usqu’ici, tout va bien. Si les vignobles connaissent leur lot de file d’attente aux stations-services cet automne avec le blocage de raffineries de pétrole, la crainte de pénurie n’affecte pas le moral vigneron. Dans le pays nantais, « il n’y a pas de situation critique aujourd’hui » évacue François Robin, le délégué à la communication de la Fédération des vins de Nantes. Dans le Centre-Loire, « notre région n’est pas hyper impactée. C’est une période de l’année assez calme par rapport à l’utilisation de matériel agricole. Aujourd’hui l’activité de travail dans les vignes n’a pas besoin d’autant de carburant comme dans la saison » rapporte Christine Laloue, la présidente de l’Union Viticole Sancerroise, pour qui l’enjeu reste la durée de ces tensions : « si ça dure, peut-être que cela impactera les livraisons vins. Mais on essaie de ne pas penser au pire et d’y aller étape par étape. Nous avons déjà une belle récolte dans la cave, avec un marché dynamique. »
En vallée du Rhône, « il n'y a pas d'alerte sur le secteur pour l'approvisionnement en GNR. Il y a des stocks disponibles, les cuves se remplissent encore » témoigne Denis Guthmuller, le président du Syndicat Général des Vignerons des Côtes du Rhône. « La problématique est plus le ralentissement des flux de matières sèches et de marchandises. L'impact est difficile à quantifier. On ne peut en être qu'au début si ça dure longtemps » esquisse le vigneron bio. « Pour le moment, la pénurie n’a aucun impact sur les expéditions auprès de nos partenaires transporteurs » rassure Michel Duquesne, le responsable réseau et opérations du logisticien MBE France (Mail Boxes Etc. France, qui développe une offre d’envoi de bouteilles dans le vignoble).
En Champagne alors que le mouvement social bloquant les raffineries dure, « nous commençons à être un peu moins serein. Il n’y a plus de travaux de la vigne, mais le risque concerne les transporteurs » estime Maxime Toubart, le président du Syndicat Général des Vignerons de Champagne (SGV). « La situation est très compliquée. Nous limitons à 2 000 litres par client les distributions. Nous n'arrivons pas à avoir suffisament d'approvisionnement » rapporte Karine Cheval, la directrice commerciale du distributeur GED Energies, basé aux Petites-Loges (Marne). Pointant qu'il faudrait 10 à 15 jours pour reprendre une activité normale après le déblocage des raffineries, elle évoque des réservations actuellement passées sans délai ni tarif, mais avec des augmentations de 15 à 20 % du prix du gazole depuis septembre dernier. Comme le souligne Maxime Toubart : « le gazole est une chose, la multiplication de la facture d’énergie en est une autre (un vigneron a vu sa facture d’électricité multipliée par 4). »


En Provence, c’est le baromètre de la vente locale qui témoigne de cette crise pétrolière : « on sent que les gens ne prennent pas la voiture pour aller acheter du vin au caveau. Ça a un impact sur l’activité économique, personne ne sera épargné » prévient Éric Pastorino, le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Provence, qui pointe l'enjeu de l'augmentation de tous les coûts de production, alors que les marchés vont être de plus en plus contraints par la situation économique mondiale. En Gascogne, « pour le moment, nous ne sommes pas trop embêtés. Ça fait un peu la queue par moment, avec des achats de sureté. Mais il n’y a pas de souci dans le Gers » indique Vincent Piquemal, le président des vignerons indépendants d’Occitanie. S'il y a des limitations aux livraisons par certains distributeurs auprès de leurs clients vignerons, Vincent Piquemal note que « les prix [du GNR] augmentent, mais on a été habitué à des prix plus chers par le passé ». Le gazole a augmenté de 180 % de janvier 2021 à aujourd’hui indique Frédéric Rouanet, le président du Syndicat des Vignerons de l’Aude (précisant qu’il n’y a pas de problème d’approvisionnement à date dans l’Aude). « S’il n’y avait que l’essence, ça irait. Depuis le début de la guerre en Ukraine, nous avons prix +800 à +1 000 €/ha de charges avec les engrais, les piquets, les produits phytos… C’est très compliqué » pointe le vigneron languedocien, qui appelle l’État à soutenir les demandes du vignoble.
Jusqu’ici, tout ne va pas si bien.