Australie

De l’impérieuse nécessité de diversifier les marchés export de ses vins

 Si nous ne faisons pas d’efforts pour trouver d’autres marchés ou faire les choses différemment, nous prévoyons que seul 60 % du vin destiné à la Chine trouvera sa place sur nos marchés existants d'ici 2025 ». La mise en garde du Dr Jared Greenville, directeur du service australien des statistiques agricoles (Abares), est sévère et sans équivoque : « Sans développer les marchés existants ou en dénicher de nouveaux, la valeur des exportations de vin australien en 2025 devrait baisser de 480 millions de dollars [322 M€]. Le coût total des mesures antidumping pourrait être d'au moins 2,4 milliards de dollars [1,6 milliards €] sur une période de cinq ans ».

L’impact de la perte du marché chinois ne s’est pas fait attendre : hormis des prix en chute libre, une quantité inestimable de raisins a été laissée sur pied cette année, faute de rentabilité et de marchés. Les exportations sur les douze mois se terminant en mars 2022 ont régressé de 26% en valeur et de 13% en volume, la faute à la Chine mais pas que. Les exportateurs sont également confrontés à des problèmes logistiques, aggravés par la situation géographique de l’Australie, et au contrecoup de la constitution de réserves pendant le Covid-19 sur des marchés comme le Royaume-Uni (-6% en volume) et les Etats-Unis (-5% en volume).

L’Asie en ligne de mire

Voilà pour l’état des lieux. Quant au remède, Wine Australia et la filière australienne comptent beaucoup sur les autres pays asiatiques pour remonter la pente. En dehors des destinations classiques que sont les pays anglo-saxons, l’Allemagne, les pays nordiques et les Pays-Bas, l’accent sera largement mis sur des pays comme la Corée du Sud, Taiwan, la Thaïlande, le Vietnam, l’Indonésie et le Japon pour développer les exportations. « Étant donné qu'environ 60 % du vin australien est exporté, l'intensification et la diversification des marchés est une priorité essentielle pour Wine Australia. Nous travaillons sur plusieurs supports pour y parvenir, de la connaissance des marchés au marketing et à l’accès au marché », explique Laura Jewell. Covid oblige, Wine Australia a également développé une plateforme numérique – Australian Wine CONNECT – pour permettre aux exportateurs de continuer à dialoguer avec les distributeurs et les détaillants. « Sur la plateforme, nous avons organisé des tables rondes avec des leaders d'opinion internationaux, des dégustations virtuelles avec des vignerons australiens et des séances pédagogiques avec l'équipe de Wine Australia. Depuis son lancement en avril 2021, plus de 40 conversations et dégustations CONNECT ont eu lieu sur la plateforme, touchant plus de 8 000 professionnels ». La reprise des événements physiques tombe à point nommé pour la filière australienne, qui sera présente en nombre à l’occasion de la London Wine Fair cette semaine, avec un pavillon générique.

Développer une image identitaire

Parmi les autres axes stratégiques, le développement durable figure en très bonne place. L’initiative « Sustainable Winegrowing Australia », lancée en juillet 2019, compte désormais plus de 38 000 hectares certifiés, en hausse de 7,5% en 2021, pour 568 exploitations membres (+14%). « Le secteur vitivinicole australien s’est fixé comme objectif d’atteindre zéro émissions de carbone d’ici 2050. Le programme Sustainable Winegrowing Australia jouera un rôle important dans le calcul des émissions de carbone », prédit Laura Jewell. La plateforme de marque « Australian Wine Made our Way », lancée en 2018, doit également servir à valoriser les vins australiens à l’international : « Les piliers de notre marque mettent en valeur le climat et les paysages emblématiques de l'Australie et son univers vinicole farouchement indépendant. Ils animent les histoires de notre communauté dynamique de viticulteurs et de vignerons ».

Pour cela, la filière australienne bénéficie d’un soutien de l’Etat : une subvention de 1,8 million de dollars australiens (soit 1,2 million €) a été accordée pour développer la demande et réduire les obstacles au commerce sur des marchés émergents et nouveaux. A cela s’ajoute une subvention de 989 000 AUD (663 000 €) pour créer une plateforme d'indicateurs en ligne des prix des raisins de cuve et collaborer avec ABARES pour publier des prévisions indépendantes des prix des raisins de cuve afin de permettre aux producteurs de mieux planifier leur avenir. Tout un programme…