Démocratie participative
Un référendum sur l’interdiction totale des pesticides de synthèse en Suisse

Une initiative populaire pour l’interdiction des pesticides de synthèse dans la production agricole sera soumise au vote du peuple le 13 juin. Le vice-président de l’association des vignerons-encaveurs indépendants pense qu’elle a de bonnes chances d’aboutir.
« Le printemps sera chaud jusqu’au vote du 13 juin » prévient Jean-Denis Perrochet, vice-président de l’Association des vignerons-encaveurs indépendants de Suisse (ASVEI) et vigneron en biodynamie à Auvernier.
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A cette date, le peuple se prononcera par référendum sur une initiative populaire visant à modifier la Constitution pour interdire « l’utilisation de tout pesticide de synthèse dans la production agricole, la transformation des produits agricoles et l’entretien du territoire », de même que les importations commerciales de denrées en contenant.
L’initiative a été déposée en mai 2018 à la chancellerie fédérale après avoir récolté 127 000 signatures. Elle doit désormais obtenir la double majorité, celle du total des voix, et celle des 25 Cantons, pour être validée. « Elle a de bonnes chances de passer. Je pense qu’elle aura la majorité des voix, et j’espère qu’elle obtiendra les 13 cantons, reprend Jean-Denis Perrochet, co-initiateur de la proposition. Certains comptent moins de 50 000 habitants et sont plutôt conservateurs ».
Le vigneron y est très favorable, jugeant que la Suisse a les moyens de montrer l’exemple en matière de préservation de l’environnement. « Environ 50% des agriculteurs suisses se passent déjà presque totalement de pesticides de synthèse, indique-t-il. 7000 sont certifiés bio, d’autres ont le label « protection intégrée » et 10 à 15% des vignobles sont conduits en bio, un chiffre en forte progression chaque année ».
Les 500 membres de l’ASVEI ne sont pas tous du même avis. « Certains veulent pouvoir traiter en cas de forte pression des maladies. La proposition inquiète aussi ceux qui travaillent en forte pente ».
D’autres viticulteurs s’y opposent en dehors de l’association. « C’est par exemple le cas de ceux qui vendent leur raisin à 1 ou 2 francs le kilo » reprend le vice-président, qui souhaite les rassurer. « Si elle est votée, l’interdiction ne prendra vraiment effet que dans 10 ans. Cela laisse le temps au pays de mettre en place des mesures cadres permettant la transition ».
L'Interprofession de la vigne et des vins suisses (IVSS) ne se prononce pas sur l'initiative. En revanche, plusieurs Chambres d’agriculture, la Fédération suisse des vignerons, la Fédération suisse pour le développement d'une vitiviniculture durable et plusieurs dizaines d’associations ont lancé une campagne pour appeler le peuple à voter « non ».
Le Conseil fédéral et l’Union suisse des paysans les rejoignent. « La Confédération a déjà entrepris de gros efforts pour réduire les risques liés aux pesticides avec son plan d’action sur les produits phytosanitaires de 2017 et ces efforts seront intensifiés dès 2022 dans le cadre de la Politique agricole » rappelle le premier. « L’agriculture suisse perdrait des débouchés en cas de reconversion systématique à l’agriculture biologique » estime l’Union suisse des paysans, craignant en outre une baisse des rendements jusqu'à 30 % et une augmentation du gaspillage alimentaire due à des écarts de triage plus importants.
Le 13 juin, les Suisses devront aussi se prononcer sur l’initiative « Pour une eau potable propre et une alimentation saine », qui entend couper les subventions directes versées aux agriculteurs utilisant des pesticides ou des antibiotiques. Presque toutes les associations représentant les agriculteurs et viticulteurs y sont défavorables.