Kévin Canard, le responsable phytosanitaire du Château Canon, franchit les portes du bâtiment viticole pour préparer son dixième traitement de la saison. « Journée intense, annonce-t-il, en ce jeudi 15 juin. Nous avons déjà traité dimanche dernier. Avec les orages annoncés pour ce week-end, il faut absolument renouveler la protection contre le mildiou. Et avec la hausse des températures, nous devons traiter entre 6 h et 10 h si l’on veut éviter de brûler le feuillage avec le soufre. Nous allons étaler ce traitement sur deux jours pour ne pas intervenir après 10 h. »
En conversion vers l’agriculture biologique depuis deux ans, le Château Canon n’applique sur ses 43 hectares que du cuivre et du soufre. « Pour faire face à la pression cryptogamique, nous nous appuyons sur nos quatre pulvérisateurs et nos trois stations Phybiomatic, de Lamouroux, qui nous permettent de préparer la bouillie et de remplir les pulvés en une heure », argumente Kévin Canard.
Avant de rejoindre le laboratoire, il passe au vestiaire. Combinaison verte jetable de classe III, bottes blanches coquées, gant latex et masque de protection : seuls ses yeux restent visibles sous ses EPI. Puis il file à l’étage et pousse la porte du laboratoire. Face à lui, les trois cuves Phybiomatic, deux de 2000 litres et une de 1 000 litres.
« Ces cuves sont larges et basses. On y verse facilement des sacs de 25 kg de poudre, cela constitue un véritable confort de travail », affirme Kévin Canard. Il actionne un bouton « on », les écrans tactiles des cuves s’allument et un vrombissement se fait entendre. Les extracteurs qui aspirent les poussières au-dessus des mélangeurs viennent de démarrer.
Kevin Canard sélectionne le programme « remplissage ». « Tout est automatisé. Phase 1 : la cuve se remplit automatiquement d’un fond d’eau puis le brassage se met en route. Phase 2 : la cuve se remplit à moitié. » À ce moment-là, le responsable phyto introduit les fongicides. « Ce matin, on traite contre le mildiou sur les secteurs de Berliquet et de Matras : 1,6 l/ha de Champ Flo et 4 kg/ha de Microthiol », détaille-t-il.
Après avoir vidé le dernier bidon de Champ Flo, Kévin Canard les rince avec le rince-bidon présent dans la cuve puis la ferme. Pendant ce temps, il peut préparer sereinement la deuxième bouillie. « La première cuve est fermée, donc pas de risque de débordement ni d’éclaboussure. Et je n’ai pas besoin de surveiller le niveau : le remplissage s’arrêtera automatiquement à 2000 l. Je peux me concentrer sur la deuxième bouillie, c’est très appréciable », souligne-t-il.
Stéphane Bonnasse, directeur technique du château, ajoute qu’au-delà d’assurer la sécurité des opérateurs, les trois Phybiomatic permettent de gagner du temps. « En cas d’urgence, nous devons être capables de traiter tout le vignoble en 6 heures. Avant, nous n’avions qu’un seul mélangeur de 1 000 litres et les tracteurs attendaient les uns derrière les autres que la bouillie soit prête. À présent, Kévin peut préparer à lui seul trois bouillies en même temps. Et le mélange est beaucoup plus homogène ; les buses se bouchent moins fréquemment. »
Alors que Kévin Canard déverse le dernier kilo de Microthiol dans le second mélangeur, un voyant passe au vert sur la console du premier. « Cuve prête », indique l’écran, après 30 minutes de brassage.
6 h 00. Du haut de son laboratoire, le responsable phytosanitaire guette les trois Tecnoma harnachés de leur Precijet et le Frema équipé de son Berthoud. Les voici qui arrivent. Il redescend au rez-de-chaussée, salue les tractoristes et attaque le remplissage des deux premiers pulvés. « Avec Phybiomatic, nous avons deux potences reliées aux trois mélangeurs. Cela permet de remplir deux cuves en même temps : un gain de temps précieux », apprécie-t-il.
Perché sur son Tecnoma, Aymeric Bouclier, tractoriste, insère le pistolet de la potence dans sa cuve et attend que Kévin Canard paramètre le volume de bouillie à y envoyer. Pour ce premier chargement de la journée, ce sera 700 l. « À 680 l, explique Kevin, le remplissage ralentit puis s’arrête. Lorsqu’Aymeric constate que plus rien ne s’écoule, j’appuie sur le bouton “chasse à l’air”, et les tuyaux se vident automatiquement dans la cuve du pulvé. Aucune perte de produit, ni d’eau dans les tuyaux. »
Stéphane Bonnasse apprécie également la fonction « retour cuve » de la station Phybiomatic. « On n’est jamais à l’abri d’un orage violent ou d’une panne qui nous oblige à stopper le traitement, confie-t-il. Dans ce cas, on peut remettre la préparation dans le mélangeur, laisser tourner l’agitation toute une nuit et repousser le traitement au lendemain. »
6 h 50. Les quatre pulvés sont partis. Kévin Canard, s’attelle au nettoyage des trois mélangeurs. « Rien de plus simple, s’enthousiasme-t-il. J’appuie sur la touche rinçage de l’écran, et le cycle de lavage se lance automatiquement. L’eau est diffusée via la boule placée en haut de la cuve, puis évacuée vers la cuve à effluents située sous le bâtiment. » Un coup de jet d’eau sur l’extérieur des cuves et le sol carrelé plus tard, le laboratoire est propre, prêt pour la seconde partie du dixième traitement, prévue le lendemain matin.
Au château Canon, le laboratoire de préparation des bouillies se trouve à l’étage du hangar viticole. Le local phyto étant au rez-de-chaussée, les produits y sont amenés par un monte-charge. Depuis une fenêtre, l’opérateur qui prépare les bouillies voit arriver les tracteurs qui viennent remplir leur pulvérisateur. Lorsqu’ils sont en place, il descend pour aller mettre en route le transfert des bouillies en coordination avec les tractoristes.