e classement Saint-Émilion quittera-t-il un jour les couloirs de la justice administrative ? C’est ce qu’espèrent ses bénéficiaires du Conseil des Vins de Saint-Émilion et son organisateur à l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) à la publication de trois arrêts de la quatrième chambre de la cour d’appel administrative de Bordeaux validant l’édition 2012 malgré les poursuites de trois crus non-classés, les châteaux Croque Michotte, Corbin Michotte et la-Tour-Pin-Figeac.
Il y a dix ans, ces « trois propriétés non retenues avaient attaqué le classement pour en demander l’annulation. Le Tribunal Administratif le 17 décembre 2015 puis la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux le 12 avril 2019 avaient déjà validé l’ensemble de la procédure et rejeté les requêtes de ces trois châteaux » indique un communiqué du Conseil des Vins de Saint-Émilion. « Le 12 février 2021, le Conseil d’État, sans remettre en question le classement de 2012 et sans aborder le fond du litige, a annulé les décisions de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, et renvoyé l’affaire devant celle-ci. Le 15 février 2022, le rapporteur public a proposé le rejet des trois requêtes des trois châteaux par la Cour administrative d’appel de Bordeaux. Ce jour, par trois arrêts particulièrement motivés, la Cour administrative d’appel de Bordeaux rejette les trois requêtes » complète un communiqué de l’INAO.


Se réjouissant de la validation du cadre réglementaire du classement, le conseil de Saint-Émilion et l’INAO soulignent que les trois châteaux plaignants peuvent déposer un pourvoi. Ce qu’elles vont faire, comme l’indique à Vitisphere leur avocat, maître Éric Morain : « nous irons évidemment devant le Conseil d'Etat. Une fois de plus. » Pour l’avocat parisien, la motivation du jugement de la cour d’appel est « totalement incompréhensible et tordant la réalité des rôles de Messieurs de Boüard et Castéja : il fallait manifestement sauver le classement à tout prix, y compris au prix d'une appréciation partiale des faits pourtant constatés de manière définitive par le juge pénal. »
Siégeant à l’INAO lors de la mise en place du classement de 2012 tout en ayant des propriétés candidates, Hubert de Boüard et Philippe Castéja ont respectivement été condamné à 60 000 € d’amendes et relaxé de toute poursuite pour « prise illégale d’intérêts » par le tribunal judiciaire de Bordeaux ce 25 octobre 2021. Dans son arrêt du 22 mars 2022, la cour d’appel indique que « le jugement du tribunal correctionnel précise que monsieur de Boüard de Laforest n’était pas poursuivi pour trafic d’influence, mais pour prise illégale d’intérêts, qu’ainsi le tribunal n’avait pas à rechercher s’il avait été ou non avantagé ».
Reste pour l'INAO et le conseil de Saint-Émilion que la jurisprudence reste stable depuis dix ans devant la justice administrative. Avec dans ce dernier jugement une validation de la procédure mise en place. Ainsi, la juridiction balaie les demandes des trois plaignants en notant que le château Croque-Michotte n'apporte pas la preuve de son investissement dans un système de traitement des effluents ou de la réalisation d'analyses de sol, que le château Corbin-Michotte n'apporte pas d'éléments suffisants pour prouver la création d'hébergements et dispose de sols hydromorphes au vu des drainages réalisés, que le château La Tour du Pin Figeac ne communique pas d'éléments de valorisation permettant de réévaluer sa notoriété.
La suite au prochain épisode de cette saga judiciaire sans fin.