oi plutôt méconnue, à la fois par les exportateurs et les importateurs, la Craft Beverage Modernisation Act vise à mettre les gros opérateurs et les petites entités sur un pied d’égalité en offrant des ristournes fiscales à ces dernières. « Cette loi, à l’origine sollicitée par les brasseurs artisanaux, est entrée en vigueur au 1er janvier 2018. Personne ne s’est douté qu’elle aurait un impact aussi important sur le secteur », explique, lors du salon ProWein, Alison Leavitt, directrice de la Wine & Spirits Shippers Association, qui se charge de faciliter le transport des vins et spiritueux pour ses quelque 700 membres.
Jusqu’à présent, la loi avait un caractère provisoire qui nuisait à son efficacité. Les professionnels américains, dont la WSSA, ont fait pression sur les pouvoirs publics pour qu’elle devienne pérenne, requête désormais acceptée mais avec quelques modifications majeures.
Dès le 1er janvier 2023, les importateurs devront verser les taxes dues en amont pour ensuite en demander le remboursement. Par ailleurs, le dispositif ne sera plus sous la tutelle des douanes mais sera géré par le bureau américain des taxes sur l'alcool et le tabac (TTB). Celui-ci est en train de créer deux modules de gestion, l’une destinée aux fournisseurs étrangers, l’autre aux importateurs. Concrètement, pour bénéficier de l’avantage fiscal, les exportateurs doivent rédiger un courrier type sous la forme d’une lettre d’affection, attribuant la ristourne à leur(s) importateur (s). « C’est le fournisseur étranger qui décide à qui attribuer les plus grosses sommes, sachant qu’en général on choisit son principal importateur ». Les montants sont dégressifs selon le volume de vins et spiritueux importé. A titre d’exemple, pour le vin, la ristourne s’élève à 1$ par gallon (3,79 litres) pour les premiers 30 000 gallons (113 700 litres). « Les économies réalisées sur les spiritueux sont très importantes », explique Alison Leavitt. « Sur un conteneur, elles représentent 36 000 $ ».
Les changements actés pour début 2023 ne modifieront pas les montants prévus, uniquement le système d’enregistrement auprès du TTB. « Il y a une forte probabilité pour que les deux modules en cours de préparation ne soient pas prêtes en début d’année prochaine, mais de toute façon les déclarations ne se feront qu’à partir de la fin du premier trimestre ». D’ici là, la WSSA continuera à sensibiliser les différents acteurs de la chaîne d’approvisionnement à l’existence de cet avantage fiscal. « Au moins 25 % des importateurs ne sont pas au courant de cette possibilité. Certains pensent que c’est trop compliqué et même des courtiers en douane ne veulent pas forcément s’en donner la peine. Nous devons carrément leur mâcher le travail ! »
Et pourtant, les retombées sont évidentes, a fortiori dans un contexte de montée en flèche des prix. « Il manque encore beaucoup de créativité avec les sommes d’argent récupérées. Elles pourraient être investies dans des opérations de marketing, par exemple. Cet allègement fiscal pourrait même encourager des opérateurs américains à délocaliser la production des vins destinés à leur marque pour pouvoir en bénéficier. Ou bien les bénéfices pourraient tout simplement être partagés par les deux parties ». Alison Leavitt y voit même un autre avantage non pécuniaire : « Pour les producteurs qui la connaissent, la CBMA peut les aider à pénétrer le marché américain. Elle donne un avantage certain aux producteurs étrangers. Tout le monde devrait en connaître l’existence, nous devons porter ce message haut et fort ».