oncomitamment à la création de la task force ministérielle d’assistance aux entreprises vigneronnes en difficulté annoncée en mai, le président des Vignerons indépendants (V.I) de France Jean-Marie Fabre confirmait dans le même temps l’aboutissement de l’enquête menée auprès des adhérents de sa fédération concernant leurs besoins pour l’instauration de prêts relais bonifiés. Cette proposition de dispositif, portée depuis de longs mois par les V.I, offrirait en effet un étalement de leur dette aux entreprises viticoles ayant souscrit à un prêt garanti par l’État (PGE) (dont la prolongation du remboursement est impossible au regard de la réglementation européenne).
Transmis la semaine dernière au ministre de l’agriculture, les résultats de cette enquête « permettent de calibrer les besoins réels de la filière, et confirment l’intérêt d’un dispositif que le président de la République avait lui-même qualifié d’opportun lors du dernier salon de l’agriculture », appuie Jean-Marie Fabre. Alors que trois types d’entreprises ont pu être catégorisées dans cette restitution, 360 d’entre elles, environ un tiers des répondants à l’enquête, se sont déclarées en besoin de ce dispositif de prêts relais bonifiés, en raison de difficultés financières pour amortir et rembourser les PGE. « Nous savons qu’environ la moitié des entreprises de modèle indépendant adhèrent à notre fédération. On en déduit par extrapolation que ce sont donc 800 à 900 entreprises au total en besoin de prêts bonifiés », poursuit Jean-Marie Fabre.
Le président de la fédération des V.I explique également que ces entreprises se distinguent par des caractéristiques communes. « Ce sont des exploitations plus grandes, d’une surface supérieure à 36 ha, contre 25 ha pour la moyenne nationale chez les V.I. Si les plus petites entreprises ont pu faire preuve de plus de réactivité et agilité pour repartir sur les marchés, nous pouvons imaginer que ces celles de taille plus importante ont fait face à des délais de reprise commerciale plus marqués, avec des marchés récurrents ou export plus longs à se remettre en route », reprend le vigneron de Fitou. Devant faire face à plus de charges fixes que la moyenne, ces entreprises ont de surcroît été plus touchées que la moyenne par les aléas climatiques successifs. « En 2021 et 2022, 70% des entreprises de l’ensemble du réseau V.I ont été touchées par les aléas, alors qu’au sein de cette catégorie, ce sont 88% d’entre elles qui ont subi des dégâts climatiques, une explication complémentaire à leurs difficultés de trésorerie », affine Jean-Marie Fabre.
Le président des V.I insiste enfin sur la capacité à générer de l’emploi de ces entreprises plus grandes, « qui salarient en moyenne 6 permanents et 13 occasionnels ». D’où son soulagement de voir le ministre de l’agriculture s’inscrire dans la lignée présidentielle et envoyer des signaux positifs pour la mise en œuvre du dispositif de prêts relais bonifiés. « Nous espérons que le ministère démarre l’expertise du coût financier du dispositif fin juin-début juillet, pour que celui-ci soit opérationnel au 3ème trimestre », lance Jean-Marie Fabre. La différence entre le taux de 1,5% des PGE et le taux directeur actuel avoisinant les 2,5% conduit la fédération V.I à une estimation du coût annuel de la mesure « entre 500 000 et 1 million € par an pour l’Etat ».
Les deux autres types d’entreprises ayant fait appel au PGE entre les seconds semestres 2020 et 2021 révèlent des typologies différentes. « Une 1ère catégorie a souscrit aux PGE en anticipation de baisses de trésorerie, mais ces exploitations ont pu assez rapidement les rembourser une fois que les marchés ont repris. Une 2ème catégorie a trouvé des solutions de remboursement malgré les difficultés, recourant notamment à l’en-cours bancaire, avec néanmoins des taux de remboursement supérieurs à ceux du PGE », détaille Jean-Marie Fabre. Ce qui a engendré un coût supplémentaire pour ces entreprises. Sur 1,4 milliard € de PGE contracté par le secteur viticole, 980 millions € ont été engagés par des entreprises du modèle indépendant. Le secteur coopératif occupe le montant restant et ne sera pas concerné par le dispositif de prêt bonifié. Si le besoin est défini, un dispositif différent devra être mis sur pied pour les entreprises du secteur coopératif.