Écorces explosées et ceps craquelés sur des pieds de cabernet sauvignon, merlot et petit verdot. Cette vision de bois de vignes martyrisés par le gel de printemps est découverte cette fin d’automne par le maître-tailleur Massimo Giudici (Simonit & Sirch) dans des vignobles du Sud-Gironde (sur les communes de Barsac et Pujols). Sur des parcelles où les températures sont globalement tombées à -6°C en avril dernier, des pieds complantés de 2 à 4 ans montrent depuis des mois des écorces déchirées, comme éclatées, sur leurs jeunes ceps. N’ayant observé ces dégâts inhabituels que sur des complants isolés dans cette partie du vignoble de Bordeaux, Massimo Giudici se souvient avoir observé en Italie des plantiers touchés dans leur intégralité après le de 2017. « Il n’y a rien à faire » constate le tailleur, qui « décide de couper sur le bois de trois ans pour repartir ».
« Ça a éclaté. Ce n’est pas bon, il faut faire sauter » confirme le professeur de viticulture Alain Deloire (Montpellier Supagro). D’après les coupes réalisées (photo ci-dessous), l’expert note que « le gel de printemps a touché les cellules de cambium, les plus fragiles du bois (comme ce sont des cellules méristématiques). Pour avoir ces dégâts, la température a dû descendre à -8-12°C, à moins qu’il n’y ait eu des fragilisations du pied (comme des outils de travail du sol). »


Voyant pour la première fois de tels dégâts en France, le professeur souligne que le gel n’a pas nécrosé tout le cambium, permettant une production de phloème et d’écorce, mais pas de bois. « C’est trop abîmé, on ne peut pas le récupérer : 30 à 80 % de la conduction [de sève] est perdue, alors qu’il s’agit de jeunes vignes en installation. En continuant sur ce rameau, dans 5 à 10 ans la vigne est morte. Il faut receper en dessous de la zone éclatée. »
« On coupe le pied en espérant que ça reparte. Cela dépendra des cépages, mais on a espoir que cela se passe bien comme ce sont de jeunes pieds » conclut Massimo Giudici.
Coupe d'un cep à l'écorce éclatée, avec des nécroses visibles dans le cambium. Photo : Massimo Giudici (Simonit & Sirch).