ui l'eu cru ? La Taille Rase de Précision (TRP) a ses premiers adeptes dans le vignoble bordelais. Et ce n'est peut-être que le début de l'histoire. Ce jeudi 3 mars, des dizaines de viticulteurs ont répondu à l'invitation de la Chambre d'Agricultture de Gironde pour assister à une démonstration de 4 machines de TRP à Mauriac, celles de Provitis, Ferrand et Pellenc sur tracteur et sur Optimum. Certains sont venus voir les outils et le rendu par curiosité. D'autres veulent s'engager.
"J'ai déjà demandé des devis, partage Axel Schuster de Ballwil, à la tête des 140 ha du domaine éponyme. La TRP Pellenc m'intéresse particulièrement car j'ai déjà le porteur avec bras multifonction. C'est essentiellement pour des raisons économiques que je veux passer le pas, pour la production destinée à la cave coopérative. Je produit en appelation Bordeaux, Bordeaux Supérieur, et en Entre-deux-mers, en coopérative et au chai. Mais les marchés sont catastrophiques. J'ai calculé qu'avec la TRP, en utilisant moins de main d'oeuvre pour la taille, le levage, je peux avoir un gain de 900 €/ha. Je ne ferai plus appel au prestataire. Donc j'ai commencé à préparer mes vignes. On est en train de plier à plat pour des passages de TRP l'année prochaine. Le palissage devrait lui être assez solide, je ne prévois pas de changement".
Axel Schuster de Ballwil est venu voir à l'oeuvre les 4 modèles de TRP à l'essai sur une parcelle des vignobles Yon, à Mauriac (33).
A un stade plus précoce de la réflexion, mais avec la même motivation, Quentin Montariol écoute attentivement les conseils et regarde avec intérêt les machines évoluer. "Pour les 120 ha des châteaux du Bois Chantant en Bordeaux supérieur et Bois Perthuis en Bordeaux, on fait intervenir 2 équipes de tailleurs décrit-il. Ce sont 15 à 20 personnes en tout dans la saison, en plus des salariés des domaines. L'idée est d'envisager de supprimer ces équipes et de réaliser la taille uniquement par les moyens internes, à 9 personnes, en recourant à la TRP". Quentin Montariol ne sait pas encore si la machine sera achetée ou s'il faudra passer par un prestataire. Les vignes sont taillées en guyot simple, double et en cordon. Il y a un travail de préparation à prévoir. Le palissage semble assez solide. Autre intérêt de la méthode TRP aux yeux de Quentin Montariol, la diminution du risque de gel. "Il y a des endroits gélifs pour lequels on pourrait essayer de passer plus tard en TRP", de manière à avoir moins de dégâts.
Quentin Montariol s'avance vers la TRP portée avant de Pellenc.
Avec un vignoble plus modeste, la famille Bras de Meilhan-sur-Garonne est aussi tentée par la TRP. "Je vais bientôt être seul sur 36 ha, explique Frédéric, représentant la dernière génération. Nous cultivons 30 ha en côtes du Marmandais et 6 ha en IGP. Et le personnel est difficile à trouver. Le gel est aussi une problématique car nous avons perdu un tiers de la récolte l'an dernier. La TRP pourrait donc palier aux difficultés. Nous avons déjà un mât Ferrand, des fils costauds, une taille en guyot simple qui ne sera pas compliquée à adapter. Cette année, on plie à plat. L'an prochain, nous espérons recevoir des démonstrations voire déjà avoir une machine, avec suivi automatique du cordon si possible, mais cette option est chère".
"On attache tout à plat cette année, partagent aussi les trois gérations Lechon, producteurs de Bordeaux à Saint-Avit Saint Nazaire. On va basculer 15 ha en IGP sur nos 30, et tailler en TRP la totalité si possible. Le prix du vrac, les coûts de production avec deux tailleurs, le gel nous poussent dans cette direction. Par sécurité et précision, on aimerait une machine qui dispose du suivi automatique du cordon. Au final ca serait de la taille, du tirage de bois et de l'attache en moins. Si on n'a pas investi dans un outil de TRP l'an prochain à mettre sur notre Same Frutteto CVT S, on cherchera quelqu'un qui puisse nous le faire".
Frédéric Bras et son père sont venus du Marmandais pour voir les TRP à l'oeuvre.
Pas de bras, pas de taille rase. Organisatrice de l'après-midi de démonstration de TRP ce jeudi 4 mars à Mauriac, la chambre d'agriculture de Gironde fait un focus sur les préalables indispensables pour mettre en place la TRP. Le principe de base est simple : pas de taille mécanique sans reprise manuelle ! Mais avant cela, il faut bien sélectionner les parcelles que l'on bascule en TRP : cordon rectiligne, terrain plat et longs rangs sont idéaux pour une meilleure qualité de taille et moins de reprise manuelle. Il faut des longueurs de coursons les plus réguliers possibles et le palissage le plus rigide possible. En outre, il faut enlever les tuteurs métalliques qui dépassent le fil porteur, préférer les tuteurs bambous ou plastiques. Sur guyot, passer en cordon unilatéral.
Le bras unilatéral doit aller jusqu'au début de l'autre bras, conseille la chambre d'agriculture. Il doit être attaché au lien plaqtique sur le bras suivant. Le bras doit être enroulé sur le fil afin d'être très rectiligne et très rigide. La zone de courbure doit être longue. Il faut alterer le sens des cordons d'une rangée sur l'autre. Niveau solidité du palissage, la chambre recommande des amarres pour des charges importantes, des piquets renforcés, du fil torsadé d'au moins 3,4 mm, un espacement entre piquets de 5 m.
Surtout, il ne faut pas négliger le temps de reprise manuelle, 12 à 20 h/ha. L'économie de main d'oeuvre est de l'ordre de 30 h/ha selon la reprise manuelle. Attention aussi la TRP peut occasionner trop de bourgeons par rapport au cahier des charges d'appelation. Une taille manuelle est alors indispensable pour les limiter.