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hème cher au maire de Bordeaux, Pierre Hurmic, la végétalisation de la capitale girondine ne cesse d’alimenter les débats dès lors qu’elle touche les places bordelaises. Après « l’arbre mort de la place Pey-Berland », ou polémique du sapin de noël de la rentrée 2020, le maire écologiste vise l’« obélisque laid » de la place de la Victoire. Soit la Colonne de la Vigne et du Vin, inaugurée le 17 juin 2005 par la précédente majorité municipale (ayant pour maire Alain Juppé), qui avait confié la réalisation d’un monument représentant la place centrale de la production vitivinicole dans l’écosystème bordelais à l’artiste tchèque Ivan Théimer. Avec six blocs de marbre rouge et un chapiteau pesant 50 tonnes, cette colonne torsadée multiplie les bronzes symbolisant la culture de la vigne et du vin (de l’antique Dionysos aux réclames modernes) et se voit accompagnée de deux statues de tortues (dont les becs portent des raisins et les carapaces reprennent les appellations bordelaise). Tout un symbole, qui n’a pas l’heur de plaire au maire écologiste.
Lors d’une délibération sur les plantations d’arbres du conseil municipal du 4 octobre dernier*, Pierre Hurmic répond aux critiques de son opposition sur l’efficacité de ses choix actuels par un tacle sur le passé : « je ne sais pas l’obélisque que vous aviez planté, et qui lui avait coûté une petite fortune, fait davantage d’ombre sur la place de la Victoire. A l’époque, vous auriez mis le prix de l’obélisque pour végétaliser la place, vous auriez une véritable forêt urbaine. Vous aviez fait à l’époque d’autres choix fort coûteux. »
À l’occasion d’une délibération sur les subventions culturelles, le conseiller municipal de l’opposition Fabien Robert (précédemment maire-adjoint dédié à la culture) défend l’œuvre d’Ivan Théimer en particulier et la création contemporaine en général : « vous ne pouvez pas dire ça aux artistes. Les œuvres d’art coûtent. Ceux qui disent que l’art coûte trop cher et qui l’opposent à la végétalisation, au transport, ne sont pas des élus que vous et moi avons l’habitude de fréquenter normalement. Vraiment, je vous demande de retirer ou de modérer ce que vous avez dit. » En réponse, Pierre Hurmic confirme sa position : « à l’inverse de vous, moi je revendique une liberté totale d’appréciation des œuvres. Ça peut être un grand artiste, comme vous le dites, je trouve cet obélisque laid, déplacé et totalement étranger au patrimoine bordelais. Je l’avais dit à l’époque et je revendique cette liberté. Peut-être n’avez-vous pas cette liberté de parole monsieur Robert. Je confirme, je trouve cette œuvre particulièrement laide et inadapté au site où vous l’avez planté. »
Dans un communiqué, les groupes d’opposition municipale Bordeaux Ensemble (Les Républicains) et Renouveaux Bordeaux (Renaissance) estiment qu’« en jetant l’opprobre sur une œuvre d’art et sur son créateur, Pierre Hurmic ravive inutilement la polémique autour de la place l’art contemporain, alors même que cette œuvre s'est totalement intégrée dans le tissu urbain. » Et d’ajouter que « si chaque citoyen a le droit de porter un regard critique sur l’art, les élus ont le devoir de protéger la liberté de création des artistes et non de choisir, selon leurs goûts, ce qui est beau et ce qui ne l’est pas. »
À noter que dans le récent Guide Bordeaux balade sur les traces du vin dans la ville publié par l’Office du tourisme et des congrès de Bordeaux Métropole, une étape s’arrête à la place de la Victoire, mais pour honorer le cep de vigne historique que l’on y trouve (datant du XVIIIème siècle et produisant encore du vin). Sans évoquer la colonne, le guide précise qu’« au centre de la place, prenez le temps de caresser la tête des tortues de bronze. Elles rendent hommage à la vigne bordelaise avec ses différents cépages représentés sur leur carapace. »
Sollicitée par Vitisphere, la mairie précise qu'il n'y a pas actuellement de projets de modification de l’aménagement de la place de la Victoire (si ce n'est l’installation récente de pergolas végétalisées, le sous sol ne permettant pas de plantations avec son parking et ses réseaux).
* : Ayant duré sept heures, le conseil municipal est visionnable en ligne. La première déclaration de Pierre Hurmic se trouve à 4 heures et 30 minutes, la réponse de Fabien Robert à 5h54 et la réplique de Pierre Hurmic à 5h56.
La colonne et ses deux tortues ce début octobre à Bordeaux.
