e la sobriété à la pénurie, l’énergie reste le sujet inévitable de cet automne. Le gros des travaux à la vigne s’étant achevé avec la saison viticole, un manque de gazole dans les propriétés inquiète peu (d’autant plus s’il y a des réserves dans les cuves). Mais alors que l’on ressent déjà des enjeux ponctuels sur la venue de salariés dans les propriétés (ainsi que des fournisseurs, des livreurs, des consultants…), le vignoble commence à percevoir de premiers signaux faibles sur la réduction de ses ventes. Un coup de mou perceptible au niveau des visites de consommateurs dans les caveaux, qui peut faire craindre une moindre affluence des acheteurs à l’occasion des salons de vente et autres portes ouvertes de la fin d’année.
Entre le plein d’essence et des sens par la dégustation des vins, les consommateurs doivent arbitrer avec un enjeu exacerbé de pouvoir d’achat. D’autant plus que la future hausse des prix n’augure pas de relâchement (avec la baisse des aides publiques). Le lâcher prise des fêtes de fin d’année étant encore loin, il est à espérer que les offres des foires aux vins mobilisent les consommateurs. Et évitent la panne sèche aux écoulements de vin. Au-delà du marché français, la question des tensions sur les transporteurs reste entière, en termes de prix et de disponibilités, de la route jusqu’aux containers... Pas de quoi rassurer des vignerons et négociants en mal d'assurance. Présente depuis des années désormais, l'incertitude reste la seule perspective certaine pour l'avenir.
Cet automne, toute la filière vin est un équilibriste aux yeux bandés. Des entreprises qui marchent à celles qui souffrent, nul ne sait ce qui l’attend devant, mais avançant avec le poids de l’inflation subie, des coûts de production/distribution, et le poids de la maîtrise des prix de vente, pour ne pas sortir des marchés soumis au risque de récession. Si la sobriété est une valeur saine, prônée par la consommation modérée de vin, elle devient pesante quand elle n’est pas choisie mais subie. Car « la sobriété est l'amour de la santé, ou l'impuissance de manger beaucoup » écrit La Rochefoucauld, dans ses Réflexions ou sentences et maximes morales (1664). La diète est aujourd’hui un enjeu de pouvoir d’achat, et donc une impuissance de vendre.