menu burger
Lire la vigne en epaper Magazine
Accueil / Viticulture / Vignerons, "il faut être conscient des limites de la lutte antigrêle"
Vignerons, "il faut être conscient des limites de la lutte antigrêle"
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin

Dominique Fédieu
Vignerons, "il faut être conscient des limites de la lutte antigrêle"

Quand la grêle tombe sur le vignoble de Bordeaux, les critiques ne manquent pas de s’abattre en suivant sur l’Association Départementale d'Étude et de Lutte contre les Fléaux Atmosphériques de la Gironde (ADELFA 33). Son président, Dominique Fédieu, fait le point sur les modalités de la diffusion par le sol d'iodure d'argent à partir de générateurs. Un système de prévention qui atteint ses limites actuellement, mais présente des marges de progrès.
Par Alexandre Abellan Le 22 juin 2022
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin
Vignerons,
Viticulteur dans le Médoc, Dominique Fédieu est aussi le président de l’Association Nationale d'Étude et de Lutte contre les Fléaux Atmosphériques (ANELFA). - crédit photo : Sébastien Ladeuix
C
omment fonctionne le système de prévention de la grêle sur le vignoble de Gironde ?

Dominique Fédieu : Il existe plusieurs types de générateurs antigrêle. Il faut ensemencer les nuages suffisamment tôt à l'iodure d'argent pour que l’effet de multiplication des noyaux glaçogènes ait un effet maximal. On allume au moins 3 heures avant l’épisode pour avoir un fonctionnement suffisant. Le rôle du prévisionniste est important : nous faisons appel à Keraunos. Dès le déclenchement d’une alerte, les bénévoles sont alertés sur le terrain pour pouvoir allumer les générateurs (il y en a trois par générateur pour des astreintes roulantes). Nous prévoyons une heure de battement. Pour un orage à partir de 21 heures, on lance l’alerte pour allumer les générateurs à partir de 17 h.

 

Quelles sont les limites de ce système ?

Il y a deux écueils. Le réseau n’a pas la même densité partout. La maille est plus lâche à l’ouest et au sud-ouest du département. Nous avons des difficultés à trouver des points de chute et des bénévoles. Nous avions 110 générateurs en 2016 (lors de l’audit demandé par le vignoble bordelais), désormais nous en avons 138 et pourrait y en avoir une quarantaine de plus pour que l’on assure une continuité du maillage (au moins tous les 10 km, au mieux tous les 10 km). Nous avons un trou sur la métropole [de Bordeaux] et sur des communes de grandes cultures ou de forêts. Les ruptures permettent aux orages de se recharger : c’est un vrai problème.

L’autre écueil est que l’on ne fait qu’amoindrir les effets de la grêle, de 50 à 70 % selon les cas. Ça peut annuler une petite grêle, mais ça ne peut que réduire les grêlons d’un évènement plus important. Selon les cas, des vents violents peuvent accentuer la grêle. C’est la limite du système.

 

Quelles sont les raisons expliquant les forts dégâts constatés dans le vignoble après l’orage de ce 20 juin ?

Aujourd’hui, il est trop tôt pour le dire. L’orage s’est formé sur le golfe de Gascogne, avec de la grêle sur une large bande de communes du littoral. En progressant, cette bande s’est rétrécie. À chaque générateur se trouve un grêlimètre pour mesurer les impacts et les comparer avec les prévisions de tailles de grêlons pour savoir si le phénomène a été atténué. Ce qui est inquiétant, ce sont les occurrences de plus en plus violentes. L’an passé, un travail a été réalisé sur la question du changement climatique et de la grêle. La question n’a pas été tranchée. Mais il semble qu’il n’y aura pas forcément plus de grêles, mais avec une violence accrue.

 

Il y a de véritables chapelles dans le vignoble sur la lutte antigrêle : ceux qui croient aux canons, ceux qui s’en moquent, ceux qui préfèrent les ballons…

C’est un sujet clivant. Mais aucun moyen de prévention de la grêle ne permet d’annuler tout effet de la grêle.  Même le système concurrent aux générateurs ne prend pas d’engagement de résultats. Et les filets antigrêles ne tiennent pas le choc dans certains cas : des arboriculteurs du Marmandais m’ont rapporté que des amarres se sont détachées et que de vieux filets se sont déchirés face à des phénomènes violents. C’est difficile à entendre, mais ce n’est pas différent de la protection [phyto] des cultures : aucun vigneron n’éradique à 100 % le mildiou, l’oïdium, la flavescence dorée… C’est la même chose pour les systèmes antigel : en dessous d’une certaine température, on ne peut plus rien faire dans certaines conditions. On voudrait une efficacité à 100 %, mais il faut être conscient des limites de la lutte antigrêle.

Pour autant, faut-il ne rien avoir comme système de protection ? Je suis prêt à poser la question. Ça ne me pose pas de souci, je n’ai pas d’intérêts financiers dans ces générateurs. Je vois les effets dévastateurs de la grêle, avec des vignes encore pelées, des vignerons qui ne récolteront rien cette année et qui auront des impacts l’an prochain selon les bois qui sont touchés. Derrière les interrogations, j’entends "à quoi bon".

 

Quels sont vos prochains projets ?

Nous sommes une petite association, avec un budget annuel de 300 000 €. Lors de notre dernière assemblée générale, la Fédération des Grands Vins de Bordeaux (FGVB) a sollicité un plan de déploiement et de modernisation du système pour le faire évoluer. Nous avons réalisé de premiers tests de prototype semiautomatisé qui ne sont pas satisfaisants. Il y a encore du travail, mais cela permettrait de faciliter l’implantation de la prévention dans des zones moins peuplées.

Notre cotisation est à un euro par hectare de vignoble. Ce qui est peu par rapport aux enjeux. Il faut mobiliser tout le monde : communes, assureurs, viticulteurs… La protection des biens et services est aussi un sujet pour l’État, j’ai interpelé le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, lors de sa venue à Bordeaux à ce sujet. Nous avons aussi besoin de recherche, qui est à l’arrêt.

 

Vous n'êtes pas encore abonné ?

Accédez à l’intégralité des articles Vitisphere - La Vigne et suivez les actualités réglementaires et commerciales.
Profitez dès maintenant de notre offre : le premier mois pour seulement 1 € !

Je m'abonne pour 1€
Partage Twitter facebook linkedin
Tous les commentaires (2)
Le dépôt de commentaire est réservé aux titulaires d'un compte.
Rejoignez notre communauté en créant votre compte.
Vous avez un compte ? Connectez vous
michu Le 22 juin 2022 à 22:12:11
Toujours les memes excuses depuis 20 ans et à chaque fois les viticulteurs sont floués et en plus il se permet de critiquer des filets qui fonctionnent tout le temps ! quelle indignité !
Signaler ce contenu comme inapproprié
MARIE michel Le 22 juin 2022 à 13:57:32
Je suis alfa 32, le principe de cette lutte est que le maillage du territoire doit être total et que tous les générateurs soient allumés en temps et en heure. l'intervention de ces générateurs est très efficace à condition que les générateurs soient positionnés dans le vent porteur et en amont du territoire a protéger
Signaler ce contenu comme inapproprié
vitijob.com, emploi vigne et vin
Gironde - CDD Château de La Rivière
Vaucluse - CDI PUISSANCE CAP
La lettre de la Filière
Chaque vendredi, recevez gratuitement l'essentiel de l'actualité de la planète vin.
Inscrivez-vous
Votre email professionnel est utilisé par Vitisphere et les sociétés de son groupe NGPA pour vous adresser ses newsletters et les communications de ses partenaires commerciaux. Vous pouvez vous opposer à cette communication pour nos partenaires en cliquant ici . Consultez notre politique de confidentialité pour en savoir plus sur la gestion de vos données et vos droits. Notre service client est à votre disposition par mail serviceclients@ngpa.fr.
Viticulture
© Vitisphere 2025 -- Tout droit réservé