l’Institut Agro de Montpellier, le professeur Alain Deloire se montre rassurant. « Sauf exceptions, le développement de la vigne ne sera pas affecté par les températures bien au-dessus des normales de saison dans plusieurs régions du pays fin décembre ».
Le chercheur appuie ses propos en redécrivant la succession des stades phénologiques de la plante.
La vigne entre en endodormance et cesse de croître dès le mois d’août, quand le rameau primaire se lignifie. « L’endordormance ne se lève ensuite qu’après un cumul de 8 à 10 jours, consécutifs ou non, de jours à des températures inférieures ou égales à 8°C ».
Entre temps, seul un réchauffement extraordinaire, couplé à de l’humidité, peut générer un pompage d’eau par les racines et déclencher les pleurs, avec une perte d’acide abscissique et un déclenchement du débourrement. C’est par exemple le cas de jeunes vignes en zone méditerranéenne proche du littoral, ou dans certains terroirs bien spécifiques où des pleurs de la vigne peuvent être déjà observées, ainsi qu’un début de gonflement des bourgeons.
« Avant d’imaginer que la douceur entraine le redémarrage de la vigne il faut d’abord du froid » rappelle Alain Deloire, précisant que l’endodormance est à ce jour souvent levée, hormis peut-être dans quelques zones méridionales.
La vigne se trouve désormais en écodormance. A ce stade, c’est le réchauffement du sol puis de l’air, à des températures au moins supérieures à 12°C, qui vont relancer les racines, les faire pomper de l’eau, pleurer les bourgeons et engendrer le débourrement.


Selon le professeur, le retour du froid dans la majorité des vignobles va empêcher le phénomène.
« Les quelques vignerons concernés par un débourrement précoce ne doivent pas s’affoler et, comme les autres, retarder la taille au maximum, pour favoriser l’acrotonie des sarments et préserver les bourgeons d’hiver situés à la base du sarment » indique Alain Deloire.
Ces bourgeons d’hiver, ou bourgeons latents sont les plus fructifères parmi les six types de bourgeons que compte la vigne.
Les bourgeons latents comportent un bourgeon principal, responsable à lui seul de 80% du rendement potentiel de l’année, un bourgeon secondaire et un bourgeon tertiaire, ces deux derniers étant peu ou pas fertiles.
« Pour éviter le gel de printemps, une solution possible est la taille tardive entre les pleurs et quelques jours après le débourrement, sans prétailler ni coucher les bois pour préserver l’acrotonie » détaille Alain Deloire.
Il assure que l’acrotonie sera forte et que les trois premiers bourgeons de la base ne se développeront pas dans 80% des cas si le sarment compte au minimum 8 bourgeons.
D’après des essais réalisés avec ses collègues à l’Institut Agro entre 2019 et 2021, il est possible de tailler jusqu’à 10 jours après la date « normale » de débourrement, soit 30 à 50% de débourrement observé, sans effets importants sur les autres stades phénologiques et avec des effets limités sur le rendement final en raisins. Il faut raisonner par cépage dans leur environnement.